19 - Momo : Enterrement

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   .   ー Je ne veux pas en parler, s'empresse de dire Hanako dès que Momo a ouvert la porte de la chambre. 

.   Des feuilles de dessin jonchent le sol. Tous faits à l'arrache, dans un empressement fiévreux et violent. Les traits sont grossiers et épais, certainement dû à la pression mise sur le crayon. Elle s'accroupit et en saisit un, représentant une personne recouvert de liquide noire recroquevillée sur elle-même, mains aux oreilles, sa bouche déformée par un cri inaudible. 

.   Hanako a le don de retranscrire ses ressentis par le dessin, qu'elle brûlait ou jetait après. "Ces dessins sont bourrés de sentiments négatifs que je ne pourrais décrire, que ça me met mal à l'aise de les garder" lui avait confié Hanako un jour. 

.   ー Ce liquide, d'où vient-il ? demande Momo. 

.   ー Ce liquide la compose, murmure-t-elle comme par peur de briser le silence. 

.   ー Je voudrais te parler d'hier. 

.   ー J'étais allée dans un parc me changer les idées. Je ne suis pas partie loin. 

.   Lorsque Momo se lève pour allumer l'interrupteur, Hanako l'en défend. 

.   ー Je ne veux pas en parler en face à face avec cette lumière. Je ne veux pas non plus regarder l'état de ma chambre. 

.   Le bras de l'adolescente revient le long de son corps. Un silence. Le noir absolu qu'elle décide d'éclater en mille morceaux en ouvrant la porte. Un filet de lumière s'invite dans l'obscurité de la pièce, se faufile et s'installe au pied de Hanako, comme pour réclamer quelque caresses. 

.   ー Viens-tu Hanako ? Allons brûler tes dessins.

.   Un mouvement dans le noir. Hanako se redresse d'une position assise, vêtant son éternel sweat dont la capuche noire aide ses mèches à cacher son visage. 

.   Les feuilles se froissent lorsqu'elles les rassemblent dans leurs bras, seul bruit sourd affrontant le silence. Aucune d'elles ne souhaite parler, voire chuchoter. Momo essaie de respirer le moins fort possible, la tension reste palpable malgré l'infime soulagement qu'elle a ressenti lors de la réaction de sa jumelle. Un faux pas et Hanako pourrait sombrer dans une humeur encore plus exécrable, l'héroïne ne le souhaite pas. 

.   ー Attends, on a oublié le briquet, fait remarquer Hanako. 

.   ー N'allons-nous pas les brûler dans la cheminée ? 

.   ー J'ai envie de changer un peu. Quoique...

.   Les poumons de Momo se compressent. 

.   ー Et si on les enterrait pour une fois ? Sous le vieil arbre du jardin. 

.   L'étau la relâche, ses épaules s'affaissent.  

.   ー Allons-y. Je vais demander à Hiro de nous ouvrir la cabane pour chercher une pelle. 

.   Pour la première fois depuis leur conversation, le visage pâle de sa sœur se relève et se dévoile sous la capuche et les mèches, ses yeux brillant d'une lueur qui pourrait être effrayante si Momo ne savait pas y décoder de la gratitude.  

.  Tout au long de l'enterrement, personne ne voulait parler. Même les oiseaux se sont tus, comme pour assister à la scène. Hanako prend du recul pour analyser son travail terminé, pelle sur l'épaule, mains et vêtements maculés de terre. 

.   ー Je suis certaine que ces sentiments referont surface sans même qu'on aille les déterrer, chuchote Hanako pour elle-même.  

.   Le silence commence à se serrer plus fort autour de sa poitrine. Elle ressent la nécessité de se confier à sa jumelle. Momo ne sait pas exprimer ses sentiments sur papier, elle a besoin d'en parler. De lui parler. 

.   ー Hanako, j'ai envie de tout vider. 

.   Hanako se tourne maintenant face à elle, ses sourcils froncés sous ses lunettes rondes. 

.   ー Tu as besoin de médicament ? Ou tu veux vomir maintenant ? 

.   ー Non, ce n'est pas ça. Je me dois d'en parler, répète-elle. 

.   Le vent est chargé de mots inaudibles. Parfois, il y a des moments où les mots ne peuvent rien exprimer ni même définir. La pression sur son torse remonte, enlaçant ses griffes autour sa gorge. Ses jambes tremblent, manquent de la faire tomber par la moindre bourrasque. Malgré cette anxiété, l'héroïne prend une grande goulée d'air avant de commencer. 

.   ー Je suis désolée pour hier. Non, "désolée" n'est pas un mot assez fort pour t'expliquer à quel point je veux m'excuser. J'aurais dû les arrêter, leurs dire que ce n'est pas le moment idéal pour te parler de ça...

.   ー Ne t'inquiète pas, je t'ai pardonné il y a longtemps déjà. Et puis, tu as déjà fait beaucoup pour moi et je t'en suis reconnaissante. L'erreur est humaine. 

.   L'enveloppe d'excuse se froisse dans sa main. Le papier la brûle, mais elle se retient de la lui donner car avant ça, Momo voudrait d'abord lui ouvrir son cœur, sans retenue. 

.   Alors elle pleure, sans cacher ses larmes. La culpabilité, la peur, la frustration et la tristesse se mêlent à ce désordre aqueux sortant enfin au grand jour, coulant le long de ses joues. Hanako la laisse faire, et elle l'en remercie. Les extérioriser fait vraiment du bien.

.   ー Je n'ai pas su te protéger, Hanako... 

.   ー Tu parles comme si tu étais la grande sœur. Quoique, nous n'avons pas à respecter ces rôles de grande et petite sœur, créons les nôtres. Protégeons-nous l'une l'autre. 

.   Des bras l'enlacent en une étreinte maladroite mais réconfortante. Le cœur plus léger, la héroïne rend ce geste affectif.  

.   ー Tu as fait du bon travail, merci pour ton dévouement. Il faudrait que je te rende la pareille un de ces jours. Repose-toi en attendant. 

.   Momo ne sait pas depuis combien de temps elle est restée dans les bras de sa jumelle à pleurer : en plus de ses sentiments trop longtemps enfouies, les paroles de sa sœur l'ont émues. Le temps parait les favoriser en s'arrêtant pour elles. 

.   ー Si je n'étais pas aussi faible, rien de tout cela ne serait arrivé, soupire Hanako. 

.   C'est faux, complètement faux ! Ses mains se resserrent plus fort autour des épaules de la personne la plus forte qui soit. 

.   ー Si tu étais réellement faible, tu n'aurais pas décidé de changer et tu serais encore pliée devant les attentes que les autres ont de toi ! 

.   Sa voix tremble encore un peu, mais elle n'ébranle en rien la puissance des mots. Hanako lève ses sourcils, sa bouche entrouverte certainement sous la surprise. Elle continue puisque le silence le lui permet : 

.   ー Si tu étais réellement faible, tu obéirais à Père sans donner ton avis sur la question, serais potentiellement en filière super-héroïque avec moi ! Si tu étais réellement faible, tu n'aurais pas eu ce déclic qui t'as poussé à te reprendre en main, et tu serais restée une personne malheureuse et manipulée... Si tu étais réellement faible, tu n'aurais pas choisi de chercher ta véritable nature. 

.   Hanako ne répond pas, mais c'est pas grave. La brune sait plus que quiconque qu'elle écoute attentivement. Peut-être même que cet événement restera gravé en elle tellement sa mémoire est puissante. Elle se demande même si cette dernière n'en est pas une eidétique*.  

 .   ー Certes oui, peut-être que si tu n'étais pas aussi faible, ce ne serait pas arrivé, mais sache que tu as traversé un long chemin depuis l'année dernière pour en arriver ici. L'évolution ne se fait pas du jour au lendemain, il faut apprendre à se pardonner et ne pas s'impatienter. Ne saute pas d'étapes. 

.   ー Je le sais. 

.   ー Alors tu devrais aussi savoir que je t'admire Hanako, énormément. 

.   Tout est sorti. Un poids s'est retiré de ses épaules, mais elle appréhende maintenant la réaction de sa grande sœur. 

.   ー Ta force mentale est immense, tu grandis tellement vite... Je ne sais pas exprimer mes émotions comme toi, ou même choisir les bons mots, mais je ferai de mon mieux à t'aider à te trouver, grande sœur ! 

.   Une main caresse ses cheveux lâchés. Les gestes d'affection de Hanako sont si rares que Momo a appris à les savourer. 

.   ー Tu sais très bien que je n'aime pas cette hiérarchie de sœurs, ça n'a aucun sens. (elle s'arrête un moment puis reprend) Et puis, j'ai appris une chose hier avec ce débat sur les relations : je m'exprime plus fluidement qu'avant, et je cède moins rapidement à la pression. Je commence à m'améliorer. Avant, je ne sais même pas si j'oserais défendre mes idées, hésite Hanako. 

.   ー Bien joué Hanako, je suis fière de toi, sourit-elle. 

.   ー Je me suis aussi rendue compte que je me découvre plus facilement en vivant des situations un peu intenses. L'idéal serait de comparer mes réactions avant et maintenant avec des circonstances similaires pour mieux constater une évolution. 

.   ー Je suis vraiment ravie que tu te rendes compte que tu suis ta propre voie, et non celle que l'on te trace. Peut-être que tu ne sais pas parfaitement qui tu es, mais ça ne m'empêche ni de t'aimer ni de te connaître partiellement. 

.   ー Avoir des pièces qui me manquent me frustre, mais je compte prendre soin de celles que j'ai. Je pourrais déclarer que je me connais tout de même malgré le fait qu'elles constituent sûrement une infime partie de ma personnalité. Ce n'est pas totalement un mensonge. 

.   ー Je suis d'accord avec toi Hanako. Mais sois patiente envers toi-même, accorde-toi des moments de vulnérabilité. 

.   ー Je me suis déjà lâchée sur mes dernières pages de cahier, je vais mieux maintenant. 

.   ー Tout va bien alors, conclut la plus jeune. 

.   L'étreinte se fait plus forte, Hanako répond par un "oui" léger, presque un chuchotement. 

.   Les rayons du soleil abattent leurs éclats et chaleur sur le vieil arbre de leur enfance, dessinant par terre et sur elles des tâches d'ombre et de lumière. La poitrine de Hanako se gonfle et se vide d'air, sans un bruit. À côté, Momo peut sentir son cœur battre en harmonie avec celle de sa sœur. 

.   ー Au fait, mes amis t'ont rédigé une lettre d'excuse pour le conflit d'hier. La voici. 

.   Les doigts de la concernée prennent l'enveloppe avec délicatesse, pour la glisser dans la poche ventrale de son habit sombre. 

.   ー Dis-leur que je les pardonne. Mais cela ne veut pas signifier que je tolérerai une chose identique la prochaine fois. Je la lirai ce soir au plus tard, merci. 

.   La pelle jetée il y a quelques minutes par terre reprend sa position sur l'épaule de Hanako, ensuite toutes deux font demi-tour poser l'outil dans la cabane avant de rentrer à la maison. 

.   ー Au passage Momo, j'ai un prototype d'une potentielle paire de chaussures pouvant augmenter la vitesse de son porteur. Tu veux l'examiner ? 

.   L'intéressée accepte avec joie. Devant la porte du jardin, leur majordome s'agite comme s'il cherchait quelque chose qui lui aurait échappé. Hanako prend alors la parole, lui demandant pourquoi pareille réaction. 

.   ー Madame Hanako, Madame Momo ! Il se fait déjà une heure que vous étiez parties, je me faisais du souci, explique-t-il en reprenant une posture droite et professionnelle. 

.   ー Tout se déroule à merveille Hiro, répond Momo. Nous pouvons dire que tout se passe pour le mieux à présent. 

.  Devant la mine perdue de leur employé, les deux sœurs rient et l'invitent à rentrer dans la demeure en leur compagnie. 

.   Elles ont retrouvé leur complicité. 

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*Voici un extrait d'un article sur la mémoire eidéitique, le lien pour la version entière est dans la section commentaire de cette phrase. 

Bonsoir ! 

.   Voici le chapitre 19 qui n'a rien à voir avec l'ancienne version, et je préfère celle-ci de loin ! 

.  Je sais que ce chapitre de transition n'est pas super intéressant, mais j'ai fait de mon mieux pour vous ajouter des informations sur Hanako et Momo pour lui donner de "l'utilité" si je peux me le permettre. 

.   Étant donné la fin des vacances qui arrive à grand pas, je ne sais pas si je serai aussi active qu'avant, mais je veux essayer de terminer la réécriture entière de cette fanfiction, j'espère que ce n'est pas trop ambitieux (moins de deux semaines encore no-). Quelques chapitres ont été préparés au préalable, il faut juste que je ne procrastine pas trop et que je me motive à réécrire tout sur ordinateur T^T 

.   Sur ce, je vous souhaite une bonne soirée et prenez soin de vous ! 

.   Yamako-chan 



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