Chapitre 4

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Drago.

Sur le bureau de Granger, les dossiers sont parfaitement empilés par couleur et alignés par taille, un détail d'organisation qui me procure un sentiment partagé de satisfaction.

Celui qui nous intéresse est ouvert entre nous, et Granger griffonne les recommandations que je lui récite dans un carnet relié.

— Tu es sûr de toi pour ce dernier argument ?

— Oui. Objectivement, la veuve Remington avait certes tous les ingrédients pour concocter la potion, le mobile et même les compétences, mais pour moi, aucune preuve tangible. À ce stade, ils n'ont que des circonstances aggravantes en face. Rien que tu ne puisses démonter.

L'affaire qu'elle défend est délicate : une sorcière est accusée d'avoir empoisonné son mari. Tout l'accuse et Granger, convaincue de son innocence, est chargée de la défendre.

Elle tapote la page de son carnet.

— Le poison - si poison il y a - serait de toute façon indétectable...

Parfois je me demande pourquoi elle accepte des cas si compliqués. Avec son intelligence et sa force de travail, elle pourrait largement se contenter d'affaires qu'elle est sûre de gagner, et donc d'empocher l'argent.

Sauf que ce n'est visiblement pas ce qui la motive.

— Ça s'annonce corsé, je soupire.

Elle se redresse, fait rouler les muscles sur ses omoplates et s'étire longuement.

— Et tu sais que j'aime ça, sourit-elle.

— Je ne m'inquiète pas. Tu vas trouver un angle de défense, tu es bien trop intelligente pour l'accusation.

Elle fronce le nez dans un sourire, mais c'est sincère.

J'ai toujours admiré la vivacité de son esprit, même si cela m'a longtemps agacé quand nous étions dans les mêmes classes.

Elle regroupe les parchemins de l'affaire en question et les range dans un dossier couleur corail. Je rassemble mes affaires, jette un oeil à l'heure.

— Tu veux qu'on étudie l'affaire Judy Garnett ? J'ai encore un peu de temps.

Elle secoue sa tignasse.

— Pas moi, et je ne veux pas bâcler cette affaire. On peut se revoir plus tard dans la semaine pour reprendre tous les éléments et que tu me donnes ton avis ?

J'ouvre mon agenda, le tapote du bout de ma baguette et mes plages de disponibilités se révèlent.

— La semaine prochaine, mardi ou jeudi, avant midi. Si Harry ne m'appelle pas au dernier moment pour une affaire...

Granger opine du chef et note notre prochaine session de travail sur son propre carnet, avant de le ranger dans un tiroir.

— Ça va, vous deux ?

— Bien, bien. Très bien.

Granger lève un sourcil perspicace, mais je ne saurais pas par où commencer.

— Oui, tout va bien. On ne peut mieux.

— Tu mets beaucoup d'efforts à t'autoconvaincre, on dirait. Tu veux en parler ?

— Il n'y a pas grand-chose à en dire...

— OK.

Elle esquisse un sourire et finit de ranger sa sacoche pour emporter ses affaires au tribunal.

— C'est juste qu'il est si... agaçant parfois !

— M'en parle pas, m'accorde-t-elle en riant.

Puis, elle doit percevoir que je ne suis pas vraiment d'humeur légère concernant Harry, alors elle se tourne vers moi avant de quitter le bureau.

C'est difficile de ruminer seul, et Granger est peut-être ce qui se rapproche le plus d'une amie dans ce Ministère. Alors je saisis volontiers sa perche tendue.

— Je pensais qu'être enfin ensemble était la fin de parcours du combattant. Mais c'est... dur d'être avec lui.

Je soupire longuement avant de lui jeter un coup d'oeil.

Elle penche un peu la tête, sans un mot, pour m'inciter à continuer à me livrer.

— J'ai parfois l'impression qu'il sabote ce qu'on a difficilement réussi à mettre en place tous les deux.

— Il s'est passé un truc ?

— Rien. Une bêtise...

Je n'ai pas vraiment envie de lui parler de Damian, même si je suis certain qu'elle comprendrait que toute cette tension est ridicule.

— C'est dur d'être loin de lui, mais c'est aussi dur d'être avec lui. Et en ce moment, j'ai l'impression qu'il ne veut pas être avec moi.

— Ne dis pas n'importe quoi. C'est difficile pour lui de faire une déclaration publique, mais...

— Je ne lui demande pas ça, je la coupe. Je me fiche qu'on ne soit pas un couple officiel aux yeux des gazettes. Je parle de nous. Juste entre nous.

— Tu lui as dit tout ça ?

— J'essaie, mais ça finit en dispute. Toujours.

— Tu veux que je lui touche un mot ? Non pas qu'on se parle beaucoup en ce moment...

— Non, garde ça pour toi, s'il te plaît. Je ne veux pas qu'il croie que je conspire dans son dos.

Granger lève les yeux au ciel.

— Toujours aussi parano ?

— Il fait des efforts, mais il suffit d'un rien pour lui filer des crises d'angoisse.

La situation avec Damian en est un parfait exemple.

Granger n'essaie pas de me rassurer, elle se contente de m'écouter et je la remercie pour ça. Elle m'offre l'occasion de livrer les doutes que je rumine depuis des semaines. Sauf que si je partage à voix haute le fond de ma pensée, je rends mes craintes bien réelles.

Je me mords la lèvre, hésitant.

— Parfois je me demande... s'il ne me teste pas.

Elle fronce les sourcils.

— Comment ça ?

— Je veux dire, est-ce que je suis digne d'être avec lui ? Est-ce qu'il a pardonné ce que j'ai fait, celui que j'ai été ?

Granger se lève, contourne son bureau et vient s'asseoir dans le fauteuil près du mien. Son regard est inquiet, mais je poursuis.

— J'ai parfois la sensation que sous les sentiments qu'il n'ose pas prononcer, il y a toujours une haine latente...

Sa main se pose sur mon bras, me presse dans un geste compatissant.

— Ne dis pas ça, Drago.

Je me contente de hausser les épaules.

— Ce n'est pas sa faute, c'est notre histoire, et peut-être que mes années de rédemption ne suffisent pas.

— Tu es dur avec toi-même.

— Je n'en sais rien. On ne pardonne pas si facilement à son ancien harceleur.

— Tu y vas fort...

— C'est ce que j'ai été.

Granger se redresse, replace une mèche de cheveux derrière son oreille.

— Tu crois que c'est ton comportement à l'école qui l'a le plus marqué ? Pas d'avoir été le pion de Dumbledore alors qu'il lui faisait entièrement confiance ? Pas d'avoir dû renoncer à son insouciance d'ado pour essayer de sauver le monde sorcier ? Pas d'avoir dû sacrifier la vie de gens à qui il tenait ?

Elle soupire.

— Tu crois que ce sont tes piques qui l'ont traumatisé ? Pas les gazettes intrusives qui ne lui accordent aucun répit ? Pas le Ministère qui a fait de lui une marionnette quand il voulait juste vivre sa vie, tranquille ?

Je sais qu'elle n'a pas tort. Mais l'un n'empêche pas l'autre, j'ai ce désagréable sentiment de ne pas en faire assez pour être digne de Harry.

— Votre relation n'est peut-être pas très saine, mais c'est votre histoire. Et de son côté, on ne peut pas dire qu'il ait super bien géré ses traumas de la guerre et de la prophétie. Mais je suis certaine que vous allez surmonter tout ça...

J'ai tellement envie d'y croire, mais certains jours, c'est difficile.

— Et s'il était avec moi parce qu'il n'arrive pas à être avec quelqu'un d'autre ? Juste par dépit ?

— Et s'il était avec toi parce qu'il ne veut être avec personne d'autre ? Parce que tu lui fais du bien ?

*

Dans la casserole, ma sauce tomate à l'origan revient à petit feu.

Je vérifie la cuisson du poulet dans la sauteuse quand Scorp débarque dans la cuisine. Il farfouille dans le placard du haut, en sort un sachet de grains de maïs, puis dépose sur le comptoir le DVD qu'il tient entre les mains.

— Qu'est-ce que c'est ?

— Pour ce soir. Toi, moi et un vieux film moldu.

Je pose ma cuillère en bois, me tourne vers lui.

Sous la proposition légère, il y a de l'inquiétude qu'un fils ne devrait pas avoir pour son père.

— Ce n'est pas ce soir la sortie avec ton club d'astronomie ?

Je sais pertinemment qu'il attend les vendredis soirs avec impatience pour revoir ces copains d'école qu'ils ne voient plus aussi souvent depuis qu'il est à Poudlard.

Scorpius se hisse sur le tabouret.

— Si. Mais je peux annuler et rester avec toi...

— Hors de question.

Il tend la main pour piquer un bout de tomate qui traîne sur ma planche à découper.

— Je peux rester 'Pa. On se voit tous les mois avec les garçons, c'est pas très grave si je rate une soirée.

Je me penche par-dessus le comptoir, rive ses yeux sur lui et mets tous mes efforts dans un sourire que je veux convaincant.

— Je vais bien, Scorp.

Il opine du chef, mais il n'a pas l'air convaincu.

— Je vois bien qu'il y a un truc qui te tracasse.

Ce gosse est une vraie éponge à ressentis.

— Tu peux m'en parler, tu sais. C'est ton travail ? Les amours ?

Je lève les yeux au ciel dans un sourire.

— Scorp ! Tu crois vraiment que j'ai le temps de...

— Justement, tu devrais peut-être prendre le temps.

Je fronce le nez et essaie de reprendre le rôle de l'adulte dans notre relation.

— Et si tu te mêlais un peu de tes affaires ?

Je le taquine, mais on a pris l'habitude de se parler. Aucune envie de ressembler à mon père envers qui j'avais certes de l'admiration, mais aussi une grosse appréhension dès je voulais lui adresser la parole. Même avec ma mère, les confidences restaient rares et jugées comme une faiblesse.

J'ai élevé Scorpius dans un environnement de confiance où il pouvait me parler de tout. Sauf que ça marche visiblement dans les deux sens.

— J'aime pas te voir triste, 'Pa...

Il ne sait rien de ma relation avec Harry. Tant que le principal concerné voudra garder la relation secrète aux yeux du monde, je ne sais pas comment en parler à Scorpius. Sans compter qu'il est ami avec Albus, ce qui me fait marcher sur des oeufs constamment.

— Je ne suis pas triste Scorp, c'est juste... une affaire au boulot qui me prend la tête. Rien de grave, promis.

Il n'est pas dupe, mais n'insiste pas. Il contourne le comptoir de la cuisine et tend les bras pour m'offrir un câlin.

Il a beau filer vers ses quatorze ans, je ne me lasserai jamais de nos moments de complicité comme quand il était gamin, alors je le serre tout contre moi. Au diable Harry et ses angoisses, tant que tout roule à la maison avec Scorp, je suis le plus comblé des parents !

A contre coeur, je mets fin à l'étreinte réconfortante.

— Allez, file faire ton sac !

Au même moment, la sonnette de la porte retentit. Je baisse le feu sous la casserole, enchante ma cuillère en bois au-dessus de la poêle pour que ma sauce ne brûle pas.

Je n'attends personne ce soir, mais peut-être que Harry a réalisé qu'il avait eu une réaction exagérée et qu'il vient s'excuser.

Ce n'est pas son genre, mais je me mets bêtement à espérer.

Sur le pas de la porte, j'ai un hoquet de surprise.

Damian Patel a toujours été dramatiquement élégant. Dix ans après, il n'a pas changé dans son trench-coat cintré et emmitouflé dans une écharpe grise en cachemire. Son charme est toujours intact. ll penche la tête et esquisse un sourire.

— Est-ce que je peux rentrer ?

Sans même réfléchir aux conséquences, je lui ouvre la porte en grand.

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