OS réalisé sur le thème de Halloween.

Taille de l'OS : Tranche de vie

Cette année, ce sera mon premier Halloween loin des miens. Ce sera la première fois que je n'attendrai pas patiemment que des bambins viennent frapper à ma porte pour les terroriser avec un superbe costume de ma création.

Je pense que Miiko a remarqué ma nostalgie puisqu'elle m'a confié une mission de la plus haute importance pour me changer les idées :

Trouver l'histoire la plus terrifiante qui soit à raconter aux enfants du Refuge d'Eel.

Autant dire que je prends cette tâche très à cœur ! Le soir de Halloween approchant, je me décide de me rendre à la Bibliothèque pour y dégoter une légende sordide sur une créature issue de nos pires cauchemars. Après quelques heures de recherche dans les ouvrages poussiéreux de Kero, les rayons de la lune blafarde viennent éclairer la pièce d'une lumière laiteuse. Des bougies à flamme bleue s'allument comme par enchantement.

-Ils ont le chic pour mettre dans l'ambiance, les faeries, me dis-je à moi-même.

-Tu parles toute seule, maintenant ? survient une voix, derrière moi. Je ne pensais pas que ton cas était si grave.

D'un bond, je fais volte-face et me retrouve nez à nez avec Nevra. Lui ? Ici ? Il tombe bien finalement. Je lui explique brièvement la mission qui m'incombe et le voila qui se fait une joie de partager avec moi son savoir des créatures des ténèbres.

-J'en connais une parfaite, me sourit-il.

D'un geste, il m'invite à prendre place sur les poufs près des étagères. La lueur blême des chandelles danse sur sa peau d'albâtre. Son œil brille d'une malice sans nom tandis qu'il commence son récit.

-Tu connais les Elfes, n'est-ce pas ?

Je hoche frénétiquement la tête.

-Mais connais-tu ceux qu'on nomme Elfes Noirs ? Ah, je vois à ta tête que tu n'as pas encore eu le malheur d'en rencontrer un. Vois-tu, les Elfes Noirs ont bien des appellations de part le monde. A l'origine, on les appelait Dokkalfars. Par la suite, jusqu'à nos jours, les peuples de la surface les connaissent sous le nom de Drows.

Ce mot me fait frémir. J'en ressens toute la vilénie.

-Tu as raison d'avoir peur, ma Petite Douceur. C'est bien la seule chose qui pourrait te sauver face à l'un d'entre eux. Si tu en vois un, un jour, je ne peux que te conseiller de courir. Courir pour ta vie et pour ton âme. Mais honnêtement, je doute que tu parviennes à leur échapper.

La peau des Drows est aussi sombre que leur cœur et leurs longs cheveux sont d'une blancheur lunaire.

"Un Drow ne te chassera pas pour te manger, se venger ou la gloire du combat. Un Drow te traquera pour se délecter de ta peur. Il t'égorgera et admirera la dernière lueur de vie s'éteindre dans tes yeux.

On dit, dans les histoires, que le meurtre et la trahison sont un mode d'ascension sociale comme un autre pour eux. Ils étripent leur voisin comme vous buvez le thé, dans ton monde.

Il parait que certains d'entre eux auraient voulu quitter leur Outreterre pour s'aventurer sur nos territoires. Certains témoignent avoir vu quelques Drows filer entre les arbres dans les terres voisines d'Eel. Il est dit qu'ils convoitent quelque chose de sacré, qu'ils se nourrissent de nos peurs."

-Mais ce ne sont que des légendes ? m'enquis-je.

Une forte de pluie se met alors à battre sur la fenêtre ronde de notre sanctuaire. Comme si le temps lui-même venait appuyer les paroles de Nevra.

-Je n'en suis pas si sûr, avoue-t-il. Les témoignages sont plausibles, tu sais. Leur déesse araignée, Lloth, a ses propres légendes et partisans dans le West Side. Si des Drows venaient à faire surface en nombre, nous serions perdus.

"Ils vivent depuis des siècles et des siècles sous terre. Ils ont appris à haïr les faeries de la surface, ne nous vouant qu'une soif de sang inextinguible. Ils sont fourbes, machiavéliques et se repaissent de l'effroi qu'ils provoquent.

Et surtout..."

-Oui ? Surtout quoi ? l'incitai-je à continuer.

-Non, rien que des bruits de couloir. Ça ne t'intéresserait pas.

-Dis-moi, je veux savoir, suppliai-je le vampire.

Une lueur diabolique enflamme son regard.

-Il est dit que les premiers Gardiens d'Eel auraient réussi à capturer un Drow, particulièrement sauvage et sanguinaire. Depuis, on raconte que l'Elfe Noir vivrait toujours dans les cachots de la forteresse. Tapis, là, dans l'ombre, à attendre son heure.

"A attendre que quelqu'un le délivre de ses chaines pour qu'il puisse asservir le monde. On dit que la nuit de Halloween est le seul moment de l'année où sa geôle se fragilise. Il se peut même qu'en ce moment, il s'extirpe de sa prison."

Cette simple idée suffit à me faire tressaillir. Mon corps tout entier tremble d'épouvante.

-Peut-être qu'à l'instant où nous parlons, il remonte les marches menant jusqu'ici, continue Nevra. Si ça se trouve, il ressent déjà notre présence et perçoit tes frissons de terreur. Il est peut-être là, juste derrière toi, caché dans les ténèbres, prêt à te dévorer !

Alors que l'orage gronde plus fort, dehors, un fracas me fait sursauter. Derrière moi, la grande porte de la bibliothèque s'ouvre à la volée. Sur le seuil, se tient un homme. Grand, élancé, élégant et pourtant terrifiant. Le faisceau de la lune dévoile sa longue chevelure blanchâtre ébouriffée par la tempête qui fait rage. Ses traits fins sont crispés et ses yeux brûlent d'un ardent désir. Le Drow s'avance vers nous, le pas chancelant.

-J'ai faim, gémit-il. Du miel, par pitié !

Les bougies aidant, je reconnais enfin l'homme qui se tient devant nous. Je cesse alors de faire de l'apnée et m'exclame :

-Ezarel ! Vient vite t'asseoir au chaud, fis-je en tapotant un pouf de la main.

Reprenant mes esprits après cette frayeur, je me tourne vers Nevra. J'affiche le sourire le plus sadique que je me connaisse. J'en vois déjà qui vont hurler de terreur à la Veillée des Saints.

-Cette histoire est parfaite, Nevra !