.  Je regarde distraitement par la vitre du train qui nous ramène à la maison. Écouteurs aux oreilles, le monde autour de moi ne m'affecte plus. Depuis que ce Kirishima est venu rendre mes dessins, je me demande ce qu'il en a fait entre-temps avec, quand je les ai cru perdus. Les a-t-il montrés à d'autres personnes ? Les a-t-il photographiés ? Comment connaît-il Momo ? Son uniforme montrait qu'il était en filière super-héroïque aussi, ils devraient être dans la même classe. Et d'ailleurs, pourquoi tenait-il à me revoir personnellement ? Ce n'est pas comme si j'étudiais dans un autre pays ou quoi.

.  Je sens une main sur la mienne, c'est celle de Momo. Je retire une des oreillettes de mes écouteurs pour l'écouter parler par dessus la voix de V*.
.  ー Comment vas-tu Hanako ? Tu me sembles plus pensive que d'habitude, s'inquiète t-elle.
.  ー Tout va bien.
.   Non bordel non.
.  Ma question brûle ma gorge mais je crains qu'elle me demande d'en dire plus. C'est vrai que parler de quelqu'un n'est pas chose courante chez moi. Je me lance tout de même, abandonnant un moment ma musique.
.  ー Connais-tu un certain...

.  ー Kirishima Eijirō ? termine-t-elle. Bien sûr, il est dans ma classe. Durant l'interclasse, je l'ai surpris avec tes dessins. Lorsque je lui ai demandé pourquoi, il a voulu savoir où te trouver : je suppose qu'il t'a rendu tes travaux, car dès qu'il est rentré, ses cheveux étaient parsemés de pétales de fleurs et il ne tenait plus les feuilles en main.
.

  ー Ton esprit de déduction est de plus en plus affûté, j'admets.
.  Je pivote mon regard vers la fenêtre, accoudée à son rebord. Alors Kirishima est dans sa classe ? Mais bien sûr ! Momo me raconte souvent ses journées, mais il n'est apparu que très rarement dans ses récits, d'où ce sentiment de déjà vu. Maintenant, ça me paraît presque logique : il était à proximité de Momo lorsque Present MIC a annoncé la classe A. Je suis bête.

.  ー Puis-je savoir ce qu'il s'est passé au moment où il a rendu tes biens ? m'interroge ma jumelle, curieuse.
.  Je soupire un instant avant de satisfaire sa curiosité. Je lui raconte la totalité, depuis notre premier dialogue. Ce n'est pas spécialement intéressant, mais les yeux de Momo scintillent à chaque mots que je prononce. Dès que mon rapport est terminé, je lui demande pourquoi un tel bonheur face à une histoire aussi fade.
.  ー Ne saisis-tu pas ? s'étonne-t-elle. Vous deviendrez sûrement amis ! Je trouve que c'est un bon début pour une histoire qui va durer.
.   Vraiment Momo ? Vouloir donner un pain à une personne random serait vraiment le début idéal d'une amitié qui va durer ?
.  Momo est tellement pure. Elle ne mérite pas de vivre dans ce monde empli de criminalité. De plus, qui lui dit que "l'histoire va durer" ? Y-a-t-il plus ennuyant qu'une histoire racontant une tranche de vie ? On dirait un scénario digne d'un shōjo.
.  C'est pour cette raison que je préfère les Shōnen : beaucoup plus d'actions, avec des aventures toutes aussi différentes les unes que les autres. Même si les dessins sont tous magnifiques, quel que soit le genre.

.  ー Au fait, Hanako, Kirishima n'est-il pas ton ami ? Sans lui, tu ne récupérerais pas tes feuilles, tu ne penses pas ? 
.  ー Pas de sitôt. Mais je lui ai donné un de mes dessins. Alors on est quittes, n'est-ce pas ?
.  Le train ouvre ses portes tandis que la voix mécanique annonce la gare où nous descendons. Déconcertée, Momo me fixe avec les sourcils légèrement arqués.
.  ー Tu lui as offert un dessin ? D'habitude, lorsqu'on s'approche un peu trop près de toi, tu hérisses l'échine ! plaisante-t-elle.
.  ー Je me suis retenue cette fois.
.  ー Offrir un dessin à quelqu'un est une première.
.  ー Objection. Je te fais même cadeaux de dessins colorés.
.  Momo laisse échapper un petit rire. Je ne comprends pas ce qu'il y a de drôle, je dis juste la vérité.

.  Nous marchons jusqu'à la maison, sans rien à nous dire. Ma jumelle tranche le silence.
.  ー Ne te rends-tu pas compte ? On dirait que tu n'acceptes pas le fait que tu le considères comme un ami.
.  Je me tourne vers elle. Ami ? Avec une personne avec qui je n'ai parlé qu'à peine quelques minutes ?
.  ー C'est faux. Je lui ai donné un dessin car il me semblait qu'il en voulait un. Il finira pas sa misérable vie dans une poubelle de cette façon : cela joint l'utile à l'agréable. Et puis, la joie qui se lisait sur le visage de cet idiot en valait la peine. J'espère juste qu'il...
.  La pure ne me laisse pas abattre mon dernier argument. Au lieu de cela, un sourire "tu-vois-je-te-l'avais-dit" orne une nouvelle fois son visage. Je remets mes lunettes sur mon nez et lui adresse un regard interrogateur.
.  ー Tu viens de te trahir, Hanako. Tu viens d'avouer que tu aimes le sourire de Kirishima.

.  ー J'aime faire sourire, point. Préfères-tu que je te dise que j'aime le voir pleurer ?
.

  ー Pleurer de joie, tout à fait. Une fois, un de tes dessins m'a arraché une larme. Tes croquis sont très expressifs. Dommage que tu ne les montres pas, et que tu laisses en noir et blanc.
.  Je mets fin à la discussion en accélérant le pas, au point de faire de la marche rapide. Mains dans la poche de mon sweat à capuche noir, j'atteins le domicile et ne tarde pas à m'enfermer dans ma chambre.

.  Soulagée, je dépose mon sac de cours au pied de mon bureau et commence à esquisser quelques croquis insignifiants. Les paroles de ma sœur me reviennent en mémoire.

"On dirait que tu n'acceptes pas le fait que tu le considères comme un ami."

.  Alors, admettons que je refuse de le croire, ça veut signifier que Kirishima est mon ami ? Je repense à son sourire éclatant et ses yeux se plissant sous l'excès de joie, juste pour un putain de dessin. Offrir quelque chose à une personne peut la rendre à ce point heureuse ? Même un truc sans importance ?
.  Alors que je relève mon crayon pour voir le rendu, je me rends compte que le garçon sous mes yeux est Kirishima, souriant de ses dents de requin.
.  Foutue mémoire photographique.
.  Arrachant la page de mon carnet, je la chiffonne avant qu'elle atterrisse dans la corbeille avec ses congénères. Je soupire un grand coup et laisse mon dos rencontrer le dossier de la chaise de bureau. Mon avant-bras noircit ma vue.
.  C'est bon. Je le connais à peine qu'il me tape sur le système. Et ma mémoire qui n'arrange rien...

***

.  Rentré de chez lui, Eijirō se dirige vers sa chambre sans oublier d'annoncer sa venue à ses parents. Escaladant les escaliers sans aucune motivation, il pousse un soupir de joie à la vue de son lit, où il se vautre dessus sans retenue. Enfin un peu de repos !
.  Il se tourne sur le dos et contemple le mur du plafond. À cause de ce dessin, il n'a pas bien écouté en cours, et Denki non plus. Il faut qu'il demande à Katsuki ses notes pour le contrôle de demain. Il attrape son téléphone de son sac puis envoie un message à "Pétard Mouillé". Dès que le message est envoyé, il écarte ses bras ainsi que ses jambes dans son lit, imitant une étoile de mer sur une plage. Il ferme ses paupières, les événements de cette journée surgissant dans sa tête.

.  La sœur de Momo est intriguante, elle n'a pas le même caractère doux de sa sœur. Cependant, cette froideur ne lui déplaît pas. Au contraire, cela le motive à mieux chercher à la connaître. Peut-être qu'au fond se terre une personne formidable ! Sinon, pourquoi avoir donné ce dessin ?
.  Le dessin ! Il est sûrement froissé à cause du voyage !
.  Il se précipite sur son sac pour en extirper une feuille A5 de son cahier de japonais. Ouf, il est un peu corné, mais rien de grave à signaler. De sa main libre, il prend soin de lisser la feuille sans laisser d'empreintes de doigts. Il la regarde longuement, remerciant en silence l'artiste. En pensant à elle, il se souvient de ses dernières paroles.

"Je ne ferai juste pas d'effort pour te chercher."

.  Eijirō sent les muscles de ses joues se contracter en une grimace. C'est vrai que ce n'est pas très gentil, mais ce n'a pas d'importance. Sous un autre angle, elle n'a ni dit ni un oui ni un non direct, pas vrai ? Donc cela veut dire que le lycéen peut lui rendre visite quand il le veut ! Il se sent sourire à cette idée farfelue. Sous l'excitation, il se lève de son lit brusquement et descend quelques marches.
.  ー Maman ? demande le rouquin. Est-ce que tu peux me préparer un bentō pour demain s'il te plait ?
.  Sa mère lui répond d'une affirmation, et retourne à ses occupations. Tandis que l'adolescent regagne sa place, toujours le papier en main, il réfléchit à un moyen de ne pas perdre ni abîmer le précieux. Il balaie la pièce du regard, inspectant chaque recoins de la chambre où accrocher le cadeau.
.  Il trouve la place parfaite : une petite place entre un poster de Crimson Riot et un programme de musculation. Il farfouille dans les tiroirs de son bureau et en tire du scotch. Ses dents en déchirent deux morceaux et il l'applique sur le dessin afin de le coller au mur, juste au dessus de la table. Comme cela, quand il relèvera la tête, il pourrait l'admirer.
.  Satisfait du résultat et soudainement motivé, Eijirō se lance dans l'accomplissement de ses devoirs.

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*Kim Taehyung, plus connu sous le nom de scène V, est un chanteur. C'est un membre du boyband sud-coréen BTS. Voici sa tête (vous pouvez en faire un fond d'écran 😂)

Ohayō 😄

Voilà pour le chapitre 5 !! J'espère qu'il vous plaît ^^
Je serai occupée prochainement, du coup je sais pas si je vais tenir la régularité des chapitres 😅 (je vais essayer de tenir bon pour vous mdrr)
D'ailleurs, j'ai modifié la manière de présenter, qu'en pensez-vous ? 🤔🤔
Ah oui, voici un petit croquis d' Hanako, par contre je suis pas la meilleure en dessin 😅😅

Je vous remercie encore pour vos commentaires, votes et vues 🙏🙏🙏
Sur ce, à plus tard pour le prochain chapitre 👋👋👋
Psykokwak04