Quand François rapporta la conversation qu'il avait eue avec Julien à Tamara, cette dernière ne sembla pas pour autant convaincue :

— Je ne serai pas une bonne mère, répondit-elle après un moment de silence.

— Toi ? Pas une bonne mère ? s'étonna François. Et c'est quoi, pour toi, une bonne mère ?

— Quelqu'un qui fait passer son enfant avant ses intérêts personnels.

— La manière dont tu as créé des liens presque instantanément avec Julien prouve que tu es une bonne mère, argumenta-t-il. Tu lui as apporté exactement ce dont il avait besoin. Je vois aussi que tu t'investis de plus en plus dans son éducation. Tu montres chaque jour que tu le fais passer avant tout le reste.

— Cela ne rattrapera jamais toutes ces années perdues.

— Non, mais on a dit qu'on allait de l'avant, rappela-t-il. Et si on doit regarder en arrière, j'ai ma part de responsabilité dans la manière dont cela s'est passé. Je n'ai pensé qu'à moi quand je t'ai interdit de reparaître dans ma vie et, par extension, dans celle de Julien. Tu estimes que je suis un mauvais père ?

— Tu sais bien que non.

— Alors, prouve-moi que tu es un moins bon parent que moi.

Tamara haussa les épaules sans répondre.

— Ma chérie, je ne veux pas te forcer, c'est un engagement important, tu dois en avoir envie. Par contre, si tu hésites par peur de ne pas être un bon parent, je peux t'affirmer que tu n'as pas de soucis à te faire de ce point de vue là.

— J'ai besoin de réfléchir, murmura Tamara. Tu y tiens beaucoup ?

— Eh bien... j'ai raté la grossesse de Julien et puis... C'était avec toi que j'avais envie d'élever un enfant, pas avec ma mère. Je lui suis très reconnaissant de son aide, mais ce n'est pas la vie que j'avais espérée.

— Je suis tellement désolée... commença Tamara.

— Chérie, je ne cherche pas à faire du chantage affectif. Ce que je veux te faire comprendre, c'est que ma motivation est totalement égoïste et que tu as le droit de l'être aussi. C'est à toi de décider si tu as envie ou non d'avoir un autre bébé. Et tu dois penser à toi, pas à moi.

— Bien sûr que j'en ai envie. Moi aussi, j'ai rêvé d'élever un enfant avec toi. Mais ça me fait tellement peur !

François la serra tendrement contre lui :

— Si tu penses finalement qu'on est assez heureux comme ça, et que tu ne veux pas compromettre notre équilibre, je comprendrai.

— Mais tu serais déçu, analysa-t-elle.

— Sans doute un moment, mais je passerai à autre chose, promit François. Chaque matin, quand je me réveille à côté de toi, je me dis que j'ai de la chance. Je continuerai à le penser, quelle que soit ta décision, t'en fais pas.

— Je vais réfléchir à tout cela, promit Tamara. Et moi aussi, je me dis chaque matin que j'ai beaucoup de chance.