Jour 32

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Dans une très ancienne mythologie, le Soleil et la Lune étaient deux esprits divins qui veillaient sur le système solaire et ses habitants. Soleil, déesse tout feu tout flamme, cheveux courts et orangés, représentée sur les peintures avec une peau du plus beau jaune et de profonds yeux rouges. Beauté sauvage et excentrique. Elle veillait bien sûr à illuminer les journées sur chaque petite planète du système, mais également du bon fonctionnement de la nature, faune diurne et flore. Sa comparse, chacun pouvait s'y attendre, lui était parfaite de contraste et de complémentarité. Une peau d'un bleu pâle tirant sur le gris, d'immensément longs cheveux argentés et de grands yeux oscillant entre le marine et le noir, sa beauté timide et fragile ne la rendait pas faible pour autant. Reine de la nuit et des étoiles, elle veillait sur la mer, la faune nocturne, les rêves des habitants et, assez surprenamment, leur fertilité.

Toutes deux travaillaient beaucoup, se voyaient peu, mais jouissaient d'une complicité que nul n'aurait pu comparer. Connivence rapidement accompagnée d'un amour pur et profond. Simple. Sublime. Infini et éternel. Elles ne pouvaient profiter de la présence de l'autre que très rarement, et avaient même choisi un mot pour ces retrouvailles hors du temps. Éclipses. Pour le reste, elles se souriaient de loin chaque jour et chaque nuit, vivaient de solitude quelques heures lorsque Lune se retrouvait masquée à la vue de Soleil par la Terre, discutaient chaque minute où elles se voyaient, profitaient, s'aimaient. Elles n'en venaient pourtant pas à négliger les planètes et leurs habitants qui comptaient sur elles pour bien des choses, mais elles pouvaient néanmoins déclarer avec une jolie certitudes qu'elles étaient seules dans l'univers. Dans leur univers.

Elles ne se disputaient jamais, de quoi pourraient-elles ? Nul autre astre ne possédait de caractère divin, la jalousie se trouvait donc exclue de l'équation qu'était leur couple, elles ne vivaient pas réellement ensemble pour subir des litiges conjugaux, et leur amour était simplement trop pur pour se complaire en vaines querelles.

Un jour pourtant, Mars se réveilla divinité, sublime et quelques peu arrogant Mars, il éclipsa totalement Soleil par sa prestance, sa présence, sa perfection. Du moins le crut-elle. Elle céda à la panique. Mars était plus proche de Lune qu'elle, et Lune, ravie malgré tout de rencontrer une toute nouvelle tête, se laissait aller à de longues conversations avec lui. Et Soleil bouillonnait de rage et de peur. Peur de perdre celle qu'elle aimait au détriment de ce nouveau, de les voir roucouler chaque jour qu'elle faisait, devant ses yeux détruits. Elle profita d'une éclipse pour lui en toucher deux mots sans que Mars ne l'entendît, mais Lune la rassura de sa douce et carillonnante voix. Cela ne lui suffit pourtant pas. Sa bien-aimée ne lui vouait peut-être aucuns sentiments, mais l'inverse était bien réel, et elle ne le supportait pas.

Elle attendit alors une nuit où Lune se trouvait masquée par la Terre, et passa à l'action. Elle détruisit Mars en bonne et due forme, ne laissant de lui plus qu'une planète sans vie. À Lune, elle expliqua qu'il avait simplement abandonné sa mission pour s'en aller explorer l'univers lointain, et si cette dernière en sembla désolée, cela n'alla pas plus loin. Il n'avait pas eu le temps de devenir l'ami qu'on regrette et qui nous déchire, simplement un collègue qu'on apprend à découvrir.

Soleil n'était pas fière d'elle, mais en voyant un sourire briller sur le visage de Lune dès que son regard se posait sur le sien, elle ne regretta pas une seconde son geste. Et puis, les divins n'obéissaient pas aux mêmes lois, c'était bien connu. Les millénaires continuèrent de passer sans que leur amour ne s'émoussât, et sur Terre certains le louaient sans même savoir qu'il était bien réel.

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