Chapitre 3

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L'héritier

ou

Sorin en colère

- Aldin, réveille-toi...

Aldin roula sur le dos pour voir le visage de Sorin qui lui souriait dans la pénombre de leur case.

- Il est l'heure, tu dois manger avant le cours du matin, dit-il avec un sourire. Il y a du pain au miel aujourd'hui.

- Toi, tu sais me dire les bonnes choses, rit doucement Aldin en réprimant un bâillement.

Sorin sortit de la case et sa sœur se redressa en position assise sur son lit de mousse en s'étirant. Elle sortit de son lit avec un frisson et fit le tour de la pièce pour allumer les bougies, pieds nus, les cheveux tombant en cascade dans son dos et sa robe de nuit légère flottant autour de ses jambes au rythme de ses pas. Une fois la dernière mèche allumée, elle se dirigea vers son armoire. Elle se dévêtit entièrement avant d'enfiler une robe de lin verte et marron qu'elle ceignit avec son habituel ceinturon de cuir, et tressa rapidement ses cheveux avant de jeter un châle vert forêt à franges sur ses épaules et de sortir de la case, une paire de petites bottines de cuir aux pieds.

Assis à la petite table de déjeuner protégée par un auvent de bois devant la case l'attendait Sorin, qui poussa vers elle un bol de lait chaud et trois tartines de pain au miel. Aldin le remercia d'un sourire et murmura une rapide prière à Nivest avant de croquer avec appétit dans une tartine, tandis que le Soleil montait paresseusement au-dessus les arbres de la forêt.

- C'est quoi le programme de tes cours aujourd'hui ? demanda Sorin avant d'avaler une gorgée de son propre bol de lait.

- Je pense faire quelque chose sur la géographie de Nivestia, répondit Aldin en ramenant une mèche échappée de sa natte derrière son oreille, il va bien falloir qu'ils apprennent à se repérer, ne serait-ce que dans la forêt... et puis, on va faire un cours sur les différentes professions qu'ils peuvent envisager plus tard, en tant que citoyens du Village.

- Tu sais, Père est très fier de ce que tu fais avec les petits, sourit Sorin à sa sœur.

- Je ne fais que mon travail, répondit-elle en terminant sa troisième tartine de pain au miel, c'est mieux que de me tourner les pouces toute la journée.

- Oh, arrête ton cinéma, protesta Sorin avec un sourire amusé, tu peux minimiser tes efforts tant que tu veux face à Asteria, mais tu ne me la feras pas, à moi ! Tu fais partie de celles et ceux qui travaillent le plus au Village.

- Est-ce que son Altesse Royale a dormi au Village cette nuit ? demanda abruptement la brune en se levant de table.

- Tu changes de sujet.

- Je te demande si son Altesse le prince a dormi ici cette nuit.

- Qu'est-ce que ça peut te faire ?

- Je vais lui apporter un petit-déjeuner.

- Quoi ?! s'exclama Sorin, s'étouffant à moitié dans son bol de lait.

Il s'essuya la bouche du dos de la main et lança un regard agacé à sa jeune soeur.

-Tu n'as pas besoin d'être aussi diligente que ça avec lui sous prétexte qu'il est un prince, tu sais, lança-t-til, acerbe. Je te rappelle que nous n'avons rien à réclamer de la famille royale.

- Il n'empêche que c'est l'invité du Village, il doit être bien traité.

- Aldin, tu es ridicule.

- Tu es jaloux parce que je ne t'apporte jamais ton petit-déjeuner au lit ?

- Ne vous disputez pas à cause de moi, dit doucement une voix dans le dos d'Aldin.

Elle se retourna vivement, sa natte fouettant presque son visage, et fit face avec Emrys qui la regardait d'un air un peu triste. Le jeune homme était dépourvu de sa riche tenue princière, mais portait un pantalon et une blouse en lin qu'Aldin reconnut comme appartenant à Sorin. Maintenant qu'elle y pensait, les deux garçons avaient la même stature souple et svelte.

- Aldin, file, ordonna Sorin d'une voix sèche, depuis derrière elle. Tu dois aller préparer la classe pour les enfants.

- Tu éduques les jeunes du Village ? demanda le prince, les yeux pétillants d'intérêt.

La jeune femme hocha la tête sans un mot et Emrys eut un sourire un peu plus joyeux.

- Penses-tu que je puisse assister à ton cours ? Je te promets de ne pas déranger la classe.

- Votre Altesse, protesta Sorin, je pense que votre présence...

- Ne dérangera personne, l'interrompit Aldin avec un sourire. Les petits seront honorés de vous avoir avec eux, votre Altesse.

Le visage du prince s'éclaira et il remercia la jeune femme chaleureusement.

- Sorin vous montrera la case d'éducation, il ne reste que dix minutes avant le début de la classe matinale, ajouta Aldin effrontément, très amusée par l'air furieux qu'elle avait vu se peindre sur le visage de son frère en se retournant vers lui.

Elle prit congé d'Emrys et se dirigea elle-même vers la case d'éducation pour préparer le cours.

***

- Quelqu'un a encore une question ?

- Non ! répondirent en chœur les petits.

- Dans ce cas, dit Aldin en joignant ses mains, remerciez bien son Altesse le prince pour sa présence lors de vos deux cours de la journée, et n'oubliez pas, pour celles et ceux qui le souhaitent, de l'inclure dans vos prières de ce soir !

Les enfants passèrent un par un devant Emrys pour lui faire un câlin et le remercier, sous le regard attendri d'Aldin qui rangeait la salle. Une fois le dernier enfant sorti de la case, Emrys s'assit à califourchon sur une chaise et se tourna vers Aldin.

- Quel talent avec les jeunes ! Qui t'a appris cette patience et cette pédagogie ?

- Père, répondit Aldin en tirant les grands rideaux de lin, Père m'a tout appris.

- Je suis désolé...

- Ne le soyez pas, sourit la jeune fille en détachant ses cheveux pour refaire sa natte, ce n'est pas parce qu'il est mourant qu'on n'a plus le droit de parler de lui.

Elle ravala les larmes amères qui menaçaient de monter à chaque mension de son paternel et lança au prince le sourire le plus convaincant dont elle était capable.

- Pourquoi tiens-tu tant à me vouvoyer ? demanda-t-il en fourrageant dans sa crinière blonde. Je préférais presque la sécheresse dont tu as fait preuve hier !

- Ne me rappelez pas ça ! s'esclaffa Aldin en renvoyant sa tresse dans son dos. Blague à part, mon père nous a appris à montrer énormément de respect envers les gens plus haut placés que nous... Et vous êtes un prince !

- Parfois, j'aimerais n'en être pas un, répondit Emrys, pour que les gens se comportent normalement avec moi. Et puis, je ne suis pas si vieux, pour être vouvoyé et appelé ''Votre Altesse Royale le prince'' ! Quel âge as-tu ?

- Dix-sept ans.

- Je n'en ai même pas dix-huit ! Si je vivais ici, nous serions amis.

- Mais vous ne vivez pas ici, votre-Altesse-Royale-le-prince, répondit Aldin avec malice.

Emrys éclata de rire.

- Qu'est-ce que tu fais habituellement après la classe de l'après-midi ?

- Je vais simplement chasser, quand je ne sauve pas la vie de jeunes princes en détresse.

- Eh bien, allons chasser ensemble ! proposa Emrys avec un grand rire. Comme ça, tu seras là pour me sauver en cas de problème.

- Faisons ça, rit à son tour Aldin en sortant de la case, le prince à sa suite.

Ils se dirigèrent vers les écuries où attendaient Viggó et la magnifique jument blanche du prince.

- Comment s'appelle-t-elle ? demanda Aldin avec curiosité, alors qu'Emrys recevait un formidable accueil de la part de la jument.

- Snejinka, répondit Emrys en déposant une selle finement ornée dur le dos de la jument.

Flocon de Neige, traduisit Aldin. Elle avait eu la chance de bénéficier de cours de nivestien ancien, et cela faisait ses preuves, de temps en temps.

- Ça lui va bien, sourit-t-elle.

Viggó se mit brusquement à hennir, alors qu'Emrys enfilait le mors à Snejinka. Le prince jeta un coup d'œil surpris à l'étalon qu'Aldin saisit par la tête pour qu'il la regarde.

- Je sais Viggó, murmura-t-elle, ça fait peur. Tous les chevaux de Domhnall ont ça dans la bouche pour être conduits.

Emrys sortit sa jument de l'écurie et l'enfourcha avec adresse, se tournant vers Aldin.

- On y va ?

- On y va, répondit Aldin en saisissant son arc et ses flèches.

Elle enfourcha Viggó en amazone pour ne pas abîmer sa robe et leva le pouce en direction du jeune prince. Les deux jeunes gens partirent au trot et s'enfoncèrent doucement dans la forêt, qui faisait fourmiller la magie d'Aldin dans tout son corps. La jeune femme poussa un long soupir et un sourire joyeux étira ses lèvres. La forêt était vive, la chasse serait bonne.

Si bonne, qu'Emrys et Aldin chassèrent à eux deux un lapin, un sanglier et deux pigeons, en une demi-heure seulement. Ils arrivèrent dans une clairière traversée d'un ruisseau et décidèrent de faire une pause pour abreuver les chevaux. Aldin s'assit au pied d'un vieil arbre et Emrys vint s'installer près d'elle.

- Tu es sûre que tu ne veux pas me tutoyer ? demanda-t-il au bout de quelques secondes de silence.

- Je peux si tu y tiens tant que ça, sourit Aldin en dénouant sa tresse, mais je vais devoir montrer plus de distance devant les gens du Village.

- Pourquoi donc ?

- Parce que tu es un prince ! Ta présence ici est exceptionnelle, la familiarité dont je fais preuve pourrait être facilement prise pour un manque de respect à notre royal invité, dit-elle en appuyant le mot royal, un sourire ironique aux lèvres.

- Je vois...

Le prince resta un moment silencieux, observant avec attention les doigts agiles d'Aldin entrelacer les longues mèches de ses cheveux.

- Tu passes ton temps à défaire et à refaire cette tresse, j'ai l'impression.

- Ça me détend, répondit Aldin en renvoyant sa tresse dans son dos.

Le silence retomba entre les deux jeunes gens, mais aucun des deux ne parut le réaliser.

- Mais, dis-moi, demanda Aldin après avoir jeté un œil aux chevaux qui broutaient paisiblement l'herbe de la clairière, pourquoi es-tu venu voir Père, au juste ?

Emrys sembla hésiter un moment et Aldin regretta instantanément sa question.

- Pardon... Tu n'es pas obligé de répondre si tu ne le veux pas...

- Si, si... Je ne sais juste pas exactement comment expliquer...

Le prince hésita encore un instant avant de se tourner complètement vers Aldin.

- Tu as déjà fait des rêves prémonitoires ? Ou des rêves qui avaient l'air tellement vrais que tu n'es même plus sûre de savoir si c'était juste dans ta tête ?

- Ça m'est déjà arrivé une ou deux fois, acquiesça Aldin, mais c'est Père qui en fait le plus.

- Eh bien, c'est ce qui m'est arrivé. Une femme m'est apparue, elle était grande et mince, elle avait une tresse comme la tienne, sauf qu'elle arrivait jusqu'au sol... Elle avait une tunique brodée et des yeux incroyablement verts...

- Nivest, sourit Aldin.

- Je sais, répondit le prince, incroyable, pas vrai?

- Non ! répondit Aldin avec un éclat de rire. Je veux dire que tu as rencontré Nivest.

- Comment le sais-tu ? demanda Emrys, curieux.

- Père l'a rencontrée plusieurs fois en rêve et il a même peint son portrait, c'est pour ça. J'ai même une statuette à son effigie dans ma chambre.

- Elle m'a dit que ma vie allait changer, continua le prince, que j'avais une chance de racheter les fautes de mes ancêtres et que je devais aller voir le guérisseur du Village de Brühinald...

- Une chance de racheter les fautes... répéta Aldin en fronçant les sourcils. Tu sais de quelles fautes elle parlait ?

- Ton père a dit que ça devait avoir un rapport avec la stérilité magique dont a été victime feu le roi Cerunnos...

- Ça voudrait dire que sa maladie était une sorte de punition ?

- Je n'en sais fichtre rien, répondit Emrys en haussant les épaules. Mais j'ai le pressentiment qu'on va vite en savoir plus.

- ALDIN VESPERIS !!!

Emrys et Aldin se retournèrent d'un même mouvement pour voir un Sorin complètement hors de lui sauter de son cheval et arriver vers eux à grands pas. Il s'inclina jusqu'à terre devant le prince puis se tourna vers sa sœur, des éclairs dans les yeux et les mains tremblantes.

- Votre Altesse... ALDIN !!! Comment oses-tu gâcher le précieux temps du prince ? Et lui parler de façon aussi familière ? Jue rêve ou tu as oublié qui il est ? Faut-il encore te rappeller ton statut ?

- Sorin... commença Aldin d'une voix faible, je peux t'expliquer...

- C'est ma faute, l'interrompit Emrys calmement.

Sorin se figea sur place, la bouche formant un O parfait, et se tourna lentement vers le prince qui s'était levé.

- Aldin m'a sauvé la vie, m'a ramené à votre Village, m'a accepté dans sa classe deux fois de suite aujourd'hui... Malgré notre évidente différence de statut, ces évènements nous ont rapproché, et me permettent maintenant de considérer votre sœur comme mon amie, et de la traiter comme telle.

Aldin, toujours assise par terre entre les deux hommes, eut la subite impression que quelqu'un avait augmenté brusquement sa température corporelle. Emrys la voyait comme son amie... ?

Sorin, lui, était complètement abasourdi et avait l'air de vouloir former un son, sans en être capable. Il resta immobile quelques secondes, avec une expression faciale qui lui donnait un air de famille assez intéressant avec un poisson-lune, puis tourna les talons sans un mot, enfourcha son cheval et partit au galop sans un regard en arrière. Emrys se rassit avec un soupir.

- Parfois, être prince a du bon... dit-il avec un sourire amusé.

Aldin eut un rire gêné.

- Merci, en tous cas, dit-elle en se tournant vers le blond, tu m'as évité un sacré savon...

- C'est la moindre des choses ! s'exclama Emrys avec un grand rire.

Le jeune homme se releva et s'étira avant de tendre sa main gantée de blanc à Aldin.

- Tu viens ? Il serait temps qu'on reparte chasser, avant que la nuit ne soit tombée.

Aldin saisit sans hésiter la main qu'Emrys lui tendait avec un grand sourire. Les deux amis enfourchèrent leurs chevaux respectifs et, en un instant, il ne restait de leur présence que les traces de l'herbe jaunie sous le vieil arbre.

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