Chapitre 12 | Nuit blanche.

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Quand Stefano disait qu'il ne rigolait pas, c'était qu'il était très sérieux. Quelques jours après s'être incrusté chez Matthew pour qu'il lève sa si terrible punition, il s'était à nouveau rendu chez lui, mais pour une autre raison. Cette fois, il l'avait prévenu, il lui avait dit que ce soir-là, ce serait le bon soir. Le soir pour faire une nuit blanche, évidemment. Même si au début, on l'avait bien sûr regardé de travers et demandé ce que c'était que cette idée.

Il voulait juste reprendre son art, il n'avait pas envie de trouver de moyens qui ne choqueraientt plus les gens, et il ne savait plus quoi faire de ses nuits. À part dormir, évidemment. Mais comme il n'y arrivait de toute façon pas, autant en passer une à.. faire autre chose. À penser à autre chose, hein. Et il savait que Matthew non plus n'arrivait pas à dormir normalement, alors "puisque tu n'arrives pas à dormir, et moi non plus de toute façon" il avait essayé de le convaincre de passer une merveilleuse nuit réveillés.

Il s'ennuyait, et comme Matthew était le responsable de ses affreux malheurs, il allait le forcer à passer une nuit blanche avec lui. Ce n'était pas comme si ça changeait trop de son quotidien, mais dans ce cas autant être deux. Il était sûr que lui non plus, il ne dormait pas la nuit, surtout ces derniers-temps. Et on ne se demandait pas pourquoi.

Alors après un moment où au début, Matthew avait essayé de lui faire comprendre que non, il n'allait pas gâcher le peu d'heures de sommeil qui lui restaient juste pour lui, il avait dû céder. Bon, de toute façon, il ne travaillait pas le lendemain. Alors justement, c'était le moment idéal pour rester là à.. ne rien faire. Mais ça ne semblait pas déranger Stefano, bien au contraire. Lui, ça le faisait rire, comme d'habitude. Au moins, il savait quoi faire cette nuit.

Et il se rendit surtout compte qu'il venait de vouloir passer du temps avec Matthew, intentionnellement. Pendant un court instant, il se demanda pourquoi, mais il n'avait pas le temps de s'attarder là-dessus plus longtemps.

C'était donc comme ça qu'ils se retrouvaient maintenant chez Matthew.. Encore une fois. Ce qui le désespérait encore plus. Déjà que ça faisait quelques jours qu'il n'était pas au meilleur de sa forme.. Mais le fait de voir que visiblement, il existait quand même aux yeux de Stefano, lui fit retrouver un minime espoir. Celui de voir qu'il était important. Ou bien ce n'était pas du tout le cas et il se faisait des films... C'est pour ça qu'il était déprimé, en ce moment. Tout ça le fatiguait.

Et il était pratiquement affalé dans son canapé, encore une fois, alors que Stefano était devant la fenêtre, observant l'extérieur d'un air très attentif. Lui, il n'avait pas l'air fatigué du tout. Il avait juste besoin de compagnie, maintenant qu'il ne pouvait même plus créer. C'était lui qui était fatiguant.

-Tu ne trouves pas que la nuit est inspirante ?

Il allait sérieusement lui parler d'art, et de tout ça, alors qu'il était censé l'oublier l'espace d'une nuit ? Bon, là, il parlait simplement d'un moment précis de la journée, pas de mort et de cadavres.. C'était déjà bien.

Mais là, Matthew le fixa juste de travers, comme toujours.

-Tu ne voudrais pas la représenter, alors ? Ça changerait de.. Enfin tu sais.

Il allait quand même éviter de lui parler de ce qu'il représentait justement, en temps normal. S'il pouvait ne pas parler une seule fois de la mort, ce serait déjà un grand pas.

Et Stefano reprit son air songeur, une main posée sous son menton.

-Mmh.. Représenter des paysages.. Simple mais intéressant...

Il partait presque dans ses propres pensées. Heureusement qu'à la base, il devait justement penser à autre chose que l'art, hein. Mais si là ça parlait de simples paysages, ça devait le faire. Tant que ce n'était pas son art à lui..

Et puis, Matthew se rappela soudainement de quelque chose. Ce n'était pas comme si Stefano n'avait jamais simplement représenté des paysages, puisque..

-Tu l'as déjà fait, non ? Quand tu étais photographe de guerre..

Stefano s'immobilisa soudainement, gardant son regard fixé sur un point au hasard dehors. C'était comme s'il venait de voir un fantôme, ou qu'on venait de lui en parler d'un. Il ne s'était pas attendu à ce qu'on parle de ça. C'était quelque chose qu'il avait presque oublié. À part son accident si important qui en était lié, le reste, ça n'avait plus d'importance. Il avait oublié cette époque de sa vie.

Il passa quelques secondes à essayer de se souvenir des photos qu'il avait pu prendre, avant de soudainement toutes les revoir en tête. Oui.. Il avait pris beaucoup de paysages en photo, mais ceux-là, ils n'avaient rien de beau. Ils étaient différents. Tout était différent.

Puis après un moment de silence, il se retourna vers Matthew, qui lui le regardait toujours fixement depuis avant.

-Il y avait justement la mort, dans la plupart d'entre eux.

Encore une fois, il sourit à la fin de sa phrase, fier d'avoir rappelé ce qui le motivait tant pour son art. Il n'avait pas oublié, et n'oublierait jamais ce qu'il faisait réellement. Alors puisqu'il ne pouvait pas créer, pour l'instant, il pouvait au moins parler de ça. Même si en retour il recevait un énième regard blasé de Matthew, comme là maintenant. Lui, il se demandait encore pourquoi il essayait de changer Stefano. C'était impossible.

Alors à la place, celui-ci s'avança vers le canapé, pour s'asseoir à son tour dessus, à côté de quelqu'un qui le regardait à moitié d'un air méfiant.

-Et pourquoi tu as voulu faire photographe de guerre ? demanda soudainement la voix lasse de Matthew, la tête légèrement inclinée sur le côté.

Il avait à la fois envie de dormir et pas envie, c'était étrange. Sauf que du côté de Stefano, lui perdit tout aussi vite l'air satisfait qu'il pouvait avoir pour laisser place à l'étonnement. Il ne s'attendait pas à cette question, et il ne savait même pas quoi répondre. Pourquoi ? C'était difficile à dire.

-Je.. ne sais pas vraiment. Peut-être que j'avais besoin de fuir. Ou de me sentir libre.

Son regard fuya vers le mur devant lui, prenant un air à la fois mélancolique et rêveur. Il ne savait pas lui-même. Pourquoi la guerre ?

-Tu ne te sentais pas libre avant ?

Matthew fronça presque les sourcils, posant une vraie question. Il voulait savoir. Il voulait connaître plus de choses sur lui, sur sa vie, surtout celle avant la guerre. Avant qu'il ne le rencontre.

-Non.. J'avais l'impression d'être enfermé dans une grande maison, avec tous les différents membres de ma famille.

Là, pour le coup, ça intéressa grandement son interlocuteur. Il venait de lui parler de sa famille, alors que jusqu'à maintenant, il n'avait même jamais prononcé ce mot. C'était comme si elle n'avait jamais existé. Comme s'il n'y en avait pas. Après tout, un individu pareil n'aurait pas pu naître dans une famille, un tel monstre n'aurait pas pu grandir entouré de gens, il avait dû apparaître de nulle part, un jour.

Mais non, et c'était sûrement cette famille qui l'avait rendu comme ça. Enfin, Matthew n'en savait rien pour l'instant, mais il voulait en savoir plus.

-Mais.. Pourquoi tu me poses toutes ces questions, au fait ?

C'était comme si Stefano venait subitement de sortir du mini état d'absence qu'il avait eu. Il venait de revenir à la réalité, et venait donc de se rendre compte qu'il avait dit des choses sur lui. Comment avait-il fait pour ne pas réaliser plus tôt ? Il se sentait bête d'avoir laissé transparaître des failles dans son armure si insensible. Alors qu'il n'y avait rien de grave.

Sauf que du côté de Matthew, il était déçu de cette réaction. Il voulait apprendre plus de choses sur lui, pas perdre de temps avec ces questions inutiles.

-Je n'ai plus le droit de vouloir te connaître ? J'ai juste envie de savoir plus de choses sur ta vie..

Et c'était normal, non ? Entre amis, on se parlait de sa vie. Il n'y avait rien de plus banal. Mais pendant cinq ans, Stefano avait réussi à tout cacher. Il n'avait jamais rien dévoilé. Les autres ne méritaient pas de savoir.

Mais en retour, il fixa juste Matthew d'un air intrigué, lui aussi, comme si ce qu'il avait dit ne faisait pas sens.

-Pourquoi ?

Lui aussi, il posait des questions inutiles. Et il le savait. Il ne comprenait juste pas les.. relations humaines. Il n'était pas du genre très sociable, et on ne se demandait pas pourquoi. Alors évidemment, Matthew le regarda comme s'il lui demandait s'il se fichait de lui. Il avait l'air faussement énervé, en somme.

-Parce que je ne connais presque rien de toi, peut-être ? Tu es trop mystérieux, il faut bien que j'apprenne des choses un jour ou l'autre.

Il était surtout renfermé, une fois qu'il s'agissait de parler de lui et de son passé. Justement parce qu'il n'aimait pas en parler.

-Puis c'est ce que les gens normaux font.. murmura-t-il soudainement, alors qu'ils pensaient tous les deux qu'il avait fini.

Pour le coup, Matthew aurait bien aimé avoir une tasse de café entre les mains, parce qu'en plus de détourner le regard, il aurait pu en prendre une gorgée histoire de se redonner de l'énergie.

Sauf que cette remarque ne passa pas inaperçue, et Stefano pris donc un air indigné, presque scandalisé par ce qu'il avait osé dire.

-Tu insinues que je ne suis pas normal ?

Il faisait exprès d'être étonné, en plus. Évidemment qu'il savait qu'il n'était pas normal.

-Aucun de nous ne l'est, de toute façon, répondit-il immédiatement.

Puisqu'il le pensait, donc ce n'était pas compliqué à dire. Et ce n'était pas entièrement faux non plus.

Et pour cette fois, Stefano ne répondit rien en retour. Il se contenta de hausser les épaules en regardant à nouveau devant lui. Il avait l'air de penser à quelque chose, d'un coup, quelque chose qui faisait même en sorte qu'il ne réponde pas à Matthew, c'était étonnant. Et lui, il n'eut pas à s'inquiéter longtemps du silence qui arrivait, puisqu'il allait rapidement être brisé.

-Comment tu as réussi à savoir que c'était moi ?

Encore une fois, on le fixa avec étonnement. Matthew ne s'était pas attendu à ce qu'il remette ce sujet-là sur le tapis. Même si c'était vrai qu'il y avaient encore plein de questions sans réponses. Alors pour essayer de répondre, il décida d'être prudent.

-Je ne sais pas. J'ai commencé à avoir des doutes un jour. Et j'avais l'impression de voir de plus en plus d'indices qui confirmaient que c'était bien toi...

-C'était donc si évident ? riposta directement Stefano.

Cette question le laissa un moment réfléchir, alors qu'il ne savait toujours pas ce qu'il devrait répondre.

-Pas pour tout le monde, visiblement.. Mais moi, j'avais peut-être plus de chances de comprendre, puisque..

Il hésita un moment, pas sûr des mots à employer.

-J'étais la personne la plus proche de toi.

Et il l'était toujours, d'ailleurs. Même encore plus qu'avant. Il avait droit à un privilège pour pouvoir être aussi proche de lui. Il était unique. Mais il ne savait toujours pas si c'était une bonne chose ou non.

-C'est vrai que je n'étais pas très prudent, sur ce coup-là..

C'était la seule chose qu'il en tirait, visiblement. Le fait qu'il se soit un peu plus relâché avec Matthew dans les parages. Il y avait de quoi risquer de faire des erreurs, de dire des choses qu'il ne fallait pas. D'éveiller les soupçons.. Et s'il avait eu le culot nécessaire, il l'aurait encore blâmé de l'avoir freiné dans ses escapades nocturnes où il cherchait ses "modèles". Mais il savait qu'il était le seul coupable, et c'était étonnant. Il s'en fichait juste.

-Allez, maintenant tu peux avouer que je te dérangeais.

Quand il lui dit ça, il n'était même pas en colère, ou autre, il voulait juste savoir si ç'avait vraiment été le cas pour Stefano. Mais lui, il lui adressa juste un regard qui semblait lui demander s'il était sérieux.

-Au début, rappela-t-il avec un air presque vexé. Mais je ne sais pas pourquoi, je t'ai quand même laissé en vie.

Ça faisait toujours grandement plaisir à Matthew de lui rappeler qu'il avait failli mourir. Des mains de celui qu'il considérait comme son ami, en plus.. Et que lui, il en parle toujours avec une facilité déconcertante, comme si c'était normal de tuer des gens quand ils nous embêtent.

-Tu ne pouvais juste plus te passer de moi, plaisanta-t-il alors sans pourtant aucune once de joie sur le visage, ayant reporté son regard en face, lui aussi.

Il était si unique, après tout, si incroyable, comment Stefano aurait fait pour vivre sans lui, franchement ? Vraiment, la perle rare. Et au fond, il trouvait ça vraiment drôle de dire ça alors qu'il ne ressentait pas un gramme d'empathie pour lui-même à l'heure actuelle. Il se détestait toujours autant.

-Dans un sens.. Ça doit pourtant être vrai.

Mais ça, il ne s'y attendait pas du tout. Alors il reporta son attention sur Stefano les yeux presque écarquillés, se demandant s'il avait bien entendu. Il venait de confirmer ce qu'il avait dit, là, non ? Il avait avoué que c'était vrai ? Et, au fond, ce n'était pas si étonnant qu'il dise ça, puisque il était littéralement allé chez Matthew juste parce qu'il s'ennuyait et qu'il ne voulait pas passer une énième nuit seul.

Sauf que sa joie était quand même de courte durée, puisqu'il se demanda s'il n'avait pas juste dit ça pour lui faire plaisir. Même si ça ne semblait pas être le cas. Stefano avait l'air sincère. Mais bon, il ne savait jamais avec un.. psychopathe. En fait, il ne savait plus quoi penser.

-Tu dois me trouver ridicule..

Alors il avait simplement répondu ça, incapable de croire qu'il possédait des qualités. Même si pour Stefano, il ne savait toujours pas lesquelles c'étaient. Il ne pouvait pas être autre chose que pathétique. Parfois, il aurait mieux aimé se faire tuer par lui que de passer son temps à essayer de savoir pourquoi il était toujours là. Mais cette pensée était tout de même réservée à ses soirs les plus sombres.

En plus, il semblait être le seul à penser ça de lui-même, puisque Stefano, lui, il ne comprenait pas.

-Pourquoi je penserais ça ?

Alors que pour Matthew, ça semblait évident.

-Je suis tellement faible que je ne suis même pas capable de te dénoncer... Et après je continue de te parler alors que je sais très bien que tu pourrais me tuer à tout moment..

À l'entente de ces mots, Stefano se tourna vers lui, l'air vraiment étonné. Sérieusement ? Il pensait encore qu'il allait se débarrasser de lui, un jour, alors qu'il lui avait clairement dit que ce ne serait pas le cas ? Il n'avait pas été clair, quand il lui avait dit, ce jour-là ? Il avait oublié ? Il en était presque abasourdi.

-Matthew, qu'est-ce que je t'ai dit, la dernière fois ? Et toutes les autres fois ?

Il le regardait sérieusement, avec un air presque sévère. Comme s'il réprimandait son enfant pour une bêtise qu'il aurait pu faire.

-Je sais. Mais je ne comprends toujours pas.

-Qu'est-ce que tu ne comprends pas ?

Oh, trop de choses. Et s'il avait dû lui en faire la liste, ça aurait bien continué tout le long de la nuit.

-Pourquoi tu restes à mes côtés, déjà.

Il aurait aussi voulu dire "et moi, pourquoi je reste à tes côtés", mais il n'en avait même plus la force. Il était juste fatigué, ne faisant plus aucun effort pour parler sans montrer ouvertement qu'il était las. De tout.

-Et pourquoi c'est le seul psychopathe de la ville qui m'a trouvé important.

Pourquoi parmi toutes les personnes qu'il aurait pu rencontrer, il avait dû tomber sur la seule atteinte de gros problèmes psychologiques ? Et qui continuait lui aussi de le fréquenter pour des raisons toujours inconnues. Et surtout, surtout, pourquoi avait-il dû commencer à ressentir des sentiments plus forts envers lui ? Il n'avait toujours pas oublié. C'était sûrement pour ça qu'il s'obstinait à vouloir l'aider. Comme il le pouvait..

-Je te l'avais déjà aussi dit, mais c'est parce que tu es comme moi.

Il n'avait d'ailleurs jamais rien dit de plus là-dessus, il n'avait pas développé. Alors peut-être qu'enfin, c'était l'occasion.

-Tu n'es pas comme les autres gens que j'ai pu rencontrer. Toi, tu.. as vu des choses. Tu as vécu des choses, les mêmes que moi.

Matthew le regardait d'un air de plus en plus intrigué. Stefano commençait enfin à lui expliquer des choses, au moins un minimum.

-Qu'est-ce que tu as vécu, alors ?

Sans s'en rendre compte, il s'était légèrement penché vers lui, alors qu'il lui avait posé cette question dont il en connaissait quelques réponses. Il savait, mais pas tout. Et pendant un moment, Stefano ne répondit rien, il planta juste en retour son regard dans celui de Matthew. Qu'est-ce qu'il devait répondre ?

Après un moment de silence où il avait presque oublié qu'il devait dire quelque chose, il le cassa enfin, une nouvelle fois.

-D'affreuses nuits blanches.

Mais ce n'était pas dans le but de sérieusement lui répondre. Non, au passage, il décida aussi de casser toute l'ambiance sérieuse qu'il avait pu y avoir depuis avant. Et Matthew aurait dû s'en douter, il aurait dû savoir qu'il n'aurait pas sa réponse. C'était déjà un miracle qu'il ait eu toutes les autres avant. Quand les discussions prenaient une allure trop sincère et sérieuse, Stefano préférait éviter tout ça et changer de sujet. Il ne voulait pas parler de ce qu'il ressentait, de ce qu'il pensait. C'était lui qui se trouvait faible.

Mais malgré tout, c'était une occasion pour Matthew de lui rappeler qui avait provoqué cette nuit blanche-là. Pour le coup, il ne pouvait s'en prendre qu'à lui-même. En plus que c'était un pauvre innocent qui devait en subir les conséquences. Il n'avait rien demandé, lui, mais il aurait tout de même menti en disant qu'il n'appréciait pas la compagnie de Stefano.

-Mes problèmes sont causés par les tiens, alors. Tu es juste égoïste.

Et cette remarque, elle n'avait pas pour but de le vexer ou de l'insulter, non, elle avait l'intention d'être drôle, pour essayer de dédramatiser la situation. S'il ne voulait autant pas en parler, très bien, il rentrerait dans son jeu, comme si de rien n'était. Et ç'avait semblé marcher, puisque Stefano lâcha vraiment un mini rire, toujours sans le quitter des yeux.

-Autant ne pas être seul à les affronter, justement.

Puis Matthew ferma les yeux en soupirant, comme si tout ça était très compliqué, alors que non. Pour une fois, il exagérait juste.

-C'est ce que je disais, tu as juste peur de te retrouver seul.

Honnêtement, Stefano avait oublié ça. Ça devait dater d'une conversation qu'ils avaient eu il y a au moins une semaine. Mais ça l'amusa tout de même.

-Je préfère surtout entraîner des gens avec moi dans ma chute.

Égoïste, donc. Mais bon, il n'allait pas relever ça une seconde fois. Au fond, peut-être que ça avait du sens. Que Stefano était vraiment effrayé à l'idée de se retrouver seul, d'être le seul à sombrer, à être anormal. Et qu'il essayait donc maintenant de trouver des gens qui pourraient rester avec lui, qui ne l'abandonneraient pas. Il avait peut-être peur de la solitude, lui aussi.

Et plus il y réfléchissait, moins Matthew savait s'il devait trouver ça glauque ou triste. Il y avaient les deux à la fois. Mais lui, évidemment, il trouvait plus ça triste. Évidemment qu'il aurait voulu l'aider, lui montrer qu'il n'était pas seul. Qu'il aurait juste vu.. un enfant perdu qui avait besoin d'aide. Mais qui n'en avait jamais reçu.

En effet, ils étaient pareils. Sous bien des aspects, mais ça, il commençait à peine à le comprendre, petit à petit. Ça prendrait juste du temps.

-Reste loin de moi, alors. Je ne suis pas fan des chutes, on finit toujours par se blesser.

Cette phrase qu'il dit en plaisantant pouvait prendre plein de significations différentes. Il y avaient plein de façons différentes de tomber, mais encore une fois, il n'allait pas faire la liste. Il laisserait Stefano réfléchir à ça tout seul.

-Je crains que ce ne soit trop tard.

Et il avait raison en plus. Il le savait. Matthew le savait. Tout le monde le savait. C'était déjà trop tard, la machine avait été enclenchée dès le début, ce qui lui donna l'impression d'être pris au piège. Maintenant, ils pouvaient juste essayer de lutter.. Mais contre quoi, ça, ils n'arrivaient toujours pas à savoir. Ils savaient juste qu'il y avait quelque chose d'étrange, quelque chose qui leur faisait dire et faire n'importe quoi, à tous les deux. Quelque chose qui les rendait faibles.

Ils savaient qu'ils n'étaient pas comme ça avant. Ils ne comprenaient juste pas. Et au lieu de simplement se dire tout ce qu'ils pouvaient bien ressentir, que ce soit logique ou non, simple ou non, ils préféraient ne rien avouer. Éviter le sujet, comme d'habitude. C'était tellement plus facile que de devoir parler. S'expliquer était trop fatiguant, et venant de deux êtres déjà assez fatigués comme ça, il ne fallait pas beaucoup en demander.

Alors pour l'instant, Matthew voulait juste essayer de ne pas tomber avec Stefano, de réussir à s'échapper. Il ne voulait pas sombrer avec lui dans cette spirale infernale qu'il craignait, qu'il pensait connaître, celle qui avait été créée dès leur rencontre. Il n'était pas sûr de laquelle c'était, mais il en avait peur, car il savait qu'il n'en sortirait pas totalement indemne. Il voulait s'en sortir, se sauver, et le sauver lui. Il n'y avait aucune raison d'être blessé, pourtant. Même si pour l'instant, il ne trouvait pas d'échappatoire.

Et pour tenter d'oublier ça, le temps d'un instant, il changea donc de sujet et lui demanda de raconter ses "si affreuses" nuits blanches.

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