Chapitre 7

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« Anges, femmes, hommes, enfants, je m'adresse à vous en ce jour pour vous annoncer une terrible nouvelle. Les vampires, une fois de plus, nous portent affront. Ils menacent d'enfreindre les règles, de terrasser tout un village si on ne leur livre pas vivante celle qui a miraculeusement redécouvert l'existence d'un immense territoire qui s'étend au-delà de ce que nous appelons dorénavant la Cité. Mais les exploits d'Ambroisie Borély, ici présente, ne s'arrêtent pas là. En effet, lorsqu'elle a pris conscience de l'ampleur du désastre au Paradis, elle n'a pas hésité à risquer sa vie en grimpant au sommet de la tour pour y délivrer tous les nôtres enfermés injustement, moi y compris. Grâce à elle, nous avons mené à bien la Révolte, grâce à elle, le Paradis est redevenu libre. Allons-nous la servir aux vampires ? à ces monstres sanguinaires ? Non ! Parce qu'Ambroisie a sa place ici comme n'importe lequel d'entre nous. Elle est des nôtres. Quiconque voudra s'en prendre à elle s'en prendra à nous tous. C'est pourquoi, aujourd'hui et afin d'éradiquer toute menace, je déclare la guerre aux vampires partisans du mal. Ce sont les élus qui votent et discutent des lois, or en période de conflit nous manquons de temps, il faut agir vite. Je veux pouvoir prendre les décisions importantes ; je veux protéger mon peuple. Alors moi, Théo Dailiane, vous demande de bien vouloir de moi comme roi. »

Et des « Vive le Roi » se sont mis à retentir pour ne plus s'arrêter. Je me souviendrai de ce discours, des premiers « Sa Majesté Dailiane ». Je me rappellerai de son regard confiant et déterminé puis du soulagement sur son visage lorsqu'il a vu un, puis deux, puis trois anges afficher de grands sourires sincères. Ç'a été comme une évidence, pour tous, que malgré son jeune âge il est né pour être roi. En vérité cela est tout à fait logique, s'il avait eu la chance de connaître son père, tout le monde lui aurait dit à quel point la ressemblance est frappante.

S'en est suivi un cortège dans les rues de la Cité lors duquel il me cherchait obsessionnellement des yeux à chaque fois que je disparaissais de son champ de vision. J'ai deviné qu'il aurait aimé partager ce moment avec moi, que je lui tienne la main et que ce soit en quelques sortes notre instant de gloire à tous les deux. Mais moi je ne pensais qu'à Yanis, à mon ardent désir de le revoir, à l'espoir que je nourrissais qu'il aille bien.

Le tourbillon semble m'engloutir de nouveau.


Lahela et moi sommes attablées sur la terrasse d'un café bordant un boulevard calme et plutôt agréable. Des arbres récemment plantés entre les pavés servent déjà de perchoirs à quelques oiseaux sifflotant sous le soleil. Au cœur du Palais, au loin, Théo élabore une stratégie de guerre auprès des élus et du nouveau chef de la garde.

- Aux dernières nouvelles ils comptent envoyer les premiers soldats ce soir, m'informe Lahela. Tellement de décisions sont prises à la minutes que j'ai du mal à suivre, ça me fait du bien de me détendre un peu, merci de m'avoir proposé de venir...

- C'est pas mon truc de boire un café toute seule...

- Lait aux noix de Lombie, plutôt.

- Oui...

- Tu es aussi compliqué en matière de nourriture qu'en ce qui concerne les garçons, lance-t-elle d'un ton taquin.

Est-ce l'impression que je donne ? Après tout elle ignore ce que je ressens pour Yanis. Théo lui aurait-il raconté nos quelques échanges romantiques ?

- Pourquoi tu dis ça ?

- Tu le fais tourner en bourrique.

- Qui ça ?

- Oh non j'espère que tu rigoles !

- Théo ?

- Non, le boulanger d'à côté !

- Eh ça va je ne vois pas ça comme une évidence, c'est tout. Donc je le fais tourner en bourrique ? Peut-être que tous les deux on est juste trop préoccupés par des problèmes majeurs pour se laisser aller. Je pense que me rapprocher de lui empirerait les choses.

Lahela fait la moue, elle semble réfléchir sans vraiment forcer.

- Ouais, bon changeons de sujet.

- De quoi veux-tu qu'on parle ?

- Je te laisse choisir.

- Ne te foule pas... En fait... J'ai une question à te poser. Je ne me sens pas prête à en faire part directement à Théo, j'aimerais que tu approuves l'idée avant.

- Je reste vigilante mais vas-y quand même...

- On a perdu beaucoup de guerriers durant la Révolte, au niveau de la garde comme des civils. Je sais que Théo ne fait pas entièrement confiance à ceux qui ont combattu pour la Couronne, même si leur devoir est de servir celui qui siège au Palais. Lahela... On ne fera pas le poids face aux vampires, n'est-ce pas ? Ils sont trop nombreux...

- Mais divisés en autant de clans !

- Et s'ils décident de s'unir ? Admettons que nous arrivions à sécuriser le village, ils s'en prendraient à des innocents venus d'ailleurs ! Les cibles sont partout et lorsqu'ils auront semé la terreur on reviendra au point de départ : je me porterai volontaire.

- On refusera.

- Je ne vous demanderai pas votre avis, je m'en irai dans la nuit et des tas d'anges seront morts pour rien.

Lahela me fixe droit dans les yeux, plus concentrée que ce que je ne l'en aurais cru capable.

- Tu as dit que tu avais une idée.

- Oui, je réponds en esquissant un petit sourire. Il y a une alternative. Certes nous manquons d'hommes, mais qui dit que cette guerre n'opposerait que les anges aux vampires ? Des tas de peuples leur en veulent et ils possèdent des richesses convoitées de tous. Ce que je vais te dire parait peut-être fou mais... ça me semble logique. Est-ce qu'il serait possible de former une alliance avec les démons ?

A ma grande surprise Lahela plaque ses mains contre sa bouche, arborant un visage traduisant un choc terrible... puis laisse échapper un petit rire nerveux et donne un grand coup sur la table.

- Mais bien sûr !

- Tu te moques de moi ?

- Mais non au contraire ! C'est formidable Am tu... Waouh. Ecoute tu ne réfléchis pas comme nous, tu ne connais pas notre histoire et c'est sûrement pour ça que tu trouves des solutions auxquelles on n'aurait jamais songé. J'avoue que ça parait fou mais avec toi dans notre camp je pense que c'est réalisable. Pour rassembler les peuples rien de tel qu'une ado qui n'appartient à aucun des deux.

- Les élus approuveraient ?

- J'en doute, mais on s'en fiche, le seul avis qui ait de l'importance est celui de Théo désormais, et il se trouve qu'il craque pour toi.

- Oh...

- Ne joue pas l'ignorante.

- Je t'ai expliqué qu'on a trop de problèmes pour penser à sortir ensemble.

- Pourtant tu l'envisages, non ?

- Je...

- Am tu n'es pas claire. A aucun moment tu ne m'as semblé ressentir de l'amour pour lui. Je crois que tu ne l'apprécies pas véritablement... C'est bizarre, étrange je dirais même. Un détail m'échappe, je présume ?

Voyant mon visage soucieux elle me prend les deux mains et affiche une mine rassurante.

- On a toutes les deux besoins d'une confidente, d'une amie. Si on ne se dit rien notre relation est surfaite. On fait comme si on était proche alors qu'il y a un mur entre nous.

- Théo m'a dit la même chose.

- C'est parce qu'on en a discuté tous les deux. On en a conclu que chacun de nous est distant et qu'il faut y remédier... Evelyne l'avait remarqué la première.

Je me souviens de la vieille femme qui avant de mourir nous avait fait part de ses angoisses, des nuages qui s'annonçaient et du besoin de s'unir pour y faire face.

- Ce n'est pas parce que je suis proche de Théo que je dois entendre qu'il est merveilleux. Dis-moi ce que tu ressens, insiste Lahela.

- Je ne sais pas si je vais y arriver.

Ma gorge se serre et mes poumons semblent se rétracter.

- C'est si difficile que ça ?

- Les sentiments nous surprennent souvent, tenté-je de me justifier.

- On va faire plus simple alors. Contente-toi de répondre à mes questions, suggère-t-elle.

- Ok.

- Est-ce que tu as un jour été amoureuse de Théo ?

- Non... en fait je n'en sais rien, mais pour le moment ce n'est certainement pas le cas.

- Jusqu'où c'est allé ?

- On s'est embrassé le soir du bal, avoué-je en arrachant un sourire complice à Lahela. A l'époque j'avais l'impression qu'il était le seul point positif de ma vie. J'étais un peu perdue... je suis inquiète parce que ça à l'air de recommencer.

- Je ne comprends pas... ça date avec Théo... et depuis ?

- On a discuté. Il me dit souvent de belles choses.

- Ce qui vous retient ce sont les problèmes ? demande-t-elle avec une grimace. Non. Non, ce n'est pas ça. Tu ne m'as pas tout dit. Il y a autre chose.

- J'ai pas choisi, j'ai rien choisi du tout c'est comme ça et je n'y peux rien...

- De quoi tu parles ? Am ?

Mes yeux me piquent ; si je retiens les mots je vais craquer et c'est bien la dernière chose dont j'ai envie.

- Il y a quelqu'un, devine-t-elle.

- Et je l'aime malgré moi.

- Qui ?

- Tu ne devines toujours pas ?

- Quelqu'un que tu connaissais avant de venir au Paradis ?

- Non. Quelqu'un avec qui je me suis sentie libre. Quelqu'un qui m'a montré la croisée des chemins de l'arbre des possibles.

On dirait que Lahela vient d'apercevoir un fantôme. Elle recule légèrement et me lâche les mains.

- Yanis.

- Oui.

Elle me dévisage un moment, sans un mot.

- Dis quelque chose.

- C'est un démon.

- Mais ça n'avait pas l'air de te déranger qu'on fasse alliance !

- Pour la guerre, Am ! Pour la guerre !

- Il est où le problème Lahela ?

- Ce sont des êtres impurs.

Je suffoque.

- Ils sont mauvais, renchérit-elle.

Je revois Yanis étrangler la nymphe ; son regard fou, qui n'avait plus rien d'humain. Mais était-ce vraiment lui ? Depuis notre arrivée au Paradis Perdu il avait changé, comme si la terre qu'il avait si longtemps rêvé de fouler le rejetait, le tuait peu à peu afin qu'il s'en aille.

- Ils ont des raisons d'en vouloir aux anges, certaines rancunes sont compréhensibles...

C'est alors que me reviennent des souvenirs de Paris, lorsque, sur le bateau-mouche, il avait littéralement sombré dans une colère noire. Je ne pourrais pas dire que Lahela a raison, cependant de nombreux points m'échappent. Cette colère, ces sentiments exacerbés sont difficilement justifiables.

- Peut-être qu'ils sont plus... primitifs ? Mais ils peuvent aussi se montrer généreux et tendres.

- Combien de démons as-tu rencontré sur Terre ?

- Juste lui.

- Il a sûrement dû trouver quelque chose de spécial en toi, suggère-t-elle.

- Oh je vois que vous avez également discuté de ça avec Théo !

- C'était pour te faire comprendre que s'il a vu de l'intérêt à être sympa avec toi...

- Tu penses qu'il a fait le lèche-cul ? Non mais je rêve ! Tu étais dans la confidence, avec Théo. Vous m'aviez confié à lui !

- Il était persuadé que Yanis ne te ferait aucun mal et on n'avait aucune autre option. De toute façon on pensait qu'il... que son cœur était déjà pris. T'imagines pas ce que ça lui a coûté de devoir te placer sous sa responsabilité !

- Pourquoi tu les détestes autant ? Et qu'est-ce que tu insinues à propos des sentiments de Yanis ?

Lahela se fige un moment puis reprend peu à peu ses esprits.

- Rien, lâche-t-elle. On a assez parlé, ça suffit. Fais part à Théo de ton idée pour l'alliance.

Sur-ce elle se lève brusquement et s'en va d'un pas rapide, me laissant seule sur la terrasse du café.

Et lui, est-ce qu'il me déteste ? Il m'a appris que n'importe quel objet pourrait s'avérer utile pour ma défense, même une simple pierre... et c'est avec ça que je l'ai frappé, voire achevé.

Non, dit la petite voix dans ma tête. Il n'est pas mort. Il est quelque part et bientôt nous nous reverrons.


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