[ 𝟏.𝟏𝟎 ] Swan Lake

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𝘼𝙫𝙚𝙘 𝙪𝙣𝙚 𝙝𝙖𝙗𝙞𝙡𝙚 𝙚𝙩 𝙥𝙖𝙧𝙛𝙖𝙞𝙩𝙚 𝙙𝙚𝙭𝙩é𝙧𝙞𝙩é, 𝙆𝙖𝙩𝙚 𝙘𝙧𝙤𝙘𝙝𝙚𝙩𝙖 𝙡𝙖 𝙨𝙚𝙧𝙧𝙪𝙧𝙚 𝙙𝙚 𝙡𝙖 𝙥𝙤𝙧𝙩𝙚 𝙖𝙫𝙚𝙘 𝙡𝙖 𝙥𝙤𝙞𝙣𝙩𝙚 𝙙𝙚 𝙨𝙖 𝙜𝙧𝙞𝙛𝙛𝙚. L'entrée arrière de la maison s'ouvrait sur une cuisine plongée dans une semi-pénombre, tout comme le reste des autres pièces. Lentement, elle avança en tendant ses oreilles aiguisées. Le faible bruit d'une télévision lui indiqua qu'elle n'était pas seule, mais cette information ne contrariait en aucun cas ses plans.

     La présence de Chris était un détail.

      S'infiltrer chez lui était une partie de jeu et elle gagnait toujours.

  Glissant ses doigts fins le long des murs, elle longea un couloir dont la première embrasure, située sur la gauche, débouchait sur un salon. Elle s'y appuya un instant afin d'observer son frère, qui, adossé à un fauteuil, ne pouvait deviner qu'elle se tenait actuellement debout à seulement quelques mètres derrière lui.

       Un rictus amusé s'étira sur les lèvres de Kate. Bien qu'il était un chasseur doué, Chris demeurait un simple être humain, doté de sens faibles et limités et elle adorait l'avantage qu'elle avait sur lui.

      Elle progressa au fond du couloir avant de s'arrêter au niveau de deux escaliers, le premier conduisant à l'étage supérieur et le second menant à une porte qu'elle devinait être celle du sous-sol. Elle pénétra à l'intérieur en évitant de faire grincer les marches en bois sous les semelles de ses bottes noires. La cave était étonnamment grande et plus aménagée qu'elle ne l'avait imaginée. Il semblait visiblement se plaire dans ce nouveau cadre.

    Après avoir enjambé une dizaine de boîtes en carton vides, Kate découvrit une épaisse porte coulissante dissimulée sous l'escalier en colimaçon et protégée par un système de sécurité renforcée.

    — Bingo, murmura-t-elle avec un sourire en coin.

Quelques secondes seulement lui suffirent pour déverrouiller l'entrée de l'armurerie. Un attirail de guerre haut de gamme s'offrait à elle, lui procurant presque l'embarras du choix, cependant, elle ne s'émerveillait plus à la vue des armements, comme cela avait pu être le cas durant ses plus jeunes années. Ce n'étaient plus des outils de destruction infligeant la peur et la terreur, mais des jouets futiles qui produisaient de l'adrénaline à ceux qui la convoitaient. Au fil du temps, elle avait réalisé que la véritable menace ne provenait pas de l'arme elle-même, mais de ce qu'elle pouvait renfermer.

      La mallette de munitions était soigneusement rangée sous une commode sur laquelle étaient entassés des caissons métalliques. À l'intérieur se trouvaient différentes gammes de pointes de flèches toutefois moins surprenantes que la collection de balles en argent qui les complétaient.

Kate saisit l'une d'elles et l'inspecta minutieusement. Le sceau familial était gravé à sa surface, vestige d'un pacte générationnel avec lequel elle avait irréversiblement rompu serment la nuit où elle avait laissé sa rage s'embraser.

     Désormais, il n'était plus question de protéger les plus vulnérables, mais de contrer tous  dangers  voués  à exterminer sa nouvelle  espèce. Celle qui lui permettait d'explorer pleinement sa nature indomptable et d'établir ses propres règles sans la moindre restriction. 

    Kate reprit le chemin des escaliers, emportant avec elle l'ensemble des munitions. Elle se dirigeait déjà vers la porte de sortie quand elle contempla alors l'idée de prolonger un peu sa balade. Sa curiosité la guida au premier étage et elle fut frappée de constater son étrange similarité avec l'ancienne maison de son frère.  Le passé semblait mystérieusement se mêler au présent, si bien qu'elle était presque sûre de pouvoir deviner où se trouvait la chambre d'ami. Cette pensée quitta son esprit lorsqu'elle entra dans une pièce qui déclencha en elle de vifs souvenirs.

     Elle se voyait frapper à une porte tous les matins, s'asseoir sur un lit pour prodiguer des conseils et se pencher au-dessus d'un bureau pour lire l'écran de l'ordinateur d'une adolescente de dix-sept ans.

       Tout dans l'atmosphère lui semblait familier. À quelques éléments près.

       Allison était morte et sa chambre n'était pas peinte en bleu.

   Le regard de Kate s'attarda sur une pile de vêtements négligemment posés sur une chaise sur laquelle trônait un manuel scolaire où était inscrit sur une étiquette un nom qui n'allait cesser de l'obséder.

     Percevant du  mouvement provenant de l'extérieur, elle s'approcha de la fenêtre et écarta légèrement les rideaux afin d'obtenir une meilleure visibilité. Elle reconnut la silhouette de Chris qui émergeait de la porte d'entrée pour accueillir un visiteur qui venait de garer son véhicule dans le garage. C'était un jeune homme aux cheveux châtains. Kate fit appel à son ouïe  surdéveloppée pour capter leur discussion.

     — Comment s'est passé le match de crosse ? demanda Chris.

   — Les Cyclones ont perdu à cause du nouveau joueur, répondit le garçon. Je suis pas sûr qu'il ait sa place sur le terrain. On aurait dit un boxeur sous stéroïdes.

    — C'est lui qui te remplace ?

    — Je n'ai pas été remplacé. Je ne fais plus partie de l'équipe.

    — Tu le pourrais si tu le voulais.

  — Justement, je n'en ai plus envie. On n'est pas revenus pour avoir une vie normale, mais pour régler cette histoire avec ta sœur, je me trompe ?

      Kate fronça les sourcils.

   — Je ne veux pas que tu mettes ta vie entre parenthèses, Isaac. Tu as le droit de reprendre tes marques là où tu les as laissées. C'est aussi pour ça qu'on est revenus. Je ne veux pas que tu en doutes.

  Chris posa une main chaleureuse sur l'épaule de l'adolescent et ils rentrèrent  à l'intérieur. Au même instant, Kate se glissa hors de la fenêtre avant de se percher sur la branche d'un arbre à proximité.  Tapie derrière le feuillage, elle scrutait Isaac, les poings et la mâchoire serrés.

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𝙋𝙡𝙖𝙮𝙡𝙞𝙨𝙩

Marina Kaye - Double Life

Wiz Khalifa - See You Again

Piotr Tchaïkovsky - Swan Lake

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Alors que les rayons du soleil s'infiltraient à travers sa chambre, Stiles, étendu sur son lit, dormait encore. En pivotant sur le côté droit pour changer de position, il sentit une masse allongée près de lui.

   — Malia, marmonna-t-il, la bouche pâteuse et les yeux encore clos.

    Il lui enroula un bras autour de la taille afin qu'ils se blottissent l'un contre l'autre.

  — Je croyais qu'on avait dit que tu devais venir moins souvent, dit-il en frottant affectueusement son front contre le sien. Tu sais, au moins une fois par semaine...

      Il se blottit davantage.

  — Ou deux, ajouta-t-il en trouvant sa position de plus en plus confortable.

       Il lui renifla les cheveux.

  — C'est un nouveau parfum ?

   Il se pencha pour lui déposer un baiser. Lorsque ses lèvres entrèrent en contact avec une matière peluchonneuse, il écarquilla subitement les yeux et constata qu'une énorme peluche à l'effigie d'un chimpanzé au sourire béat lui faisait face. Un cri d'horreur s'échappa de sa gorge, tandis qu'il se jeta à l'autre extrémité de la chambre pour s'éloigner du lit. Il tomba au sol dans un bruyant vacarme, renversant au passage son fauteuil de bureau. Un rire espiègle et strident résonna derrière lui.

  — Des fois je me demande pourquoi je m'obstine à te ridiculiser, s'esclaffa Aibee. Tu le fais déjà très bien tout seul.

  — Mais t'es complètement malade ! s'exclama-t-il, la main posée sur sa poitrine haletante.

   — Un petit sourire ? dit-elle en brandissant soudain une caméra. Je t'aurais bien demandé quel angle fait ressortir ton meilleur profil, mais ça se voit que tu n'en as pas.

  — D'où est-ce que tu sors ce truc ? demanda Stiles en pointant la peluche d'un doigt tremblant. I-il me regardait avec ses yeux démoniaques !

  — Ça n'avait pas l'air de te déranger tant que ça quand tu l'embrassais passionnément. D'ailleurs, tu pourrais refaire ce truc bizarre que tu faisais avec ta bouche ?

   — Arrête ça ! rétorqua-t-il en se relevant.

  Il réajusta son tee-shirt, puis tenta de subtiliser la caméra des mains d'Aibee qui continuait de le filmer en zoomant son visage.

     — Les singes m'effraient et tu le sais très bien !

— C'est ta réflexion dans le miroir qui devrait plutôt t'effrayer, pouffa-t-elle. T'es au courant que tu baves dans ton sommeil ?

  — Donne-moi cette caméra ! gronda-t-il en commençant à perdre patience.

— Tu disais des choses aussi, ajouta-t-elle en l'esquivant. Je suis pas sûre que ta petite amie aimerait apprendre que tu rêves d'une autre fille.

      Stiles fronça les sourcils.

  — C'est assez scandaleux, si tu veux mon avis, commenta Aibee sur un ton moralisateur.

     — Éteins cette caméra !

     — Comme tu veux, répliqua-t-elle en haussant les épaules.

   Elle éteignit l'appareil et le glissa entre les bras du chimpanzé avant de s'en aller.

     — Aibee ! hurla Stiles. Ne me laisse pas seul avec ce truc !

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Braeden souleva peu à peu ses paupières. Une couverture recouvrait son corps à partir des épaules. En balayant ses alentours du regard, elle comprit qu'elle se trouvait dans un lit qui n'était pas le sien, dans une chambre qui n'était pas la sienne. La pièce, disposant de trois larges fenêtres dénuées de rideaux, était entièrement baignée dans la lueur du jour. Sur une chaise à proximité reposait sa fidèle veste en cuir et elle aperçut ses bottes mises en évidence sur le parquet.

Confuse, elle se redressa avant de sentir une présence à quelques mètres d'elle. Ses yeux rencontrèrent alors ceux de Derek, silencieusement adossé à un mur, les bras croisés contre son torse. À côté de lui se trouvait un escalier en colimaçon qui conduisait au rez-de-chaussée de son loft.

— Le petit-déjeuner était en option ? lança-t-elle en abaissant la couverture.

Il sourit.

— Depuis combien de temps est-ce que je suis ici ?

— Deux jours, mais je me doute que tu ne t'en souviens pas. Tu as dormi la majeure partie du temps.

Braeden grimaça légèrement en tâtant son abdomen.

— J'ai dû te recoudre, expliqua Derek. Ça a laissé une cicatrice.

Elle souleva son débardeur fraîchement nettoyé et découvrit une profonde entaille qui traversait son bas-ventre.

— Elles sont sacrées, dit-elle en la traçant du doigt.

Derek continua de l'observer avec une certaine curiosité. Elle ramena sa chevelure ondulée sur le côté afin de révéler trois longues balafres sur sa nuque.

— Chaque cicatrice est le rappel qu'on ne perd jamais ce qui nous forge. C'est ancré dans notre identité.

Elle s'interrompit.

— Tes griffes, tes crocs, la couleur de tes yeux... Toutes ces choses sont éphémères. Elles révèlent ta vraie nature, mais elles ne définissent pas la personne que tu es. Derek Hale sans ses pouvoirs est toujours Derek Hale.

Il était surpris de l'entendre parler de lui comme ça. Il avait longtemps hésité à lui faire confiance, mais il devait admettre qu'elle était capable de lire en lui d'une manière qui lui plaisait.

— Tu saignes, remarqua-t-il en sortant de ses pensées.

Elle baissa les yeux vers son ventre et poussa un faible juron en constatant un point rouge s'étendre en maculant son débardeur. Elle le retira, tandis que Derek s'assit près d'elle afin d'inspecter sa plaie encore sensible.

— Je dois refaire ton pansement, dit-il.

— Et ensuite j'aurais enfin droit à un petit-déjeuner ? demanda-t-elle avec taquinerie.

Il lâcha un petit rire en secouant la tête.

— Œuf brouillés ou à la coque ?

— Je suis pas difficile.

Ils se fixèrent quelques instants lorsqu'une voix capta leur attention.

— Derek-

Teresa s'immobilisa en les voyant, son regard fixé sur le décolleté plongeant que laissait entrevoir le soutien-gorge de Braeden.

— Oh.

Elle déglutit, sa gêne grandissant au fil des secondes.

— Pardon, je... Je suis vraiment désolée. Je... Je ne voulais pas empiéter sur votre intimité...

Elle se racla la gorge et se précipita dans les escaliers.

— Teresa !

— Vas-y, je m'en occupe, assura Braeden en faisant pression sur sa blessure.

Derek se leva du lit et quitta la chambre d'un pas pressé.

— Teresa, attends ! s'écria-t-il avant de l'apercevoir debout devant la porte d'entrée, la main posée sur la poignée.

Elle se retourna en évitant de le regarder.

— J'ai entendu le bruit de la télé et je me suis permis d'entrer, dit-elle. Je suis vraiment désolée, je ne voulais pas...

— Qu'est-ce qui se passe ?

Elle secoua la tête.

— Je ne savais pas à qui parler... C'est stupide.

— Teresa, insista Derek en s'approchant d'elle.

Elle se décida à croiser son regard à la fois soucieux et intrigué. Il remarqua des cernes sur son visage, encore plus creusées que la dernière fois.

— Derek, j'ai l'impression de perdre la tête. Je n'arrive plus à différencier la réalité de la fiction, le vrai du faux... Je ne sais plus si je dois croire ce que je pense ou alors ce que je vois... Je veux que ça s'arrête.

Elle s'interrompit.

— J'ai vu ce garçon, étendu dans son propre sang...

Sa voix se mit à trembler.

— J'ai cru que si j'attendais assez longtemps, il allait disparaître, mais j'ai vu le sang sur mes chaussures...

Elle marqua une pause pour se ressaisir.

— Ce n'est que lorsque les policiers sont arrivés que j'ai réalisé que je les avaient appelés.

Derek continuait de la fixer, surpris par ces révélations.

— Ils m'ont posé des questions, mais je n'ai pas pu expliquer grand chose, ajouta-t-elle. Je savais juste que je devais corriger sa copie avant la semaine prochaine, pas le regarder baigner dans son propre sang.

Elle renifla.

— J'ai passé toute la nuit à l'hôpital avec ses parents pour avoir des nouvelles sur son état et...

Elle se raidit subitement.

— Oh mon dieu...

Derek fronça les sourcils.

— Augmente le volume, dit-elle.

— Quoi ?

— La télévision.

Derek s'exécuta. Une journaliste s'adressait à la caméra avec un air grave.

« 𝘙𝘦𝘷𝘦𝘯𝘰𝘯𝘴 𝘴𝘶𝘳 𝘤𝘦𝘵𝘵𝘦 𝘵𝘳𝘪𝘴𝘵𝘦 𝘯𝘰𝘶𝘷𝘦𝘭𝘭𝘦 𝘥𝘢𝘯𝘴 𝘭'𝘢𝘤𝘵𝘶𝘢𝘭𝘪𝘵é. 𝘜𝘯 𝘫𝘦𝘶𝘯𝘦 𝘩𝘰𝘮𝘮𝘦 𝘥𝘦 𝘴𝘦𝘪𝘻𝘦 𝘢𝘯𝘴, 𝘡𝘢𝘤 𝘍𝘦𝘭𝘭𝘦𝘳, 𝘢 𝘴𝘶𝘤𝘤𝘰𝘮𝘣é 𝘤𝘦 𝘮𝘢𝘵𝘪𝘯 à 𝘶𝘯𝘦 𝘢𝘵𝘵𝘢𝘲𝘶𝘦 𝘮𝘰𝘳𝘵𝘦𝘭𝘭𝘦 𝘲𝘶𝘪 𝘴𝘦 𝘴𝘦𝘳𝘢𝘪𝘵 𝘥é𝘳𝘰𝘶𝘭é𝘦 𝘩𝘪𝘦𝘳 𝘴𝘰𝘪𝘳 𝘥𝘢𝘯𝘴 𝘴𝘰𝘯 𝘱𝘳𝘰𝘱𝘳𝘦 𝘭𝘺𝘤é𝘦, 𝘉𝘦𝘢𝘤𝘰𝘯 𝘏𝘪𝘭𝘭𝘴 𝘏𝘪𝘨𝘩 𝘚𝘤𝘩𝘰𝘰𝘭. »

Une photo de la victime apparut dans un cadre à droite de l'écran. Le teint de Teresa devint livide.

« 𝘓𝘦𝘴 𝘤𝘪𝘳𝘤𝘰𝘯𝘴𝘵𝘢𝘯𝘤𝘦𝘴 𝘥𝘦 𝘤𝘦 𝘥𝘳𝘢𝘮𝘦 𝘥𝘦𝘮𝘦𝘶𝘳𝘦𝘯𝘵 𝘦𝘯𝘤𝘰𝘳𝘦 𝘪𝘯𝘤𝘰𝘯𝘯𝘶𝘦𝘴, 𝘮𝘢𝘪𝘴 𝘪𝘭 𝘯𝘰𝘶𝘴 𝘢 é𝘵é 𝘴𝘪𝘨𝘯𝘢𝘭é 𝘲𝘶'𝘶𝘯𝘦 é𝘲𝘶𝘪𝘱𝘦 𝘥'𝘪𝘯𝘷𝘦𝘴𝘵𝘪𝘨𝘢𝘵𝘪𝘰𝘯 𝘴𝘦 𝘵𝘳𝘰𝘶𝘷𝘦 𝘢𝘤𝘵𝘶𝘦𝘭𝘭𝘦𝘮𝘦𝘯𝘵 𝘴𝘶𝘳 𝘭𝘦𝘴 𝘭𝘪𝘦𝘶𝘹 𝘥𝘶 𝘤𝘳𝘪𝘮𝘦. 𝘓𝘦 𝘱𝘳𝘪𝘯𝘤𝘪𝘱𝘢𝘭, 𝘔𝘳. 𝘉𝘶𝘳𝘬𝘦, 𝘴𝘦 𝘥𝘪𝘵 𝘥é𝘷𝘢𝘴𝘵é 𝘦𝘵 𝘫𝘰𝘪𝘯𝘵 𝘴𝘢 𝘱𝘦𝘪𝘯𝘦 à 𝘤𝘦𝘭𝘭𝘦 𝘥𝘦𝘴 𝘱𝘦𝘳𝘴𝘰𝘯𝘯𝘦𝘴 𝘢𝘧𝘧𝘦𝘤𝘵é𝘦𝘴 𝘱𝘢𝘳 𝘤𝘦𝘵𝘵𝘦 𝘵𝘳𝘢𝘨é𝘥𝘪𝘦. 𝘕𝘰𝘶𝘴 𝘳𝘢𝘱𝘱𝘦𝘭𝘰𝘯𝘴 𝘲𝘶𝘦 𝘱𝘳è𝘴 𝘥'𝘶𝘯𝘦 𝘥𝘪𝘻𝘢𝘪𝘯𝘦 𝘥'𝘩𝘰𝘮𝘪𝘤𝘪𝘥𝘦𝘴 𝘰𝘯𝘵 é𝘵é 𝘳𝘦𝘭𝘦𝘷é𝘴 𝘥𝘢𝘯𝘴 𝘭𝘢 𝘷𝘪𝘭𝘭𝘦 𝘤𝘦 𝘮𝘰𝘪𝘴-𝘤𝘪. 𝘓𝘢 𝘱𝘪𝘴𝘵𝘦 𝘥'𝘶𝘯 𝘵𝘶𝘦𝘶𝘳 𝘦𝘯 𝘴é𝘳𝘪𝘦 𝘦𝘴𝘵 𝘦𝘯𝘷𝘪𝘴𝘢𝘨é𝘦 𝘦𝘵 𝘭𝘢 𝘮𝘪𝘴𝘦 𝘦𝘯 𝘱𝘭𝘢𝘤𝘦 𝘥'𝘶𝘯 𝘤𝘰𝘶𝘷𝘳𝘦-𝘧𝘦𝘶 𝘱𝘰𝘶𝘳𝘳𝘢𝘪𝘵 𝘦𝘯𝘵𝘳𝘦𝘳 𝘦𝘯 𝘷𝘪𝘨𝘶𝘦𝘶𝘳 𝘥𝘢𝘯𝘴 𝘭𝘦𝘴 𝘫𝘰𝘶𝘳𝘴 à 𝘷𝘦𝘯𝘪𝘳. 𝘕𝘰𝘶𝘴 𝘳𝘦𝘤𝘰𝘮𝘮𝘢𝘯𝘥𝘰𝘯𝘴 𝘥𝘰𝘯𝘤 à 𝘭𝘢 𝘱𝘰𝘱𝘶𝘭𝘢𝘵𝘪𝘰𝘯 𝘥𝘦 𝘧𝘢𝘪𝘳𝘦 𝘱𝘳𝘦𝘶𝘷𝘦 𝘥𝘦 𝘭𝘢 𝘱𝘭𝘶𝘴 𝘨𝘳𝘢𝘯𝘥𝘦 𝘱𝘳𝘶𝘥𝘦𝘯𝘤𝘦. »

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Melissa s'affairait dans sa cuisine quand elle entendit quelqu'un frapper à la porte. Rafael se trouvait sur le porche. Elle le regarda avec une mine agacée.

— Bonjour, Melissa, dit-il.

— Tu ne penses jamais à passer un coup de fil avant de passer ? lança-t-elle.

— Si, seulement je me dis que tu ne vas sûrement pas prendre mon appel.

— Et tu as tout à fait raison, répondit-elle en le laissant entrer à l'intérieur de la maison.

Elle lui tourna le dos et retourna dans la cuisine. Il la suivit, les mains enfouies dans les poches de son tailleur.

— Je viens voir Scott.

— Il est au premier. Il se prépare pour aller au lycée.

— J'ai pensé que je pourrais le déposer ce matin, déclara Rafael.

Melissa arqua un sourcil, tandis qu'elle rinçait une assiette.

— Il a une moto, répliqua-t-elle.

— Je sais. C'est juste que le périmètre va être bondé à cause de l'enquête et je veux m'assurer qu'il soit en sécurité.

Melissa ferma le robinet et lui fit face en laissant entendre un petit ricanement teinté de mépris.

— Je crois que Scott n'a pas besoin qu'on se charge de sa sécurité et encore moins de cette manière, rétorqua-t-elle avec verve. Il est bien bien moins vulnérable que tu ne le penses, mais ça tu l'aurais remarqué si tu avais pris le temps de réellement le connaître.

Rafael avala difficilement sa salive.

— J'ai beaucoup hésité, mais j'étais d'accord pour que tu recolles les morceaux avec lui, ajouta-t-elle. Pas parce que j'espérais que tu aurais changé, mais parce que même après toutes ces années, Scott méritait toujours d'avoir un père dans sa vie.

Il soutenait douloureusement son regard qui devenait de plus en plus insoutenable.

— Seulement, je n'ai pas l'impression que tu essayes vraiment.

Elle lâcha un soupir.

— Il va te falloir plus que des virées en voiture pour recoller les morceaux.

— Je suis aussi venu recoller les morceaux entre nous deux, avoua-t-il fébrilement.

Il tenta de déceler une émotion dans ses yeux, mais il n'y vit rien. Elle demeurait complètement impassible devant lui.

— Vérifier les gouttières est une chose, dit-elle d'un ton sec. Pour le reste, fixe-toi des objectifs réalisables.

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— Tout commence avec les Walcott, déclara Stiles en pointant des photos éparpillées sur le bureau de Scott.

Sur l'une d'elles, on pouvait apercevoir les quatre membres d'une famille.

— Tués à la hache, sauf le plus jeune des deux fils.

— Sean, se rappela Scott.

Stiles mit en évidence de nouvelles photos prises sur la scène du crime.

— Des cadavres dissimulés dans leur chambre froide en état de pétrification. Les Walcott n'avaient aucun lien avec eux.

— Mais ils restent les premiers suspects.

Stiles acquiesça. Scott désigna un autre cliché. Il s'agissait du portrait d'une jeune fille.

— Carrie Hudson, dit-il. Morte par étranglement.

— Et tentative de noyade, ajouta Stiles.

Il pointa du doigt une énième photo sur laquelle se trouvait un adolescent.

— Zac Feller, indiqua-t-il. Je l'ai croisé hier soir après le match en le bousculant par accident pour me rendre aux toilettes. Il a été poignardé une heure plus tard avec un objet tranchant au niveau du cou.

— C'est le deuxième élève du lycée à se faire attaquer, souligna Scott. Tu penses que ça pourrait être une piste ?

— Une piste assez solide pour qu'on écarte l'hypothèse de la coïncidence. Dans une petite ville comme la nôtre, il n'y a plus beaucoup de doutes à avoir sur le fait que toutes ces morts sont liées entre elles. Tout semble prémédité. Le mode opératoire est le même. La victime est dans une situation vulnérable, seule, déboussolée ou en totale confiance et c'est à ce moment que le tueur frappe. La majorité des meurtres sont pensés et réfléchis à l'avance et vu les très faibles indices que j'ai réussi à trouver dans la base de données de la police au sujet de toutes ces affaires, on a à faire à quelqu'un d'extrêmement organisé qui possède probablement beaucoup d'expérience.

Stiles marqua une pause, toujours en pleine réflexion.

— Mais je ne crois pas que ce soit une personne qui cherche complètement à rester dans l'ombre.

— Qu'est-ce que tu veux dire ? demanda Scott, légèrement confus.

Stiles étala de nouvelles photos sur la table. Celles-ci étaient plus sanglantes et explicites.

— Tu vois ces marques circulaires sur la peau semblables à une brûlure ?

Scott hocha la tête.

— Elles ont été relevées sur chacune des victimes, à l'exception des corps dans le sous-sol.

— On dirait des signatures, dit Scott.

— Le tueur veut très clairement faire passer un message et on va devoir le décoder.

— Stiles, je sais toujours pas si c'est une bonne idée qu'on se mêle de tout ça. On arrive à peine à gérer la situation avec Kate et Liam. Je me dis qu'on devrait peut-être laisser la police faire son travail pour une fois et rester loin des ennuis.

— Je vois ça plutôt comme une sorte d'aide bénévole, certes non sollicitée, mais nécessaire.

Scott secoua la tête.

— Tiens, rappelle-toi de ce type qui partait sans payer au centre commercial et que j'ai fait arrêter en lui parlant de ma supposée rencontre avec un alien pour lui faire perdre du temps, répliqua Stiles fièrement.

— C'était le propriétaire et il avait porté plainte pour diffamation et demandé une ordonnance restrictive.

— Et le mec qui piratait tous les ordinateurs le soir d'Halloween pour installer des jumpscares et que j'ai localisé en retrouvant son adresse IP sur le Dark Web ?

— C'était un coup marketing lancé par Google pour promouvoir Scream 4 et le mec en question était un acteur qui avait porté plainte pour tentative d'atteinte à la vie privée.

Stiles se mordit les lèvres, pensif.

— On a quand même contribué à retrouver le corps de la sœur de Derek, soutint-il avec obstination.

— Je te rappelle que je me suis fait mordre par un loup-garou parce qu'on est partis à sa recherche au milieu de la forêt, rétorqua Scott.

— Et c'est justement ce qui t'a permis de détecter l'endroit où elle était enterrée !

Scott souffla d'exaspération.

— Tu comptes pas lâcher l'affaire, pas vrai ?

— Tu vois ? dit Stiles en lui tapotant l'épaule. C'est pour ça que tu es mon meilleur ami, tu me connais si bien.

Il lui lança un clin d'œil.

— Vire tes trucs de mon bureau, lâcha Scott.

— Tout de suite, répondit Stiles en rangeant l'intégralité du dossier hacké à l'intérieur de son sac-à-dos.

Scott s'empara du blouson noir en jean posé sur le bord de son lit et l'enfila.

— Au fait, j'ai rien trouvé sur ce Gary Sanders, informa Stiles.

Rafael McCall, parvenu à l'étage, s'immobilisa au même instant à quelques pas de la porte de la chambre de son fils, à demi ouverte. Il tendit l'oreille.

— Il est originaire de Boston et diplômé en médecine, mais s'est reconverti quelques temps en tant que coach sportif avant de devenir officiellement chirurgien. Célibataire, membre d'une association de protection de l'environnement, donneur universel, non-fumeur, aucun casier... Le citoyen exemplaire par définition.

— C'est impossible d'être aussi parfait.

— Je crois que la seule chose qui te dérange vraiment c'est qu'il sorte avec ta mère.

— Ils ne sortent pas ensemble, protesta Scott en grinçant des dents. Ils se connaissent à peine. Ma mère ne laisserait jamais n'importe qui entrer dans sa vie. Depuis que mon père est parti...

Il ne termina pas sa phrase et Rafael sentit un vif élancement lui tordre l'estomac, causé par le poids du regret d'un passé qu'il ne pourrait jamais changer.

— Je ne veux pas qu'elle souffre, tu comprends ? reprit Scott.  Je ferai tout pour la protéger.

Rafael attendit qu'ils abordent un autre sujet, puis toqua afin de faire remarquer sa présence.

— Bonjour, Scott, lança-t-il en tentant d'emprunter une allure plus ou moins décontractée.

— On se voit en cours, dit Stiles avant de quitter la pièce tout en prenant soin de ne lui accorder aucune attention.

Scott n'avait jamais semblé soupçonner le dédain de son ami à l'égard de son père, du moins pas plus qu'il avait identifié celui de son père à l'égard du shérif.

— Papa ? Tu ne travailles pas aujourd'hui ?

— Si, seulement, je...

Il repensa aux paroles de Melissa.

— Je voulais te dire que tu as été incroyable hier. Ça te va bien d'être capitaine.

— Co-capitaine, précisa Scott.

— Je suis très fier de toi, dit Mr. McCall. Je veux que tu le saches.

Scott le regarda, interloqué. Jamais son père ne lui avait semblé aussi sincère.

— Merci, répondit-il.

Rafael prit le casque de moto de son fils sur une étagère et le lui tendit.

— Je voulais conduire une moto quand j'étais plus jeune, confia-t-il.

— Qu'est-ce qui t'en a empêché ?

—  Je n'ai jamais osé prendre de risques.

Scott saisit le casque. Mr. McCall s'apprêtait à quitter la pièce.

— Papa ?

Rafael s'arrêta dans l'encadrement de la porte.

— Il n'est jamais trop tard pour commencer, dit Scott.

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Assise sur le canapé du salon, Teresa fixait l'écran éteint de la télévision, murée dans un silence indéchiffrable. Derek s'installa à ses côtés.

— Dis-moi à quoi tu penses.

— Je croyais vraiment qu'il allait s'en sortir, dit-elle d'une voix faible.

— Ils vont retrouver qui a fait ça.

Elle secoua la tête.

— Pas qui, mais quoi, répliqua-t-elle.

Il fronça les sourcils.

— J'ai vu la brutalité qu'il a subi, ajouta-t-elle. C'était cruel, sauvage, bestial...

— Qu'est-ce que tu sous-entends ? demanda-t-il.

— Je crois que tu le sais très bien.

Le visage de Derek se durcit.

— Derek, réfléchis. Un tueur en série ? C'est d'un prédateur dont il est question.

— Tu veux dire un loup-garou.

— Très exactement, acquiesça Teresa. À partir des connaissances dont je dispose maintenant, je ne pense pas m'avancer en supposant que la plupart des meurtres qui surviennent dans cette ville ne sont pas causés par des êtres humains.

— Les loups-garous ne sont pas programmés pour être des tueurs, rétorqua Derek, irrité par ses insinuations.

— Tu en es réellement sûr ?

Leurs yeux se croisèrent et une certaine tension parcourut la pièce.

— Nous ne sommes pas des monstres, insista Derek avec fermeté.

— Ce n'est pas ce que j'ai dit.

— Mais c'est ce que tu penses.

Teresa garda le silence et ils continuèrent de se défier du regard.

— Tu penses que je suis une menace, hein ? cracha-t-il avec aigreur.

Elle fut surprise par son ton.

— Tu crois que je me réveille le matin avec du sang sur les mains ? Que j'égorge tout ce qui bouge à la tombée de la nuit ? C'est comme ça que tu me vois ?

Elle déglutit, consciente de l'avoir blessé.

— Derek, tu-

— Laura ne te faisait pas confiance à ce sujet et elle avait raison, dit-il. Tu ne vaux pas mieux que Kate.

Au bord des larmes, Teresa se leva du canapé et prit la direction de la porte d'entrée. Derek soupira et se prit la tête entre les mains, réalisant qu'il était allé trop loin.

— J'aurais aimé dire que je n'ai rien entendu de cette conversation, mais ce n'est pas le cas, lança Braeden en descendant les escaliers.

Elle avait revêtu sa veste et enfilé ses bottes.

— Tu vas reprendre les recherches ? demanda-t-il pour esquiver sa remarque.

— J'apprécie les congés uniquement quand je suis payée, répondit-elle en quittant le loft.

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

— Liam, je vois pas pourquoi tu préfères te terrer chez toi au lieu de venir au lycée, dit Mason en laissant un message sur le répondeur de ce dernier.

Il descendit du bus et se dirigea vers les escaliers menant à l'entrée principale de l'établissement.

— J'ai vu un film comme ça la semaine dernière. Le personnage principal est devenu tellement sensible à la lumière du soleil qu'il s'est transformé en Cyclope et à la fin-

La ligne se coupa et il grogna avant de recomposer le numéro de la messagerie vocale.

— Tu seras bien obligé de décrocher ton téléphone à un moment ou à un autre ! s'exclama-t-il, exaspéré. Tu crois que j'ai pas remarqué que tu étais en ligne sur Facebook il y a deux minutes ?

La ligne se coupa à nouveau.

— Écoute, tu n'as pas de quoi t'inquiéter, je t'assure que tout le monde a déjà oublié le match.

Un groupe d'élèves passa devant lui en brandissant une silhouette en carton de grandeur nature représentant Liam, criblée de fléchettes. Il s'immobilisa.

— Tu as déjà envisagé les cours à domicile ?

Il rangea son portable dans sa poche. Au même instant, Aibee le rejoignit en haut des marches.

    — Hey, je t'ai pris un Golden Fusion en passant à Bake & Squeeze, dit-il en lui donnant un boba. Raisin, banane et poire.

    — Tu sais que je préfère celui à la fraise.

    — Tu sais ce qu'on dit ? Que c'est l'intention qui compte.

    — Qu'est-ce qui t'empêchait de mettre plus de fraise dans ton intention ?

  — L'expression cinglante qui s'affiche sur ton visage et qui me rappelle à chaque fois celle de Sarah Connor dans Terminator 2, la taquina-t-il. Pourquoi est-ce que tu as mis ces lunettes ?

   Aibee portait une paire de Ray-Ban pour se protéger des flashs des appareils photos. Mason remarqua la foule de journalistes attroupée le long des trottoirs.

— J'ai toujours su que la presse ne pouvait pas se passer de moi, déclara-t-elle.

— Ils ne sont pas là pour toi, répliqua-t-il.

— Aibee Stilinski ! s'écria un reporter en se postant devant elle tout en agitant un micro dans sa main. Pouvez-vous m'accorder une interview ?

— Je pourrais jouer mon propre rôle quand on réalisera un biopic sur ta vie ? demanda Mason, ahuri. Je peux tout faire, à part les cascades.

   Un sourire vaniteux apparut sur les lèvres d'Aibee et elle se tourna vers le reporter.

    — Peut-être une autre fois, répondit-elle en lui donnant le boba.

   Il en aspira une gorgée.

    — Pas mal, dit-il avant de s'éloigner.

    — Tu me dois cinq dollars, dit Mason.

    Aibee lui donna les Ray-Ban.

   — Ça fera l'affaire, ajouta Mason, la bouche grande ouverte.

      Des véhicules de patrouille se garèrent sur le parking.

— Qu'est-ce que ton père pense de cette affaire ? demanda-t-il. Personnellement, je pense que chaque petite ville a son lot de tragédies, c'est presque infaillible. Woodsboro, Derry, Springwood... Tous ces endroits abritent des déséquilibrés, c'est connu.

  — Je sais pas trop, répondit-elle en haussant les épaules. Je crois qu'ils vont renforcer la sécurité, même si ça m'arrangerait qu'ils décident de fermer l'école définitivement pour construire un centre de spa à la place.

— Tu n'es pas la seule que ça arrangerait, pouffa Mason. Liam a arrêté ses études avant l'heure pour sauver sa réputation.

— S'il cherche à faire parler de lui, c'est clair qu'il n'utilise pas la meilleure méthode, rétorqua Aibee. Il a encore du boulot à faire s'il veut avoir plus de followers que moi. Tiens, d'ailleurs, mon père vient de me suivre sur Instagram. C'est glauque.

— Je sais que comme ça on dirait pas, mais je te jure que Liam est un type cool quand on le connaît bien, quoique je suis plus tout à fait sûr de le connaître ces derniers temps.  Il est si bizarre... Mais dans le sens non péjoratif du terme, tu comprends ?

Distraite par l'apparition de Scott garant sa moto dans le parking, elle ne l'écoutait pas, hypnotisée par la façon dont il retirait son casque et ébouriffait sa chevelure.  Comme à chaque fois, il faisait tourner son monde au ralenti et rien ne pouvait l'extirper de sa rêverie.

À l'exception de la présence de Kira à l'arrière du scooter.

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

Chargés de contrôler l'affluence et la circulation aux abords du lycée, Parrish et son collègue, l'agent Haigh, surveillaient rigoureusement l'ensemble des zones délimitées par les rubans de balisage.

— Excuse-moi, jeune homme ? dit Jordan en s'approchant d'un garçon dont le vélo était cadenassé à un banc disposé au bord de l'allée principale.

Pris au dépourvu, Greenberg se retourna subitement, les yeux écarquillés sous l'épaisse monture de ses lunettes.

— C'est lui que t'appelles jeune homme ? plaisanta Haigh.

Parrish ne releva pas son commentaire, habitué à son goût prononcé pour l'ironie.

— Tu ne peux pas stationner ici, reprit-il.

— Je... Je sais, bafouilla Jeff, intimidé. Ce... ce sont les gens de ma classe. Ils font des canulars...

— Il se trouve qu'on a pas trop le temps pour les farces, petit, déclara Haigh.

Sans prévenir, il empoigna les avant-bras de l'adolescent, puis saisit une paire de menottes de sa ceinture de police avant de les lui enrouler autour des poignets.

— Qu'est-ce que tu fabriques ? s'exclama Parrish. Ce n'est pas la procédure.

—  Ce gamin se moque de nous, ce n'est pas évident ?

Jordan observa Greenberg et décela la détresse dans son regard. Il ne fallait pas plus de preuves pour reconnaître qu'il disait la vérité.

— Relâche-le, ordonna-t-il.  Tout de suite.

— Tu ne vas pas m'apprendre comment je dois faire mon travail, dit Haigh avec fermeté.  Ton nouveau poste  ne te donne pas tous les droits.

Parrish fronça les sourcils, confus par la tournure de leur conversation. Il connaissait le caractère insolent et provocateur qu'Haigh manifestait durant certaines interventions et lui valait régulièrement des avertissements au sein du commissariat. Cependant, il ignorait la rivalité secrète que ce dernier entretenait à son égard depuis qu'il avait dernièrement pris sa place en tant qu'adjoint du shérif.

— On a aucune raison d'arrêter ce garçon, insista-t-il. Laisse-le s'en aller.

— Ou quoi ? rétorqua son collègue. Tu vas me coller un rapport ?

Avec défiance, ils se dévisagèrent, jusqu'à ce qu'Haigh se décide à libérer Jeff qui tremblait de la tête aux pieds.

— C'est ton jour de chance, fiston, lança le policier en tapotant fortement ses maigres épaules. Si tu veux éviter de te faire humilier, mets-toi au sport.

Il s'en alla, bousculant Jordan au passage. Décontenancé, Greenberg les regarda s'éloigner avant de ramasser son sac-à-dos, tombé au sol dans l'agitation. Des rires fusèrent quelques mètres plus loin et une boule se forma dans sa gorge quand il aperçut des doigts pointés dans sa direction. En se baissant afin de tenter une nouvelle combinaison pour déverrouiller le cadenas, il constata que les pneus du vélo étaient dégonflés.

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

— Elles ont toutes été forgées à la main ? interrogea Peter en étudiant soigneusement la pointe de flèche qu'il tenait entre les mains.

   Arpentant le balcon de son loft, il contempla les rayons du soleil se refléter sur la surface argentée.

  — Toutes, sans exception, dit Kate, appuyée contre la rambarde.

  — Combien en as-tu déjà tiré ? demanda-t-il en s'approchant d'elle.

   Elle se retourna et le canon d'un pistolet se posa sur la tempe de Peter.

  — Je préfère les approches moins traditionnelles, répondit-elle.

Il esquissa un sourire, à peine déstabilisé par son geste. Il commençait à se familiariser à sa personnalité furtive.

— C'est un semi-automatique de calibre 50, précisa Kate en pressant davantage l'arme contre son crâne. Le plus puissant qui existe.

  — Pourquoi est-ce que ça m'excite ?  lança Peter.

   Kate abaissa le pistolet, amusée.

  — Chris en a un deuxième, ajouta-t-elle.  Il le garde toujours sur lui.

  — Quelle que soit sa stratégie, il ne tiendra pas longtemps sans munitions.

   Kate se tourna vers la rambarde. Son regard se perdit dans le vide.

  — Il reste tout de même une ombre au tableau, dit-elle.

  —  Laquelle ?

— Un intrus sur mon arbre généalogique.

Peter parut soudainement intrigué.

— J'ai toujours aimé les histoires de famille, commenta-t-il.

  Dans un mouvement vif, Kate tira sur un oiseau perché sur une ligne téléphonique à quelques mètres au-dessus d'eux.

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

Kira marchait dans le couloir en direction de la salle de son premier cours de la journée, lorsqu'elle entra en collision avec quelqu'un, renversant au passage ses livres qui finirent étalés au sol. Elle s'accroupit pour les récupérer et vit les talons d'une paire d'escarpins les piétiner. Elle leva la tête et fit face à Aibee.

— Salut, lança-t-elle chaleureusement après s'être redressée.

Aibee observa sa carte de bibliothèque qui avait atterri entre ses doigts, puis la lui rendit.

— Tu devrais ajouter une photo d'identité, conseilla-t-elle.

— Oh, non, j'ai tendance à préférer rester derrière l'objectif,  expliqua Kira.

— C'est une sage décision.

— Je suis contente que tu ailles mi-

— Depuis combien de temps est-ce que tu sors avec Scott ?

Prise de court, Kira mit de longues secondes avant de réussir à formuler une réponse.

— On n'a pas encore de statut officiel, mais on s'est embrassés plusieurs fois ce mois-ci.

— Ses lèvres sont plutôt salées ou sucrées ?

Kira fronça les sourcils, déroutée.

— Je... Je sais pas, dit Kira qui semblait réfléchir. J'y ai pas fait attention.

— Ça se voit dans la manière dont tu as appliqué ton eye-liner ce matin, rétorqua vivement Aibee en la dévisageant.

Kira rit.

— Tu es drôle, dit-elle en lui souriant.

— Tu connais l'expression, répondit Aibee. Après les rires, viennent les larmes.

— Quoi ?

Aibee s'en alla sans poursuivre la discussion. Au détour du couloir principal, elle ralentit soudainement le pas quand elle remarqua la présence de Scott. Avec une allure aguicheuse et déterminée, elle s'avança soigneusement dans sa direction.

— Scott ! s'écria-t-elle en s'arrêtant devant lui. Quelle coïncidence ! Je cherchais le meilleur élève de cette école et voilà sur qui je tombe !

Elle gloussa en posant un doigt sur son torse. Il lui sourit, amusé.

— Je suis presque sûr que mes bulletins évoquent le contraire, mais c'est gentil, dit-il.

— J'ai adoré te voir jouer hier soir, déclara-t-elle tout en le dévorant du regard. On était obligé de gagner grâce à toi dans l'équipe.

Scott fronça les sourcils.

— On a perdu le match, lui rappela-t-il.

— C'est si humble de ta part, répliqua-t-elle, trop charmée pour l'écouter d'une oreille attentive.

Sa main s'égara sur son épaule dont elle traça délicatement la courbe.

— Tu es tellement fort...

— Scott ? lança le shérif en interrompant ce moment. Est-ce que tu as vu Stiles ?

Ramenée à la réalité, Aibee roula des yeux, irritée.

— Oui, je l'ai croisé il y a un instant, répondit Scott. La zone va rester bouclée pendant encore longtemps ?

Il désigna l'entrée des toilettes des garçons, rendue temporairement interdite d'accès par des bannières adhésives accrochées le long de l'encadrement de la porte. La scène du crime attirait l'intérêt et l'effroi des plus curieux. Chacun voulait pouvoir émettre ses propres théories et résoudre ainsi une partie du mystère.

— On doit effectuer de nouvelles reconstitutions afin de déterminer la validité de nos recherches, informa le shérif.

— Je peux suggérer un suspect ? intervint Aibee. À mon avis, ça pourrait être le concierge. Ça le met en colère quand je colle des strass sur les murs et il passe vraiment beaucoup trop de temps dans le placard à balai.

Ils la fixèrent, déconcertés.

— C'est vrai qu'il y aura un couvre-feu ? demanda Scott.

— Ce serait la meilleure précaution à prendre pour tout le monde, répondit Mr. Stilinski.

Scott laissa Aibee seule avec son père quelques minutes plus tard, à sa plus grande déception.

— Pitié, ne me dis pas que tu comptes garder un œil sur moi jusqu'à la fin des cours, supplia-t-elle.

— Tu préférerais qu'on ait une conversation sur le vandalisme ? demanda-t-il.

— Seulement si elle est plus longue que la durée de mon cours de sociologie.

Noah soupira, excédé par son éternel sens de la répartie.

— File en classe, lui ordonna-t-il.

— Papa, attends ! Ce serait possible que tu vérifies le casier judiciaire de quelqu'un ?

— Uniquement si j'ai des raisons valables de-

— Kira Eiko Yukimura, dit-elle.

Il la regarda s'éloigner, ahuri.

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

Arrivée après la sonnerie, Lydia progressait dans le couloir dénué d'élèves quand elle entendit des bruits inintelligibles provenant d'une salle de classe vide. Intriguée, elle poussa la porte entrouverte et trouva une élève recroquevillée contre le mur, complètement seule. 

Ses longs cheveux bruns bouclés tombaient en cascade sur son visage et sa poitrine, secouée par une respiration haletante, indiquait qu'elle était sujette à une crise de panique.

— Je n'arrive pas à respirer, réussit-elle à articuler d'une voix suffocante.

Lydia se précipita vers elle et se baissa à son niveau.

— Écoute-moi, d'accord ? lui dit-elle. Je veux que tu te concentres sur ce que je dis.

La jeune fille continua d'inspirer  avec difficulté.

— Je m'appelle Lydia Martin.

— Comme... la prof de biologie ?

— Oui, c'est ma mère. Elle est aussi exigeante qu'elle le paraît.

L'élève expira laborieusement. Lydia lui prit la main.

— Des fois, j'ai l'impression que l'unique chose qui nous rapproche est la couleur de nos cheveux. On dit que les facteurs génétiques façonnent la moitié de la personnalité et que certains traits de caractères sont héréditaires, mais il existe toujours des chaînons manquants, un peu comme une musique inachevée...

Sa phrase resta en suspens. Elle sortit de ses pensées lorsqu'elle sentit le corps de la fille se relâcher.

— Je m'appelle Violet, dit-elle en reprenant son souffle.

Elle releva la tête de manière à révéler ses yeux marrons.

Sa vulnérabilité remémora à Lydia toute l'innocence qu'elle avait vu en Carrie et un frisson nostalgique lui parcourut l'échine.

— Merci, ajouta Violet.

— Ça t'arrive souvent ?

—Quelquefois. Quand j'ai du mal à contrôler mon angoisse.

La jeune fille déglutit en frictionnant ses paumes encore moites.

— Tous ces policiers... Ça me rend extrêmement nerveuse.

Elle rabattit quelques mèches de ses cheveux derrière son oreille droite, dévoilant de multiples plaques de boutons rougeâtres sur son cuir chevelu, partiellement dégarni.

Secouée par l'image macabre de sa grand-mère couverte du sang s'écoulant de son crâne perforé, Lydia recula d'effroi avant de tomber à la renverse.

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

Assise au pied du lit métallique d'une chambre étroite et dénuée de fenêtres,  une fillette aux cheveux roux griffonnait sur une feuille de papier à même le sol.

Avec une aquarelle à l'encre noir, elle esquissait l'horizon d'un océan dont les vagues venaient s'échouer sur un récif.

Tu es très douée, commenta une femme qui la regardait, assise sur une chaise en face d'elle.

Elle était également rousse et semblait âgée d'une quarantaine d'années environ. Elle portait une veste à épaulettes et une longue jupe blanche qui lui donnaient l'apparence d'une enseignante sophistiquée.

— Comment est-ce que l'histoire se termine ? demanda la petite fille.

La femme tourna délicatement les pages d'un roman ouvert sur ses genoux.

— À ton avis, Sue ? répondit-elle. Comment est-ce qu'elle se termine ?

— Je veux que la princesse et le prince ne soient pas aussi différents l'un de l'autre.

— Dans ce cas, il n'y aurait plus d'histoire.

L'enfant haussa les épaules.

— Mais elle se finirait bien.

La femme referma l'ouvrage avant de se pencher vers elle.

— Je crois me rappeler que ton personnage préféré est celui de la sorcière, dit-elle. Pourquoi cela ?

— Elle fait peur.

— Et ça ne t'effraie pas ?

— Non. La sorcière est méchante, mais elle aurait pu être gentille et donner la chair de poule.

La femme sembla surprise  par son argumentation.

— C'est vrai, répliqua-t-elle. Il  ne faut pas juger un livre à sa couverture.

— C'est ce que tout le monde fait, rétorqua la fillette en accentuant les traits de son dessin.

Dans un coin du paysage se tenait la silhouette d'un navire à moitié englouti par les flots.

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

— Lydia ! hurla quelqu'un.

Émergeant peu à peu de son état de semi-conscience, cette dernière reconnut la voix de sa mère.

— Ouvre les yeux ! s'écria Natalie, affolée.

Lydia revint vers elle en sursaut. Elle prit une profonde inspiration tandis que ses pupilles s'acclimataient à la lumière ambiante. Sa vision s'aiguisa et elle vit sa mère agenouillée au-dessus d'elle.

— Ma chérie ! s'exclama-t-elle. Tu vas bien ?

Lydia se redressa en acquiesçant.

— Qu'est-ce qui s'est passé ? demanda Mme. Martin.

— Rien.

— Ce n'était pas rien, Lydia. Tu as perdu connaissance. Cette fille m'a prévenu.

Elle désigna Violet, restée en retrait.

— Maman, je vais bien, assura Lydia.

Natalie posa une main sur son front, comme pour vérifier sa température.

—Tu n'es pas en forme, insista-t-elle. Tu vas rentrer à la maison.

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

— La disparité économique existe sous toutes les formes, déclara le coach en s'adressant à sa classe. Prenons le sport.

Il s'empara d'une longue crosse qui trônait sur son bureau et se promena entre les rangs en la brandissant telle une épée.

— Certaines équipes ont de meilleurs équipements.

Il cogna le dossier de la chaise d'un garçon. L'élève eut un soubresaut.

— D'autres, de meilleurs chargés de communication, reprit Finstock en agitant le filet de la crosse entre deux filles qui bavardaient.

Il balaya la salle du regard et s'arrêta devant la table de Stiles, concentré sur la pile de photos volées dans la base de données de la police. Le coach plissa les yeux avec dégoût.

— Stilinski ! vociféra-t-il. Je ne porte plus de lunettes depuis que mon ophtalmologue m'a déconseillé les lentilles de contact, alors ne me fais pas prévoir une nouvelle consultation et dégage ces obscénités de ma vue ! 

— Oui, coach, dit Stiles en s'exécutant sans tarder.

Finstock approcha son visage du sien.

— T'avoir dans mon champ de vision est un supplice qui me pèse déjà bien assez, murmura-t-il.

— Merci, coach, répondit Stiles  avec un sourire sarcastique.

Finstock lui tourna le dos et un détail à l'arrière de la crosse dans sa main suscita son attention. Il eut pour réflexe d'agripper le long manche avant de le tirer vers lui.  Il observa l'embout qu'il arracha instinctivement.

— QU'EST-CE QUI NE TOURNE PAS ROND CHEZ TOI, STILINSKI ? cria le coach, scandalisé.

Stiles examina la forme hexagonale de la tige en aluminium et la compara avec une photo dévoilant les marques découvertes sur le cou de Zac Feller.

Elles étaient identiques.

Le coach le força à lâcher la crosse et s'éloigna après l'avoir longuement dévisagé. Stiles croisa le regard de Scott.

— Le tueur est dans l'équipe, dit-il.

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

Accompagné de Scott, Kira et Malia, Stiles s'infiltra en douce dans le bureau de Finstock.

— On ne peut pas être sûrs que ce soit un joueur de crosse, dit Scott.

— Non, répliqua Stiles en abaissant le store de la porte d'entrée. C'est pour ça qu'on va devoir vérifier chaque manche. L'arme que le tueur utilise est cachée à l'intérieur. C'est sûrement une lance ou quelque chose de similaire.

Ils prirent l'ensemble des crosses que le coach conservait dans des étagères et les dispersèrent sur une table. Avant le début des séances d'entraînements, il les distribuait aux membres de l'équipe, à l'exception des co-capitaines qui  les gardaient symboliquement en leur possession.

— Rien, déclara Kira après plusieurs minutes de fouille.

— Rien non plus, ajouta Scott .

— J'ai trouvé une facture de retard de paiement de loyer, dit Stiles en saisissant une enveloppe posée  sur une imprimante.

Ils se tournèrent vers Malia. Elle finissait une part de pudding qu'elle avait trouvé au fond d 'une corbeille à papier.

— Quoi ? dit-elle, la bouche pleine.

— Vous pensez que c'est Liam ? demanda Kira.

— Je crois qu'on ne devrait même plus se poser la question, répondit Stiles.

Scott fronça les sourcils.

— Il est instable, mais ce n'est pas un meurtrier, dit-il.

— Tu le défends alors qu'il visualise très probablement ta tête quand il frappe un  punching-ball ?

— J'essaye de le comprendre.

— Tu as déjà tout essayé, Scott. On ne peut lui courir après indéfiniment.

— Peut-être que courir ne fonctionne pas avec lui ? suggéra Malia en grignotant un morceau de biscuit qui traînait dans un tiroir.

— Je vois pas ce qu'on pourrait faire d'autre, soupira Scott.

— Je crois avoir une idée, déclara Stiles.

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

Profitant de quelques minutes de pause, Noah se rendit à la cafétéria.

— Bonjour, j'aimerais prendre à emporter, dit-il.

Mildred, la serveuse, se tenait derrière le comptoir.

— Shérif Stilinski ! s'exclama-t-elle, ravie.

Elle réajusta le filet transparent qui couvrait ses cheveux blancs et retira un côté de ses gants pour pouvoir lui serrer la main.

— Merci pour tout ce que vous faites pour cette ville.

Flatté, il lui adressa un sourire.

— Je ne fais que mon travail.

— Et c'est un travail exemplaire, insista-t-elle. Vous en avez fait plus que le shérif à mon époque.

— Ça me touche beaucoup, répondit-il. Vous avez un menu ?

— 1969, précisa-t-elle, plongée dans ses souvenirs. Quatre enfants ont disparu et ce vieux crouton de Rony Arnold n'a pas levé le petit doigt. Je n'ai éprouvé aucune empathie lors de ses funérailles en 1990.

Noah s'éclaircit la gorge, gêné.

— J'espère que vous serez réélu, dit Mildred.  Soyez certain que je voterai pour vous.

— J'apprécie votre soutien.

— J'apprécie qu'un homme respectable, humble et incroyablement charmant comme vous m'accorde aujourd'hui l'honneur de sa présence.

Ses lèvres s'étirèrent pour former un sourire qui accentua les rides qui creusaient ses joues.

— Êtes-vous libre les dimanches soirs à dix-neuf heures trente-cinq ? demanda-t-elle.

Le shérif ressentit un profond malaise.

— Je-

Il fut interrompu par le bruit du talkie-walkie accroché à son  blouson.

— Je dois reprendre mon service, annonça-t-il.

— Vous ne voulez pas prendre à emporter ? lança-t-elle.

— Peut-être une autre fois, dit-il aimablement avant de s'en aller au plus vite.

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

— Liam, dit Mason, assis dans la cantine. Je sais que tu crois que tout le monde te déteste, mais il y a énormément de filles qui veulent avoir ton numéro, alors si tu ramène pas tes fesses dans une heure, je m'arrangerai pour que tu restes célibataire jusqu'à la sortie de Silent Hill 3 qui  ne sortira pas avant-

La ligne téléphonique se coupa.

— Pense à changer la durée de ton répondeur, c'est insupporta-

La ligne se coupa à nouveau.

— Insupportable ! répéta-t-il, agacé.

Il grogna en rangeant son portable. Au même instant, Cole prit place à sa table en s'installant face à lui.

— Ton ami n'est pas là ? demanda-t-il en déposant son plateau-repas.

— Non, il pense trop à ce que les gens pensent de lui et pour info, c'est mon meilleur ami  et je n'ai jamais été attiré par lui.

Amusé, Cole sourit et Mason dut se faire violence pour ne pas fondre sur place.

— Alors, de quoi va parler ton prochain épisode ? dit Cole en dévissant une canette de soda.

— Quoi ?

L'Antre de l'Effroi.

Mason se raidit, bouche bée.

— Tu... tu écoutes mon podcast ? balbutia-t-il.

— J'en suis à la partie sur les goules.

Cole but une gorgée de soda.

— Je pourrais m'asseoir à côté de toi à notre prochain cours ? proposa-t-il.

Une goutte s'échappa d'entre ses lèvres et roula le long de son menton. Mason déglutit. Alors qu'il s'apprêtait à répondre, Aibee surgit à côté de lui.

— Ma mère vient de m'appeler pour savoir comment je me sentais par rapport au meurtre dans l'école, dit-elle. Je pensais qu'elle allait me proposer de prendre une année sabbatique.

— Elle peut faire ça ? demanda Mason.

— Ça et embaucher un traiteur quand elle a du mal en cuisine, ce qui est le cas des gens qui préparent les plats dans cette cafétéria.

— Je vois pas de quoi tu parles, leur crème d'épinard est excellente.

— C'est parce que tu n'as pas vu le dentier de Mildred tomber dedans avant qu'elle te serve.

Il lâcha sa cuillère.

— Salut, Cole, lança Aibee en lui faisant les yeux doux. Tu sais que la salsa est une danse où les deux partenaires sont très rapprochés ? On devrait explorer de nouveaux styles.

Mason roula des yeux.

— Pourquoi pas ? approuva Cole.

Mason manqua de s'étouffer.

— On devrait en parler à Mme. Bloom.

— On devrait d'abord en discuter entre nous, dit Aibee. Mason, tu peux nous laisser ?

— J'étais là avant toi, protesta-t-il entre ses dents.

— Je l'ai rencontré avant toi, rétorqua-t-elle à voix basse.

Ils sourirent à Cole qui n'entendait rien de leurs messes basses.

— Tu es comme une ombre maléfique, murmura Mason.

— Une ombre maléfique super canon, chuchota-t-elle en rejetant sa chevelure en arrière.

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

Lydia fut tirée du sommeil par le grincement de la porte de sa chambre. Mme. Martin entra et s'assit au bord de son lit.

— Comment est-ce que tu te sens, ma chérie ? demanda-t-elle en posant une main sur le bras de sa fille.

Calée contre un épais oreiller, cette dernière se redressa légèrement afin d'être dans une posture plus confortable.

— Mieux, répondit-elle.

— Tu avais vraiment besoin de repos. On aurait dit que tu n'avais pas dormi depuis... des jours ?

Natalie lui caressa les cheveux.

— Tu m'en parlerais si quelque chose n'allait pas, n'est-ce pas ?

— Par t'en parler, tu veux dire en parler à un psychologue et ce n'est pas ce que je veux, maman.

Elle s'interrompit.

— Plus de thérapies.

Mme. Martin hocha la tête. Elle se leva et se dirigea vers une commode, donnant le dos à Lydia.

— Tu peux me dire pourquoi tu as ramené le tourne-disque ? demanda-t-elle.

Elle se retourna en tenant le vieil objet entre ses mains. Lydia fronça les sourcils, confuse.

— Chérie, je sais qu'il compte pour toi, mais même réparé, tu ne pourras pas en tirer grand chose. Le disque de ta grand-mère ne joue plus. C'est comme s'il était redevenu...

— Vierge, ajouta Lydia en se rappelant des mots de Stiles.

—  C'est peut-être à cause de l'humidité. Quoi qu'il en soit, c'est mieux de s'en débarrasser.

— Non ! s'écria Lydia avec fermeté. S'il te plaît. Laisse-moi le garder.

Natalie soupira et passa ses doigts sur le tapis de lecture de l'appareil.

— Tu adorais la mélodie de Casse-Noisette, mais tu disais qu'il y en avait une en particulier que ta grand-mère te faisait toujours écouter en boucle. J'ai du mal à me souvenir du nom de ce ballet.

Le Lac des Cygnes, dit Lydia.

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

— Odette était une jeune fille qui menait une vie paisible, raconta Lorraine. Un jour, un sorcier lui a jeté un mauvais sort qui la transformait en cygne blanc à chaque lever de soleil.

Assise à ses côtés, Lydia l'écoutait attentivement.

— Malgré son apparence, elle a pu trouver l'amour, mais son bonheur lui a été enlevé par Odile, un cygne noir qui se faisait passer pour elle. Rongée par la tristesse, elle a disparu au fond d'un lac où personne ne l'a jamais retrouvée.

Tandis que la composition de Tchaïkovsky qui s'échappait du tourne-disque placé entre elles rompait le silence, elle contempla un instant la vaste étendue du lac qui faisait face au hangar à bateaux dans lequel elles se trouvaient.

— Je veux être une sirène, grand-mère.

Lorraine sourit.

— Comme Ariel ?

Lydia acquiesça.

— Est-ce que les sirènes nagent dans les lacs ? demanda-t-elle.

— Bien sûr.

— Odette aurait dû être une sirène.

— Oui, elle aurait dû, ma chérie.

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

Courant dans le parking, Malia ralentit finalement son allure en apercevant le transport scolaire tourner au coin d'une rue. Elle poussa un grognement.

— Tu te mets au sport ? dit quelqu'un.

Elle se retourna et vit Isaac au volant de sa voiture, un bras posé sur le rebord de la fenêtre.

— J'ai raté mon bus, répondit-elle.

— Je peux te déposer.

— Pourquoi ?

— Parce que j'ai une voiture ?

— Et alors ?

— Et alors, tu n'en as pas ? répliqua-t-il.

Elle haussa les épaules.

— Malia ! lança Stiles en la rejoignant. Tu as raté ton bus ?

Il remarqua Isaac.

— Tu devras me payer pour monter dedans, Stilinski, dit ce dernier en le narguant.

Stiles roula des yeux.

— Je te ramène, dit-il à Malia.

Il lui prit la main, puis s'immobilisa.

— Stiles ?

Quelques mètres plus loin, Aibee traversait le parking, accompagnée de Mason, Rachel et Andrew.

— Il faut que je règle quelque chose.

— Je vais bien, dit Malia en lâchant sa main.

— Quoi ?

Il reporta son regard sur elle.

— Isaac va me ramener, déclara-t-elle en ouvrant la portière de sa voiture.

Les deux garçons échangèrent un regard déconcerté. Stiles voulait s'interposer, mais il désirait encore moins perdre Aibee de vue.

— Je t'appellerai plus tard.

Il s'en alla d'un pas précipité.

— Pourquoi vous n'avez pas déjeuné avec nous aujourd'hui ? demanda Mason.

— C'est l'anniversaire de notre première rencontre, répondit Rachel en caressant amoureusement le cou de son petit ami. Andrew m'a emmené dans un restaurant.

— J'aurais trouvé ça extrêmement adorable si vous m'aviez invité.

— C'est mignon, dit Aibee.

Andrew la fixa longuement.

— Surtout si c'était un cinq étoiles, ajouta-t-elle.

— Dis, ce serait pas ton frère en train de sprinter dans notre direction ? dit Mason en plissant les yeux.

— Demi-frère, précisa Aibee.

— Qu'est-ce que tu fabriques ici ? s'écria Stiles une fois à son niveau. Tu es punie, tu te rappelles ? Tu n'as pas le droit de traîner avec tes amis.

— Mais tu as le droit de porter le même jean pendant trois jours d'affilée ? rétorqua-t-elle. Je vois pas en quoi ce serait équitable.

— Tu repars avec moi, ordonna Stiles. Fin de la discussion.

Il la traîna de force jusqu'à sa Jeep.

— C'est moi où il y a du scotch sur la vitre de la portière arrière ? dit-elle en pointant le véhicule du doigt. Et puis c'est quoi ces éraflu-

— Monte dans la voiture ! s'exclama-t-il.

— On peut y aller ? dit Scott en s'approchant d'eux.

Il était assis sur sa moto.

— Vous allez quelque part ? demanda Aibee, intéressée.

Stiles écarquilla les yeux et Scott réalisa son erreur.

— Euh...

Stiles secoua la tête.

— Oui, on... on doit aller dans un endroit, répondit Scott. Quelque part.

Stiles se frappa le front.

— Je viens avec vous, décida Aibee.

— Non ! intervint Stiles. Tu ne peux pas-

— J'ai un porte-clés avec un singe qui pend dans mon sac.

— Allons-y ! répliqua-t-il avec empressement.

Aibee se dirigea vers Scott.

— Qu'est-ce que tu fais ? demanda Stiles.

— Je monterai pas dans cette carcasse, rétorqua-t-elle. Juste un conseil, tu devrais vendre ton permis et te prendre une trottinette à la place.

Scott lui tendit un casque.

— Tu peux me le mettre ? demanda-t-elle de manière innocente.

Il disposa le casque sur sa tête, puis abaissa la visière. Aibee prit place sur le siège derrière lui et tenta de contenir son extase alors qu'elle enveloppait ses bras autour de sa taille.

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

— Je suppose que notre amitié est en bonne voie de développement, dit Isaac en conduisant. Tu ne peux pas briser la nuque du gars qui te dépose chez toi après les cours, c'est une sorte de règle universelle.

— Je ne serai jamais ton amie, contesta Malia.

— C'est une promesse ? répliqua-t-il d'un ton taquin.

Il se gara au bord du trottoir en face de la maison de Malia.

— Je ne vais pas te raccompagner jusqu'à ta porte, dit-il en éteignant le moteur. Je voudrais pas que ton chien s'attache trop vite à moi.

Malia détacha sa ceinture et empoigna son sac à dos.

— Ne te précipite surtout pas, plaisanta-t-il.

— Tu pourrais revenir plus tard ? dit-elle.

Décontenancé par ce retournement de situation, Isaac, haussa les sourcils, la bouche entrouverte.

— Tu voudrais qu'on sorte ensemble plus tard ? demanda-t-il.

— Je voudrais que tu reviennes pendant que mon père sera en train de dormir.

Le regard figé sur ses lèvres, il hocha la tête.

— Super, lança-t-elle.

Il se pencha vers elle, mais le claquement de la portière mit fin à son élan.

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

— On est arrivés, dit Scott en arrêtant sa moto.

Aibee avait la tête confortablement appuyée contre son dos, les bras encore fermement enroulés autour de son torse.

— On est arrivés, répéta-t-il.

Elle huma l'odeur de son blouson.

— Tu as dit quelque chose ? demanda-t-elle, un sourire béat sur le visage.

— On n'est plus sur la route, expliqua-t-il. Tu peux descendre.

À contrecœur, elle se détacha de lui et feignit de trébucher pour qu'il la rattrape. Ils retirèrent leur casque et elle noya ses yeux dans les siens.

— Scott ? dit Stiles en lui faisant un signe de la tête.

Ils avancèrent vers une maison.

—Qui habite ici ? demanda Aibee en les suivant.

— Liam Dunbar, répondit Stiles.

— Vous continuez de traîner avec ce naze ?

Ils montèrent sur le palier.

— On a des choses à lui dire, dit Scott.

— Des choses qu'on ne peut pas simplement dire par mail, ajouta Stiles.

Aibee le dévisagea avec confusion.

Il appuya sur la sonnerie. Au bout de quelques secondes, une femme brune âgée d'une quarantaine d'années environ ouvrit la porte d'entrée.

— Je peux vous aider ? dit-elle.

— Bonjour, Mme Dunbar ? lança Stiles en lui serrant la main. C'est un plaisir d'enfin faire votre connaissance. Nous sommes les amis de votre fils. Il vous a sûrement parlé de nous.

— Pas dans mon souvenir.

— Il est avec nous dans l'équipe de crosse, déclara Scott. Nous avons un devoir à faire en groupe.

Elle les invita à entrer.

— Liam est cloué dans son lit depuis ce matin, dit-elle en refermant la porte. Il dit qu'il est malade, mais je sais que c'est un prétexte pour ne pas aller au lycée. Je crois qu'il a du mal à s'adapter à notre déménagement, alors je suis rassurée d'apprendre qu'il a fait de nouvelles rencontres.

— C'est vous qui avez choisi cette déco ? l'interrompit Aibee en jetant des regards horrifiés aux alentours.

— Je pourrais utiliser vos toilettes ? demanda Scott.

— Troisième porte sur la droite, indiqua Mme. Dunbar en pointant les escaliers.

— Je crois qu'il faut que j'y aille aussi, dit Stiles.

Ils disparurent à l'étage.

— Toi aussi tu es amie avec mon fils ? demanda Mme. Dunbar.

Aibee réprima une grimace lorsqu'elle remarqua un cadre sur la commode du salon contenant le portrait d'un bébé qu'elle devinait être Liam.

— Oui, répondit-elle avec malice. Il se trouve que je suis sa meilleure amie.

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

— Tu as trouvé quelque chose ? demanda Stiles en trifouillant dans l'armoire de Liam.

Scott secoua la tête.

— Il doit garder sa crosse dans les vestiaires, répondit Scott en balançant un oreiller par terre.

Stiles lâcha un soupir.

— Au moins on sait une chose, ce garçon n'inspire pas seulement le désordre, il vit dedans, dit-il en posant le pied sur un paquet de chips vide.

La porte claqua subitement derrière eux.

— Qu'est-ce que vous fichez ici ? gronda Liam en faisant irruption dans la chambre.

Scott et Stiles se retournèrent précipitamment.

— Vous fouillez dans mes affaires maintenant ? hurla le jeune homme avec rage. Ça vous suffit pas de mettre le bordel dans toute ma vie ?

Il serra les poings.

— C'était déjà mal rangé avant qu'on soit là, souligna Stiles.

— Vous êtes au courant qu'il vous faut un mandat pour ça ?

— Je suis le fils du shérif, je crois que c'est suffisant.

Liam fonça droit sur lui, mais Scott s'interposa.

— On n'est pas contre toi, dit-il en posant une main sur son épaule.

Liam le repoussa violemment et saisit son bras afin de le faire basculer en arrière. Il reporta alors son attention sur Stiles qui recula légèrement.

— Tu vois, Liam, je m'attendais à ce que tu fasses quelque chose de ce genre, déclara-t-il. C'est pour ça que j'ai apporté ça.

Il projeta dans l'air une pincée de poudre d'aconit qu'il gardait dans sa poche.

Liam s'écroula instantanément.

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

— Et là, c'est lui à l'âge de six ans, déclara Mme. Dunbar en parcourant l'album photo de son fils. Il prenait mes soutiens-gorge pour des parachutes.

Elle ricana.

— Il a toujours eu le goût du risque.

Assise à ses côtés sur le canapé, Aibee ne perdait pas une miette de ses révélations, chacune plus croustillante que la précédente.

— Il dormait souvent avec un canard en plastique ? demanda-t-elle en retenant un fou rire.

— Il voulait à tout prix avoir un animal de compagnie, répondit Mme. Dunbar. On a dû trouver une alternative.

Elle se leva un instant pour surveiller le thé qu'elle préparait. Discrètement, Aibee sortit son portable et prit en photo une photographie de Liam le montrant en train de pleurer sur les genoux d'un homme déguisé en Père Noël.

— Alors, dit Mme. Dunbar en revenant dans le salon.

Elle tendit une tasse à Aibee.

— Est-ce que Liam te confie des choses ?

—  Quoi ?

— Vous devez être assez proches pour que tu sois sa meilleure amie.

— Oh ! lâcha Aibee entre deux gorgées. Oui, il m'a confié qu'il déteste les cadeaux que vous lui offrez pour son anniversaire et qu'il se sent mal d'avoir triché à son dernier devoir.

Mme. Dunbar masqua sa stupeur.

— En revanche, il ne m'a pas dit grand-chose concernant son enfance, alors n'hésitez pas à me raconter d'autres anecdotes, reprit Aibee. J'ai l'impression qu'elles vont énormément  nous rapprocher.

— Tu es quelqu'un d'attentionné, constata Mme Dunbar. Liam a de la chance de t'avoir.

— C'est beaucoup trop gentil, dit Aibee, flattée.

Elle  lui brandit son téléphone sous le nez.

— Vous pourriez répéter ce que vous venez de dire en vous tenant près du micro ?

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

Liam reprit conscience, allongé sur son lit. Penchés au-dessus de lui, Scott et Stiles l'observaient, appréhendant un nouveau geste brusque de sa part. Le jeune homme se redressa en leur jetant un regard noir. Ses yeux s'attardèrent sur ses griffes dont la poussée avait été exacerbée par la poudre d'aconit.

— Je déteste ce que tu m'as fait, dit-il.

— Je sais, répondit Scott. Je ne pourrais jamais changer ce qui s'est passé, mais tu dois comprendre que j'essaye de te protéger.

    — Me protéger de quoi ? rétorqua Liam en haussant le ton. De ce que je suis ? Tu sais ce que ça fait de ne pas dire à tes parents que tu vas jouer ton premier grand match parce que tu ne veux pas qu'ils voient les dégâts que tu vas causer ? Ce que ça fait de leur dire que ton équipe a perdu en évitant de mentionner que c'est parce tu n'as pas su maîtriser ta colère ?

Il marqua une pause.

— Je suis violent et je le serai toujours.

— Non, Liam, c'est faux, répliqua Scott.

— Tu ne sais pas ce que je peux faire avec ça, dit Liam en montrant ses mains. J'ai peut-être déjà tué quelqu'un.

— C'est justement ce qu'on essaye de mettre au clair, ajouta Stiles.

Scott lui donna un coup d'épaule.

— C'est toi qui les contrôlent, dit-il.

Liam contracta sa mâchoire.

— Comment ?

— Tu dois te souvenir que la seule et unique personne qui puisse réellement inverser la situation,  c'est toi. Tu dois devenir ton propre ancrage.

— Une métaphore ? C'est tout ce que tu as à proposer ?

Liam secoua la tête et replia ses doigts contre ses paumes en tentant de surmonter l'intensité de la douleur que lui infligeaient ses griffes, plantées à l'intérieur de sa chair. Avec une grande concentration, il canalisa son attention et la reporta sur le rythme régulier de son propre pouls. Lentement, la tension dans ses jointures se dissipa et il sentit ses ongles retrouver peu à peu leur longueur habituelle.

— Tu es prêt à nous écouter maintenant ? demanda Stiles.

— Je n'ai pas besoin de votre aide, répondit Liam. Mais si je l'accepte, ce sera sous certaines conditions.

— Quel genre de conditions ?

— Vous me laissez gérer les choses à ma façon. Je ne veux pas être entraîné ou encadré.

Stiles fronça les sourcils.

— Tes conditions c'est que tu acceptes notre aide à condition qu'on ne t'aide pas ?

— Exactement.

— Je t'avais dit qu'on aurait dû laisser tomber, dit Stiles à Scott. Ce gosse a la tête plus dure qu'une brique de ciment.

— Ce gosse peut en casser une sur ton crâne, cracha Liam d'un ton menaçant.

Scott s'interposa à nouveau entre eux.

— C'est d'accord, déclara-t-il pour apaiser l'atmosphère. On va te laisser tranquille.

— Moi je te garderai dans mon viseur, répliqua Stiles. Histoire de limiter tout imprévu.

Il glissa sur un skateboard.

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

— Maman ? s'écria Liam en descendant les escaliers, ahuri.

Cette dernière riait avec Aibee devant la télévision.

— Ryan Gosling est sorti avec la cousine de ma prof de maternelle, dit Aibee.

— C'est dingue ! s'exclama Mme. Dunbar qui prenait plaisir à écouter ses ragots.

— Qu'est-ce que tu fais ? demanda Liam en s'approchant d'elles.

— Oh, tu sors enfin de ton hibernation, lança sa mère en le voyant. Tu as pu avancer dans ton travail ?

— Quoi ?

— On va y aller, lança Stiles, derrière lui.

— Vous pouvez revenir quand vous voulez, dit Mme. Dunbar. Surtout toi, Aibee. Tu es la bienvenue.

Elles se levèrent du canapé et se prirent dans les bras devant la mine  épouvantée de Liam.

— Merci beaucoup, Nicole, répondit Aibee en lui adressant un sourire narquois. Et n'oubliez pas, il faut souligner votre arc de Cupidon en traçant une croix sur votre lèvre supérieure.

— Pourquoi j'y ai pas pensé ? marmonna Mme. Dunbar, stupéfaite.

   Liam les raccompagna à l'entrée.

  — Je peux savoir ce qui t'a pris de tricher ? réprimanda sa mère avant que la porte ne se referme.

   Aibee jubila en silence.

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

Le soleil se couchait derrière les arbres. Les mains enfouies dans les poches de son manteau, Teresa arpentait un sentier à travers les bois. Le vent d'automne soufflait dans sa longue chevelure et ses escarpins faisaient craquer les brindilles. Elle inspira une bouffée d'air et se laissa distraire par le chant des oiseaux. L'odeur des feuilles mortes chatouillait ses narines et le calme environnant apaisait ses pensées brumeuses.

   Une voiture ralentit à son niveau. Avec méfiance, elle pressa le pas sans se retourner, mais le véhicule resta au même point. Elle s'immobilisa lorsque la portière s'ouvrit dans sa direction. Jetant un coup d'œil furtif vers le conducteur, elle parvint à distinguer le  visage d'un homme.

   Derek.

— Tu sais qu'on ne suit pas une femme dans la forêt ? lança-t-elle en expirant de soulagement.

— Je savais que je ne pourrais pas te trouver dans un autre endroit, dit-il.

— Si je viens ici, c'est parce que je peux rester seule, répondit-elle sèchement.

— Il va bientôt faire nuit.

— La nuit ne m'a jamais posé de problèmes, rétorqua-t-elle  en continuant d'avancer.

— Je tiens à m'excuser, déclara-t-il.

— Il est trop tard pour ça.

— Je n'aurais jamais dû te comparer à Kate.

— Ben voyons, marmonna Teresa.

— Et parler au nom de Laura, ajouta Derek.

Elle se tourna vers lui.

— Non, en effet, tu n'aurais pas dû, mais tu l'as fait, répliqua-t-elle avec verve. Je peux comprendre que ma réaction n'ait pas été la plus délicate qui soit, mais absolument  rien ne t'autorisait à remuer le couteau dans la plaie comme tu l'as fait.

Ses lèvres tremblèrent.

— Je ne comprends peut-être rien à propos de vos secrets de famille ou de l'histoire de vos origines, mais jamais je ne l'aurais mis dans une situation  où elle aurait pu être en danger, dit-elle. Jamais.

Derek savait qu'elle était sincère.

— Maintenant, si tu veux bien, j'aimerais reprendre ma promenade.

Teresa referma la portière et poursuivit sa route en montant sur une pente qui débouchait sur un second sentier. En se retournant pour vérifier si Derek était toujours là, elle coinça son écharpe dans un enchevêtrement de branches. Il étouffa un rire et descendit de sa Toyota pour la rejoindre.

— Est-ce que tu me suis ? demanda-t-elle, agacée.

— Non, dit-il en marchant derrière elle. Je te regarde faire semblant de savoir où tu vas.

— Je vois.

Elle serra les dents.

— Et où est-ce que tu me proposes d'aller ?

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

— Qu'est-ce que c'est ? Un tronc d'arbre coupé ?

— C'est un chêne, précisa Derek.

— Je ne l'avais jamais remarqué, dit Teresa en l'effleurant du bout des doigts.

—Tu peux le voir uniquement parce que je t'ai emmené là où il se trouve.

Elle fronça les sourcils.

— Le Nemeton ne peut pas se révéler à ceux qui ignorent son existence, reprit Derek.

— Tu veux dire que cet arbre est magique ?

— C'est à cet endroit que les premiers druides pratiquaient leurs rites divinatoires. Il puise une partie de son énergie dans les courants telluriques et agit comme un aimant.

— Et qu'est-ce qu'il attire exactement ? demanda Teresa de plus en plus intriguée.

— Des êtres surnaturels.

Elle le regarda, la bouche grande ouverte.

— Tu... tu veux dire que la ville toute entière appâte des créatures et que ça dure depuis des années ?

— Des siècles pour être plus exact, répliqua Derek.

— Je vois, commenta-t-elle en déglutissant.

— Il y a une cave à légumes sous nos pieds, dit-il, pensif.

— J'imagine que ça doit être sympa, enfin, sauf pour les claustrophobes, bien sûr, plaisanta Teresa.

— Tu te souviens de la couleur qu'avaient mes yeux quand je me suis transformé  devant toi ?

Elle sembla réfléchir.

— Ils étaient bleus, je crois. Pourquoi ?

— La couleur des yeux d'un loup-garou a toujours une signification. Ils deviennent jaunes pour les Bêtas, rouges pour les Alphas et bleus...

Il s'interrompit et son regard se perdit dans le vide.

— Quand on tue un innocent, ajouta-t-il, la gorge légèrement nouée.

Malgré les années qui s'étaient écoulées, la douleur de ce souvenir se ravivait en lui comme des cicatrices marquées au fer.

— Quoi ? balbutia Teresa, horrifiée.

— Ça remonte à la première année, dit Derek. Lorsque je sortais avec...

Il resta silencieux un instant.

— Paige.

— Je m'en souviens, déclara Teresa. C'est la fille qui s'est fait attaquer dans les bois.

Elle recula, troublée.

— Tu... tu l'as tué ?

— Elle avait été mordue par un loup-garou, expliqua Derek.

— Qu'est-ce que c'est censé vouloir dire ?

— La morsure peut soit te transformer ou te tuer.

— Oui, mais tu viens de dire que tu l'avais tuée !

— Elle me l'a demandé.

Un frisson de terreur traversa le corps de Teresa.

— Je l'ai emmené dans la cave pour qu'elle soit en sécurité, poursuivit Derek. Elle perdait trop de sang. Tout ce que je pouvais faire, c'était la regarder souffrir.

Il baissa la tête.

— Elle voulait que je la laisse s'en aller et c'est ce que j'ai fait...

Teresa hésita longuement avant de s'approcher de lui. Avec précaution, elle posa une main sur son épaule. Ses yeux croisèrent les siens.

Il s'attendait à y voir de la crainte et de la pitié, mais y décela de l'empathie et le poids dans sa poitrine s'allégea.

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

Malia patientait dans sa chambre, allongée au sol. Un bruit  provenant de l'extérieur la fit se redresser. Elle remarqua alors Isaac, fermement agrippé à l'encadrement de sa fenêtre ouverte.

— Je crois que ton père s'est endormi, lâcha-t-il avec espièglerie.

    — Je crois aussi, répondit-elle.

   Il entra dans la pièce et s'empressa d'ôter le chandail qu'il revêtait par-dessus son tee-shirt. Il avança d'un pas confiant vers Malia avec un sourire enjôleur sur le visage.

   Elle lui tendit une lanterne.

  — Emmène-moi au cimetière, lança-t-elle avant de sauter par la fenêtre sous son regard hébété.

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

— C'est magnifique, dit Teresa, émerveillée.

Le ciel nocturne et dégagé permettait d'admirer le tracé des  constellations présentes  à cette saison.

— C'est le point culminant de la ville, déclara Derek. Chaque colline possède un angle de vue différent. Celle sur laquelle on se trouve fait constamment face à la lune. Je me tenais ici quand j'ai poussé mon tout premier grognement. La lune était pleine et je me sentais en phase avec elle. C'est une connexion indescriptible.

Teresa l'écoutait minutieusement, fascinée par les détails dont il lui faisait part.

— Vous vous transformez toujours une fois par mois ? demanda-t-elle, piquée par la curiosité.

— C'est ce que les gens s'imaginent quand ils ne regardent que des films ou ne lisent que des livres, répondit Derek. La lune peut influer sur notre comportement, mais ce n'est pas elle qui alimente nos pouvoirs. C'est quelque chose qui vit en nous. C'est une force, mais aussi une responsabilité.

— Et accessoirement un bon coup de pouce pour devenir le garçon le plus populaire du lycée, répliqua Teresa.

Il sourit, amusé.

— Ça je le dois à mes talents naturels.

— Fais attention, je crois que tes chevilles surnaturelles sont en train d'enfler.

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

— Le portail est fermé, informa Malia. On va devoir l'escalader.

Isaac s'approcha de la clôture du cimetière et secoua légèrement le loquet sur la droite. Il se déverrouilla.

— Comment est-ce que tu as fait ça ?

— J'ai travaillé ici quelque temps, répondit-il en glissant le cadenas dans sa poche.

   Il alluma la lanterne et ils pénétrèrent dans l'allée principale. Autour, des rangées de tombes et de caveaux se succédaient en s'étendant sur plusieurs mètres.

— J'ai réussi, dit-elle.

— Quoi ?

— Mon examen de maths. Je l'ai réussi à cause de toi.

  — Je crois que tu veux dire grâce à moi, répliqua Isaac. Ne me remercie pas.

  — Je ne le ferai pas, rétorqua Malia.

   Elle s'arrêta soudainement.

  — Ne bouge pas, ordonna-t-elle.

   Il s'exécuta.

  — C'est ici, déclara-t-elle, postée devant une tombe.

   C'était celle d'un enfant.

   À la lueur de l'ampoule, Isaac lut les inscriptions gravées sur la stèle.

— C'est ta sœur ? demanda-t-il.

   Malia tomba sur ses genoux, accablée de tristesse.

  — C'est la première fois que tu viens ici ?

   Elle acquiesça.

— Tu as dit que je devais faire mon deuil, sanglota-t-elle. Comment ?

   Isaac s'agenouilla à côté d'elle.

— On passe par plusieurs étapes, dit-il. Le choc.  L'incompréhension. Le déni. La colère. La reconstruction et enfin l'acceptation.

— Elle me manque.

— Tu la gardes en vie toutes les fois où tu penses à elle.

   Il marqua une pause.

— C'est l'amour qu'on donne aux gens qui nous lie à eux.

Malia renifla, puis sortit de son sac à dos une poupée à l'effigie d'un bébé.

— C'était la sienne, expliqua-t-elle. Quand je l'ai retrouvée dans les bois, je me suis dit que c'était à mon tour de veiller sur elle, comme une grande sœur.

   Elle la déposa sur la tombe avant de se relever.

  — On peut s'en aller.

— En fait, je crois que j'ai envie de rester encore un peu, ajouta-t-il.

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

Isaac contemplait la pierre tombale en marbre. Son regard s'attarda sur l'épitaphe.

— Tu n'étais jamais venu ici toi non plus ? demanda Malia.

   Il secoua la tête.

  — Elle te manque aussi.

   Il déglutit difficilement.

  — Chris m'a dit qu'elle avait forgé les pointes des dernières flèches qu'elle a tiré cette nuit-là, dit-il. C'était comme un rite de passage.

   Sa gorge se serra.

  — Elle m'a sauvé la vie. Chaque jour, je me dis que ça aurait dû être moi plutôt qu'elle...

   Une larme roula sur sa joue. Malia lui prit la main.

Elle saisit la lanterne et la laissa au pied de la sépulture.

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

— Tu acceptes que je te ramène cette fois ? lança Derek en regagnant le chemin de sa voiture.

— Uniquement parce que je crois avoir marché dans des orties, gémit Teresa en se grattant les jambes. Tu es immunisé, je suppose.

  — Seulement les soirs d'Halloween, répondit-il avec humour.

Il reprit soudain son sérieux, persuadé d'avoir senti de l'agitation dans les parages. L'instant d'après, une hache fila dans l'air à toute vitesse pour s'enfoncer  dans son torse.

  Teresa poussa un hurlement et accourut vers lui, étendu au sol.

— Derek ! paniqua-t-elle. Derek, regarde-moi !

— N'a... N'appelle pas les secours, réussit-il à articuler, alors qu'un liquide noir coulait de sa bouche. Conduis... jusqu'à chez moi...

       Il perdit connaissance.

— Derek ? cria Teresa.

   Les mains tremblantes, elle fit pression sur l'hémorragie.

— Derek ! Reste avec moi, s'il te plaît ! Reste avec moi !

━ ✧° ☾⋆⁺ ━

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