Jour 9

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Les notes dansaient dans l'air, s'envolant dans toutes la pièce, bondissant joyeusement contre les murs, avant de venir mourir comme les plus belles des fleurs fanées. Et parfois, l'orage au-dehors, jaloux, laissait éclater sa colère pour que les notes devinssent inaudible. Mais elles reprenaient alors, imperturbables. La responsable de ce ballet musical ne se laissait pas plus déstabiliser par le déchaînement des éléments alentours, concentrée sur son piano, ne libérant aucune fausse note. Le coucou de l'horloge du salon vint se joindre à leur chanson pour annoncer les trois heures. Le temps passait si vite et pourtant avec une lenteur démesurée. Il faisait presque noir dans la pièce, seule une faible lampe éclairait le piano et ses touches, soutenue irrégulièrement par le flash des éclairs qui zébraient la nuit. Ambre se sentait bien, en harmonie avec le moment, avec les sons qui dansaient dans la pièce, et la musique de l'orage. Elle ne pensait plus, et les démons dans sa tête se retrouvaient mis en sourdine par la magie du piano. Elle savait pourtant que lorsque viendrait l'heure pour elle de rejoindre le lit qu'elle avait fuit après son réveil nocturne, ils reprendraient leur cris virulents. Alors elle se laissait bercer, et continuait de chasser l'heure de retourner dormir.

La grande maison de campagne, vide de vie sinon elle et Belzébuth, son chat endormi sur ses genoux, ne laissait échapper de lumière que celle du salon. Ambre vivait seule dans l'ancienne maison de ses parents depuis leur départ. Elle aurait pu trouver un appartement en centre-ville, plus près de son université, de ses amies, de tout, mais sa seule arme contre ses insomnies avait toujours été le piano du salon de ses parents, aussi préférait-elle subir la demi-heure de transport que rejoindre le centre-ville lui demandait plutôt que de se trouver seule dans un appartement, livrée à elle-même. Ici, nul ne pouvait l'entendre, personne à déranger, si ce n'était le félin mélomane qui descendait systématiquement se rendormir sur elle, bercé par sa musique. Ses concerts nocturnes s'étalaient parfois sur la nuit entière, et le soleil se levait avant qu'elle ne soit allée se recoucher. Elle le savait. Elle se noyait dans la musique, et tout le bien que cela lui faisait sur l'instant ne faisait qu'accentuer le mal que cela procurait sur le long-terme. L'accumulation de la fatigue, les mauvaises habitudes de sommeil... Il fallait qu'elle cesse. Mais chaque soir, lorsqu'après être parvenue à s'endormir une minuscule heure, le sommeil la fuyait et ses démons revenaient, elle retournait à son piano et les chassait de sa musique. Les notes, fées virevoltantes et combatives, emplissaient la pièce d'une bulle d'allégresse dans laquelle elle se sentait bien.

L'orage gronda une fois supplémentaire, faisant sursauter Belzébuth sur ses genoux. Lorsque le coup de tonnerre fut passé, le silence régnait dans la maison. Trois heure douze, Ambre avait un test important le lendemain qu'elle ne pouvait se permettre de rater. Elle ne se sentait pas encore le courage de retourner sombrer dans son insomnie, pourtant il eût été raisonnable qu'elle le fît. Ces derniers temps, le simple fait de se retrouver dans le noir, à attendre que le sommeil voulut bien la prendre, lui était insupportable et lui donnait l'envie immédiate de fuir à nouveau, de repousser l'inévitable. Elle ne pouvait pas remonter, pas encore, pas tout de suite. Elle n'était pas assez forte pour ça, pas encore. Elle offrit à son chat la caresse qu'il réclamait du regard, puis posa ses doigts graciles sur l'instrument devant elle pour entamer une nouvelle danse. Voilà, un dernier morceau et ensuite elle retournerait dormir. Un dernier morceau. Cela faisait bientôt une heure qu'elle se répétait cette promesse à laquelle elle ne croyait même pas. Un dernier morceau. Et puis un autre encore. Et encore celui-ci car plus long que la moyenne...

Au-dehors, l'orage l'accompagnait toujours, compagnon de sa solitude.

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