Toucher - partie 3/8

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Céleste n'était plus humaine.

Jean était assit à côté d'elle et passait sa main sur son cou, l'entourait parfois et serrait légèrement avant d'arrêter, satisfait de voir la terreur se peindre sur le visage de sa victime. Chaque fois qu'il la touchait, Céleste était prise de haut-le-cœur et de l'envie de mettre le feu au monde entier. La peur et la colère réunies n'avaient jamais fait bon ménage.

— J'ai fait beaucoup d'efforts pour venir te voir ici, tu sais.

Céleste ferma les yeux. Ce n'était pas la première fois qu'elle entendait ce discours, mais Jean adorait s'écouter parler et répéter que la Blanche n'avait aucune chance de s'en sortir.

— Il a fallu que je place des complices de mon côté devant les caméras. C'est difficile de savoir en qui on peut avoir réellement confiance, tu n'es pas d'accord ?

Céleste lui cracha dessus pour toute réponse. Jean ne réagit pas. Comme si à ses yeux, elle n'existait pas, n'importait pas. Il désigna une caméra visible.

— L'avantage avec toi, c'est qu'on n'a pas beaucoup de monde derrière. Tout le monde a peur de se faire tuer par ton putain de pouvoir. Je les ai rassuré et je leur ai promis que tu es inoffensive maintenant. J'aurai aimé pouvoir continuer de regarder tes jolis yeux, mais je ne veux pas prendre de risque de briser une promesse. J'espère que tu comprends.

Il plaça sur ces mots un bandeau devant ses yeux. Céleste serra la mâchoire, fort. Elle aurait aimé pouvoir mordre dans quelque chose. Elle aurait voulu libérer ses mains et attaquer. Juste avant que le noir ne l'enferme totalement, elle tourna la tête vers Rayan. Il se tenait à l'écart, près de la sortie. Il sautillait presque sur place. Visiblement, il avait hâte que Jean termine ses affaires pour pouvoir partir.

Il était dans cet état à chaque fois. Céleste se demanda ce que Jean pouvait bien lui offrir pour qu'il soit prêt à affronter cette angoisse à chaque fois.

— Je ne sais pas si tu sais, je n'ai pas vraiment l'autorisation d'être ici. Guillaume a fait de son mieux pour me l'interdire, j'ai rarement vu une telle détermination contre moi. Il ne voulait pas non plus accepter mon idée, je pense qu'il aurait préféré te tuer très rapidement et passer à autre chose. Il est toujours pressé pour tout. Pourtant, il est plutôt jeune, tu sais. Il a encore du temps devant lui, je crois qu'il est juste trop nerveux.

Céleste sentait la main de Jean sur son cou. Elle sentait sa peau contre la sienne alors qu'il retraçait le chemin des blessures laissées par les cigarettes de Lola.

— Je ne sais pas pourquoi il est si motivé à te protéger. Tu déranges depuis que t'es arrivée, tu détruis tout ce qui est proche de toi. Pourquoi tu penses que t'as été la première à être liée ? C'était au cas où tu mourais comme les autres. Tu es un élément remplaçable depuis le début, comme tout ton groupe. Si tu veux mon avis, la seule raison pour laquelle Guillaume veut pas te faire trop de mal, c'est parce que t'es la mère des deux petits. Je peux le comprendre, parfois, j'ai eu des gamins aussi, et ils ont eu des gamins à leur tour. Mais ensuite je te regarde et je vois que même ça, tu peux pas le faire. Être mère. Tu vas les détruire eux aussi, ces enfants. Ils te doivent rien mais tu leur dois tout et t'es pas capable de les regarder en face. Il devrait être en colère contre toi pour ça aussi, le Guillaume. Mais j'imagine qu'il comprend ce que c'est, d'être un parent de merde. Il a envoyé ses deux gosses à l'internat après tout. Jamais j'aurai fait ça, moi.

Céleste serra les poings. Si elle mettait plus de pression dans sa mâchoire, elle allait finir par se casser quelque chose, alors il fallait trouver un autre endroit. Elle aurait voulu pouvoir répliquer quelque chose, mais les mots lui échappaient. Sa gorge était de toute manière trop douloureuse pour qu'elle puisse dire quoique ce soit. Elle allait pleurer de rage, s'il continuait de parler.

— Il est joli, ce dessin sur ton cou.

« Dessin » était le pire mot pour décrire cette blessure.

Le silence s'installa. Céleste respirait rapidement et ses poumons la brûlaient. Tout était noir autour d'elle et il était maintenant facile de sentir la peur monter et s'installer. Quand elle ne voyait rien, ses sentiments semblaient toujours prendre plus de place. Dans un flash, elle revit une psychologue qui l'avait suivie lors de ses premières années à l'intérieur. Ça la surpris, puisqu'elle n'avait pas repensé à cette femme depuis bien longtemps. Elle ne l'avait même pas vue souvent, en réalité. Elle ne se souvenait plus de son nom, et ça voulait bien signifier quelque chose : Céleste oubliait rarement les gens. Mais, petite, elle avait pensé que c'était une bonne psychologue. Pas quelqu'un à qui elle ferait confiance, mais quelqu'un qui connaissait son métier. Céleste ne pouvait pas se rappeler des mots exacts employés par la femme, mais elle la revit très clairement lui donner plusieurs conseils. En cas de panique, il est toujours utile de ce concentrer sur certaines choses : ce que tu peux voir, ce que tu peux toucher et ce que tu peux entendre. Essaye d'énumérer cinq éléments à chaque fois, ça aide à oublier la panique, à la mettre de côté. Tu comprends ?

Céleste se demanda pourquoi les adultes s'entêtaient toujours à lui demander si elle comprenait. Elle n'était pas débile. Et qu'est-ce qu'ils en avaient à faire, qu'elle comprenne ? Ils voulaient toujours qu'elle comprenne, elle, mais eux ne comprenaient jamais rien ; ils ne prenaient même pas la tête d'essayer, d'écouter. Non, ils n'avaient jamais été de réels alliés. Céleste n'avait jamais connu d'adulte suffisamment prêt à se battre pour elle et à la protéger. Aucun ? Si, il y avait son ancienne maîtresse. La dame au piano. Elle l'avait défendue, elle l'avait aidée, elle lui avait montré ce qu'il y avait de plus dans la vie. Puis elle l'avait délaissée quand elle avait été envoyée à l'internat.

Au fond, peut-être que tout le monde savait qu'elle était une cause perdue depuis le début. Peut-être que ceux qui s'approchaient d'elle le faisaient par pitié. Ils finissaient toujours par partir.

Sous son bandeau, Céleste ferma les yeux. Non, elle ne pouvait pas laisser ces pensées noires s'installer. Ce n'était pas vrai.

Et même si c'était vrai, ce n'était pas important.

Elle essaya de se concentrer sur ce qu'elle pouvait sentir. Le toucher était depuis quelques années devenu un des sens les plus développés de Céleste. Puisqu'on avait voulu lui enlever sa vue à plusieurs moments, elle avait appris à se repérer grâce à ce qui était en contact avec elle. Et même avant son pouvoir, elle avait toujours entretenu cette relation bizarre avec le toucher. Parfois, elle avait l'impression de crier NE ME TOUCHE PAS de tout son être. Et en même temps, d'autres fois, elle en avait envie. Elle en avait besoin.

NE M'APPROCHE PAS, NE ME TOUCHE PAS MAIS NE ME LAISSE PAS, NE M'ÉCOUTE PAS QUAND JE DIS ÇA.

Aujourd'hui cependant, rien de tout cela. Céleste n'avait pas envie. Sans y penser, elle tentait de son mieux de se soustraire à n'importe quel contact.

Elle essaya d'oublier la main de Jean qui se baladait sur son corps et lui donnait la nausée. Elle n'avait vraiment pas envie d'être approchée par quelqu'un comme lui. Elle n'avait vraiment pas envie d'être touchée quand elle n'était pas libre de ses mouvements et que tout lui faisait mal. Elle n'avait pas envie de sa peau brûlante et acide contre la sienne.

Jean commença à retirer ses vêtements déchirés.

Céleste ne voulait pas vivre ça. Elle ne voulait pas, non, elle ne pouvait pas. Elle ne pourrait pas se relever après, elle ne pourrait pas se reconstruire. Comment pourrait-elle quand on venait s'attaquer à cette partie là d'elle ? La panique s'empara d'elle, elle se débattit, hurla et s'agita autant qu'elle pouvait, mais Jean était un ennemi bien trop grand. Que pouvait-elle contre lui quand elle était désarmée ainsi ?

Alors elle ferma les yeux, laissa son esprit s'enfoncer au plus profond d'elle-même et se déconnecta de son corps.

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