VIII : Les honneurs de la presse

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Chronologie :

2 mai 1998 : Bataille de Poudlard

31 décembre 2001 : Mariage de Ron et Hermione

26 décembre 2003 : Mariage de Harry et Ginny

20 juin 2004 : Election de Ron à la tête de la guilde de l'Artisanat magique

17 juillet 2005 : Naissance de James Sirius Potter

04 janvier 2006 : Naissance de Rose Weasley

25 juin 2006 : Naissance d'Albus Severus Potter

Période couverte par le chapitre : 4 avril – 5 mai 2007

Un soir de la semaine suivante, Harry finissait de se laver les dents en se demandant pourquoi Ginny ne montait pas se coucher, quand elle arriva enfin dans la salle de bains :

— Miffy m'a retenue à la cuisine pour me parler, annonça-t-elle. Elle voudrait se marier.

— Son séducteur des arrières-pièces ? s'enquit Harry en rinçant son verre à dents.

— Oui, toujours lui.

— Devons-nous donner notre accord ? s'étonna Harry. Je ne suis que son employeur.

— C'est Don Juan qui n'est pas libre et son propriétaire ne semble pas commode.

— Hermione n'a-t-elle pas prévu le cas ? Un propriétaire ne peut pas empêcher son elfe de se marier, si mes souvenirs sont bons.

— Tu sais bien qu'il y a une certaine résistance à cette loi et que les elfes qui n'osent pas demander de l'aide au ministère restent soumis au bon vouloir de leurs maîtres.

— Mon petit doigt me dit que c'est là que j'interviens, comprit Harry.

— D'après Miffy, son Cracky a peur de parler lui-même à son propriétaire, confirma son épouse. Il craint qu'il n'ait plus le droit de sortir s'il évoque le sujet. Je pense que le plus sûr pour nos deux amoureux serait que tu ailles toi-même demander la main du Casanova et que tu veilles à ce que les droits de cet elfe soient respectés.

— Bon, d'accord. Tu as le nom du propriétaire ?

— Non. Il faut qu'on le trouve nous-même.

— Miffy ne le connaît pas ?

— C'est compliqué. Son Roméo a l'impression que ce serait une trahison envers son maître que de nous le révéler et Miffy n'a donc pas le droit de le répéter. J'ai insisté, mais rien à faire. Tu sais comme les elfes peuvent être têtus quand ils s'y mettent !

— Je m'en occupe dès demain, promit Harry. Je suis certain que je vais avoir du succès au département des Créatures magiques quand je vais leur dire que je cherche le nom d'un propriétaire pour aller lui demander la main de son elfe !

*

Selon Hermione qui fit pour Harry une recherche dans les registres de son service, il y avait trois Cracky de référencés, mais un seul n'était ni trop jeune ni trop vieux pour correspondre à l'amoureux de Miffy. Elle résuma à Harry les textes applicables à la situation et lui fournit une copie des décrets en question.

Pour mettre toutes les chances de son côté – et de celui de Miffy –, Harry avait demandé à son amie de l'assister dans sa délicate démarche. Ils discutèrent de ce qu'ils devraient dire, et Harry envoya un hibou au propriétaire de l'amoureux pour solliciter un entretien. Il reçut une réponse dans la journée. L'effet Harry Potter, songea-t-il avec ironie. Trois jours plus tard, il frappait à la porte d'un manoir cossu dans le Norfolk.

— Harry Potter et Hermione Granger, indiqua l'Auror à l'elfe qui vint leur ouvrir. Nous avons rendez-vous avec Mr Owner.

La créature écarquilla les yeux et battit rapidement des paupières sous le coup de l'émotion, avant de les saluer si bas et si brusquement que Harry crut que sa tête allait heurter le carrelage. Puis il se redressa et partit pratiquement en courant.

— Quel regard séducteur ! chuchota Harry à Hermione. Je comprends que Miffy ait craqué.

Son amie se contenta de lui donner un coup de coude pour qu'il reprenne son sérieux. L'elfe revint et leur annonça d'une voix tremblante :

— Mr Owner vous attend.

— Merci, Cracky, répondit aimablement Hermione.

Ils se laissèrent mener jusqu'au salon où un homme d'une quarantaine d'années, visiblement sur son trente-et-un, se tenait.

— Je suis profondément honoré de recevoir deux héros sous mon toit, commença leur hôte. Puis-je vous proposer des rafraîchissements ?

— Nous ne voulons pas vous déranger, répondit Harry.

— Mais tout le plaisir est pour moi.

Il frappa dans ses mains et, une seconde plus tard, l'elfe s'était matérialisé sur le seuil de la porte :

— Le thé, signifia-t-il sèchement.

La créature salua – mais beaucoup moins bas que la première fois – avant de partir promptement. Harry et Hermione eurent juste le temps de s'asseoir avant son retour avec un plateau de boissons et de petits gâteaux sans doute préparés à l'avance.

Une fois que ses deux invités eurent les mains occupées par une tasse et une assiette, Mr Owner renvoya son elfe et demanda :

— Que puis-je faire pour vous ?

— Nous avons une requête à vous présenter à propos de votre elfe Cracky.

— Vous a-t-il fait du tort ? Comptez sur moi pour le lui faire regretter ! affirma Owner.

— Non, pas du tout ! protesta Harry. Il se trouve simplement que j'emploie une elfe femelle, prénommée Miffy, et qu'elle et votre serviteur souhaiteraient se marier.

Il fallut deux secondes à Owner pour comprendre de quoi il était question.

— Quels effrontés ! Ne vous inquiétez pas, Monsieur Potter, je vais y mettre bon ordre.

— Monsieur Potter n'a rien contre une telle union, intervint Hermione. D'ailleurs, ni lui ni vous ne pouvez vous y opposer.

Elle attendit que leur interlocuteur ait bien assimilé ses paroles avant de continuer :

— La loi vous fait en outre obligation de garantir au jeune couple un lieu d'habitation et des horaires de travail leur permettant d'avoir une vie de famille.

— Vous êtes sûre ? demanda Owner interloqué.

Ça, tu peux lui faire confiance, songea Harry goguenard. C'est elle qui l'a écrit.

Avant que la Loi de Protection des Elfes n'entre en vigueur, les propriétaires voyaient d'un œil tout à fait favorable les unions entre leurs petits serviteurs, car cela leur générait de nouveaux esclaves qui entraient de facto dans leur patrimoine. Désormais, les jeunes elfes étaient réputés libres, et leurs maîtres n'avaient plus intérêt à voir leurs créatures convoler et se reproduire. Pour pallier ce problème, Hermione avait fait passer des décrets qui obligeaient les propriétaires à garantir à leurs elfes mariés une vie de famille décente.

— Nous nous occupons de leur trouver un endroit pour vivre, indiqua généreusement Harry.

Il avait dans un premier temps pensé aménager une pièce chez lui pour le jeune couple mais Hermione l'avait mis en garde contre le risque d'héberger dans ses murs un elfe dont la loyauté allait à une personne qu'ils ne connaissaient pas. Il serait plus prudent de réserver pour les futurs mariés une chambre dans une résidence pour elfes. Harry avait souscrit à ce programme.

— Ah, très bien, balbutia Owner sous le choc.

— Nous vous avons apporté une copie de la loi, continua Harry. Nous ne voudrions pas que vous ayez des ennuis avec le ministère.

Le regard que lui jeta Owner était nettement moins amical qu'au début de leur visite.

— Je m'occuperai des formalités, proposa Harry imperturbable. Cela devrait être réglé d'ici quinze jours.

Laissant l'homme digérer toutes ces nouvelles, les deux visiteurs croquèrent un gâteau et terminèrent leur thé.

— Nous ne voulons pas vous déranger plus longtemps, dit Hermione avec son plus beau sourire.

Ils se levèrent et Cracky surgit à point nommé pour leur ouvrir la porte qui donnait sur le hall d'entrée. Alors qu'il les accompagnait vers la sortie, Harry et Hermione le félicitèrent pour sa prochaine union, sous l'œil torve de son maître.

Une fois sur le perron, ils se regardèrent.

— Ça ne s'est pas trop mal passé, jugea Hermione en prenant le chemin de la cheminée qui desservait ce lieu.

— Il n'avait pas l'air ravi, opposa Harry.

— Ce n'est pas la première fois que je fais ce genre de démarche, lui rappela son amie, et je me suis déjà fait insulter. Là, il s'est bien contrôlé.

— On ose insulter l'amie du Survivant ? s'étonna Harry qui était bien conscient que si Owner avait si peu protesté, c'était parce qu'il était impressionné par l'identité de ses invités.

— Ron et moi n'avons pas ta réputation, et les gens se comportent à peu près normalement en notre présence, analysa Hermione. Surtout quand on leur explique qu'un droit séculaire, transmis de génération en génération, vient de leur être retiré.

— Tu crois qu'il va faire du mal à Cracky ? s'inquiéta Harry.

— C'est possible, reconnut Hermione. Au mieux, ce pauvre elfe sera obligé de se punir pour les désagréments qu'il cause à son maître. On n'y peut rien Harry, soupira-t-elle tristement en voyant son air choqué. C'est déjà énorme d'avoir réussi à libérer la génération suivante. Je n'ai pas pu faire plus...

— Je sais que tu as fait un travail formidable, lui assura son ami. Lorsque je pense que tu avais déjà décidé de le faire quand tu avais quatorze ans, je trouve ça extraordinaire. Personne n'y croyait, mais tu l'as imposé et mis en œuvre.

— Toi aussi, tu n'as pas mal réussi, répliqua Hermione manifestement embarrassée par ce satisfecit.

— La différence, c'est que je n'ai pas eu le choix. Il s'est trouvé que c'était moi et personne d'autre, alors que toi... personne ne pensait qu'il y avait quelque chose à faire.

— Arrête Harry ! On ne va pas comparer nos combats, l'interrompit Hermione d'un ton amusé.

— Tu as raison, convint-il. Plus le temps passe, moins je fais le poids.

*

Quelques jours plus tard, Harry était sur les dents, car, à trop s'occuper des dossiers des autres, il en avait négligé un des siens qui devait être remis au Magenmagot avant la fin de la journée. Or un document important qui devait y être joint était introuvable. Avec Owen, il était donc en train de le rechercher fébrilement sur leurs bureaux accolés.

— T'as vu ce qu'ils ont écrit dans Sorcière-Hebdo ? demanda Seamus à Harry alors qu'il était en train de soulever son sous-main pour vérifier qu'il n'y avait rien de coincé dessous.

— J'ai une tête à lire Sorcière-Hebdo ? riposta distraitement Harry en déchiffrant la note qu'il avait retrouvée, mais qui ne correspondait pas à sa quête. Owen, j'ai notre commande de fourniture du mois dernier ! Pas étonnant qu'on n'ait rien reçu.

— Apporte-la tout de suite à Janice, suggéra Owen. Au moins, elle partira avec la prochaine fournée. Et excuse-toi auprès d'elle parce qu'il me semble que tu l'as accusée d'avoir perdu notre demande.

— Ouais, ça attendra qu'on ait retrouvé ce fichu papier, grommela Harry en reposant sa liste où il l'avait trouvée et en prenant son tiroir pour le vider sur son bureau.

— Dis, Harry, t'as lu Sorcière-Hebdo ? s'enquit une voix féminine alors que Harry vérifiait dans sa poubelle qu'il ne s'était pas débarrassé par erreur du précieux témoignage manquant.

— Bon sang, Demelza, je n'ai pas le temps pour les ragots aujourd'hui ! protesta-t-il.

— Mais c'est...

— Harry, interrompit Owen, tu es sûr de ne pas l'avoir joint au dossier Simpson qu'on a transmis hier à la Justice ?

— Tu as raison, c'est possible. Il doit encore être au greffe. Je vais voir tout de suite, décida Harry en partant précipitamment.

Il revint bredouille, un quart d'heure plus tard.

— Rien, soupira-t-il, mais j'ai obtenu un délai de vingt-quatre heures pour celui-ci. On va bien finir par trouver ce fichu...

Il s'interrompit quand Angelina se planta devant lui, le regard houleux, brandissant un magazine :

— Tu as vu ça ? demanda-t-elle.

— C'est si grave ? s'inquiéta enfin Harry.

En réponse, sa belle-sœur abattit avec force le journal sur le bureau de Harry, faisant trembler une pile branlante de documents qui oscillèrent dangereusement avant de glisser en cascade sur le sol. Harry ouvrit la bouche pour protester mais le titre qui s'étalait désormais sous ses yeux lui coupa le sifflet.

Hermione Granger-Weasley et Drago Malefoy : une passion dévorante, déchiffra-t-il incrédule.

Il se saisit de la publication et lut l'article, laissant échapper des grognements indignés. À en croire le texte, son amie donnait des rendez-vous galants à leur ancien ennemi dans son bureau depuis six mois. Ce qui pouvait se passer derrière la porte fermée avait manifestement excité l'imagination – et pas seulement l'imagination – de l'auteur. Arrivé à la fin, il chercha le nom du journaliste :

— Ink Watermann, grinça-t-il entre ses dents. J'aurais préféré que ce soit Rita Skeeter !

— Cette garce ? protesta Angelina.

— Au moins, j'ai barre sur elle, fit Harry avec pragmatisme, tandis que lui, je ne le connais pas. Son nom me dit quelque chose, mais je ne me souviens plus quoi.

— On va la voir ? demanda sa collègue en montrant du menton la direction approximative du bureau d'Hermione.

— Elle doit être au courant, elle est du genre à faire une revue de presse chaque jour. Non, celui qui m'inquiète, c'est Ron. Déjà qu'il n'aimait pas vraiment Malefoy avant...

Ils se regardèrent anxieusement : ce serait catastrophique pour la réputation du maître de guilde si celui-ci allait demander des comptes au séducteur présumé de son épouse. Harry flanqua le magazine dans la poubelle et lança un sort d'Incinération pour le faire définitivement disparaître.

Quand il eut terminé, son regard tomba sur le tas de papiers et de parchemins qui s'étaient écrasés au sol lorsque sa belle-sœur avait projeté le journal sur sa table de travail. Il se baissa, saisit un rouleau de parchemin froissé, exhumé par l'avalanche, et dit à Owen :

— C'est bon, j'ai trouvé ce fichu témoignage. Boucle le dossier et va le porter à la Justice. J'ai à faire.

— Je m'en occupe, lui assura son coéquipier qui avait entendu toute la conversation et comprenait l'urgence.

Les deux Aurors utilisèrent le réseau de Cheminette pour se rendre directement dans l'arrière-boutique des Sorciers Facétieux. George, Molly et Ginny – qui avait Albus sur les bras et surveillait James du regard – entouraient déjà le mari prétendument bafoué. Au sol, une marque noire indiquait que Harry n'avait pas été le seul à pratiquer l'autodafé.

— Ne fais pas de bêtise, dit Harry sans préambule. Ça lui ferait trop plaisir à ce Watermann.

— Je pense qu'on aurait dû lui faire sa fête dès la première fois, à ce journaleux, rétorqua Ron. Ça l'aurait dissuadé de recommencer.

— Enfin, Ron, il suffit de l'ignorer, et tout le monde oubliera ces idioties en quelques jours, dit Ginny du ton de quelqu'un qui se répète.

Tout en serrant contre lui son fils aîné qui lui avait sauté dans les bras, Harry se souvint que ce journaliste avait écrit un papier très désagréable sur Ginny, quelque temps après l'annonce officielle de leurs fiançailles.

— Je pense que tu ne devrais rien entreprendre sans en parler à Hermione, conseilla Harry. Elle aussi a son mot à dire dans l'histoire.

Les lèvres de Ron se serrèrent, comme pour retenir les mots qu'il brûlait de prononcer. Vu le déplaisir qu'il éprouvait déjà les semaines précédentes à savoir son épouse travailler de concert avec le fabricant de potion, on pouvait imaginer ce qu'il avait envie de formuler. Harry ne pouvait pas vraiment lui donner tort : la fréquentation de Malefoy ne leur apportait effectivement que des ennuis.

— De deux choses l'une, fit remarquer Harry dans un esprit d'apaisement. Soit tu te fiches complètement de ce que ce plumitif peut raconter – après tout nous savons qu'il met n'importe quoi dans ses articles –, et toi et Hermione faites comme si de rien n'était, sans rien changer à vos projets. Soit tu brûles de prouver publiquement que ta femme est fidèle et tu montres à tous que tout va bien entre vous. Je suppose qu'on ne peut pas envisager que tu rencontres Malefoy sans lui taper dessus...

— Je vais montrer à ce connard de quel bois je me chauffe, oui !

— Ron, je ne t'ai pas appris à t'exprimer ainsi, protesta Molly.

— Pas devant les enfants, ajouta Ginny.

— Si tu lui casses la figure, les gens vont croire que ce que dit l'article est vrai, souligna prosaïquement Angelina.

— Hermione ne te le pardonnera jamais, compléta Harry.

— Vous avez raison et je vous déteste, répliqua Ron.

La porte de la pièce s'ouvrit et laissa passer Bill et Hermione.

— Je vois que tout le monde était au courant avant moi, fit remarquer Hermione d'un air pincé. Si Bill n'était pas venu me prévenir, je serais la seule à ignorer que mon nom se trouve en première page de... ce torchon !

Elle considéra le tas de cendres qui noircissait le plancher et grimaça, y mesurant sans doute l'étendue de la colère de Ron.

— À la troisième personne qui m'a demandé si j'avais lu Sorcière-Hebdo, j'ai arrêté de dire que je n'étais pas du genre à lire un magazine de bonne femme et j'ai commencé à me dire qu'il fallait peut-être que j'y jette un coup d'œil, expliqua Bill.

— Parce que tes collègues achètent Sorcière-Hebdo ? s'étonna Ginny. Je les aurais plutôt vus fantasmer sur Miracles et Malicieux Maléfices, moi.

— Visiblement, l'un n'empêche pas l'autre, commenta Bill.

— Bon, coupa Hermione, en ce qui me concerne, ils peuvent raconter ce qu'ils veulent. Vu le niveau de leurs articles, je ne me sens même pas attaquée. Mais je suppose que tu n'es pas d'accord pour laisser couler, fit-elle à son mari.

— Ça fait désordre, répondit Ron dans un effort méritoire de concision et de modération.

— Pourquoi ne pas demander à être interviewée et démentir cette rumeur ? suggéra Angelina.

— Oui, comme pour l'article sur ce qui s'était passé dans le cimetière avec Voldemort, renchérit Harry.

— Et puis quoi encore ! contra Hermione. Enfin ! Savoir si je couche ou non avec Malefoy n'est pas ce qu'on appelle une information capitale, tout de même !

— C'en est devenu une, fit remarquer Ron. Je suppose que cela va être le grand sujet de conversation ces jours-ci.

Hermione hocha la tête, considérant manifestement que son mari n'exagérait pas. Les sorciers adoraient les potins.

— Convoquer des journalistes pour en discuter serait donner à l'article une importance qu'il ne mérite pas, opposa-t-elle cependant.

— Alors, on laisse courir ? fit Ron d'une voix coléreuse.

— Je suppose que non, convint Hermione pour le calmer. Mais on peut agir de façon plus subtile. On pourrait déjeuner dans un restaurant avec Dra... Malefoy et sa femme, par exemple.

— Je n'ai pas spécialement envie de parler à la fouine, fit sèchement Ron. La dernière fois que je l'ai croisé, il tentait de nous carboniser. J'attends toujours qu'il me remercie de lui avoir sauvé la vie ce jour-là. Je te le répète, Harry, on aurait dû le laisser crever.

Personne ne rappela à Ron la chance que le fabricant de potions représentait pour les loups-garous. Il ne l'ignorait pas, et ce n'était pas le moment d'y faire allusion.

— Si jamais tu le croises, je t'en supplie, ne fais rien d'inconsidéré, précisa quand même Hermione. Inutile de confirmer la rumeur.

— C'est bon, j'ai compris, je ne suis pas idiot, cracha Ron. Mais je ne veux pas lui parler et encore moins lui serrer la main, c'est clair ?

— C'est clair, dit Hermione en se rapprochant de lui et l'enlaçant. On va trouver une autre solution, promis.

Pendant qu'ils se serraient l'un contre l'autre sous les yeux rassurés de la famille, Angelina proposa :

— Hermione, pourquoi ne rencontrerais-tu pas la femme de Malefoy en tête à tête ? Cela aurait le mérite de permettre une explication entre vous. Elle est concernée par cette affaire, elle aussi, non ?

— Tu es d'accord, Ron ? demanda Hermione après avoir considéré l'option.

— Si tu penses que c'est le mieux, lui répondit son mari, je te fais confiance.

*

Ron passa le lendemain chez Harry et Ginny pour les mettre au courant des derniers rebondissements de l'affaire :

— Hermione a envoyé un hibou à la femme de Malefoy qui lui a signifié son accord sur la rencontre, mais a suggéré qu'elles fassent les magasins, plutôt que manger ensemble. Je ne vous dis pas la tête d'Hermione quand elle a lu ça. Vous savez qu'elle déteste faire ce genre de chose. Mais elle n'était pas en position de discuter et elle a accepté. Ça se fera demain dans l'après-midi.

Au ton de Ron, on sentait qu'il n'était pas mécontent que sa femme se voie forcée de faire une activité qu'elle n'appréciait pas.

— Ce n'est pas marrant quand la presse te traîne dans la boue, fit Harry avec compréhension.

— Je suppose que ce ne serait grave que si c'était la vérité, fit Ron avec la volonté de prendre du recul.

— Ça m'agacerait de lire dans le journal que Harry m'est infidèle, reconnut Ginny. Mais ce ne doit pas être agréable pour Hermione non plus. Imagine les regards qu'elle doit supporter au ministère.

— Imagine ceux que j'ai eus toute la journée à la boutique, rétorqua son frère. Les gens sont des vautours.

— Bienvenue au club, fit Harry.

— C'est vrai qu'ils s'en sont pris à toi quand tu avais quatorze ans, se remémora Ron.

— Ils s'étaient attaqués à Hermione, aussi, lui rappela sa sœur. Je suppose qu'avec le temps, on devrait être au-dessus de ça.

— J'ai l'impression que c'est le cas pour Hermione, remarqua Ron. Je sais que c'est pour moi qu'elle va aller voir la femme de Malefoy. Elle se fiche complètement de ce qu'on peut écrire sur elle.

À son ton, on sentait qu'il était loin d'avoir atteint une telle indifférence.

*

Le lendemain soir, après avoir couché les enfants, Ginny et Harry se rendirent chez les Granger-Weasley pour savoir comment s'était passée la journée d'Hermione avec Astoria Malefoy.

— Astoria est très sympa, commenta leur amie. Pas du tout conservatrice. Elle a une bonne connaissance du monde moldu.

— C'est étrange que Malefoy l'ait épousée, remarqua Ginny.

— Ce serait étrange s'il n'avait pas changé, analysa Hermione. Il a retenu certaines leçons des évènements d'il y a neuf ans.

— Ne me dis pas qu'il est devenu charmant ! grogna son mari.

— Il a encore des côtés énervants, admit Hermione avec diplomatie, mais il a revu ses idées sur la pureté du sang.

— Raconte un peu ton après-midi, la pressa Harry.

— On s'est retrouvées devant Gringotts et j'ai proposé d'aller chez Fleury et Bott. Elle a accepté et on a commencé à échanger des politesses en passant dans les rayons. Je peux vous dire que les gens nous regardaient en coin.

— Tu m'étonnes, ils auront de quoi cancaner ce soir ! soupira Ron.

— Elle a pris un livre que, justement, j'avais acheté la semaine dernière. Du coup, on en a discuté et je me suis rendu compte qu'elle n'est pas bête du tout et plutôt cultivée. C'était vraiment très sympa. On a passé l'heure d'après à parler littérature et faire notre choix dans la boutique.

En illustration, Ron montra du doigt deux grands sacs en papier qui contenaient les ouvrages qu'elle avait acquis.

— On a ensuite regardé les vitrines du Chemin de Traverse, continua Hermione. Oh, je ne vous ai pas dit, mais elle était en Moldue sous sa cape. Et des vêtements tout ce qu'il y a de moulants. Je ne sais pas si c'est sa façon de s'habiller de tous les jours ou un message pour me faire comprendre qu'elle a tout ce qu'il faut pour garder son mari.

— Comme si on en voulait, de son mari, fit Ron d'une voix dédaigneuse.

— Au bout de deux heures, continua Hermione, on a commencé à fatiguer. Du coup on est allées prendre un thé. Évidemment, nous étions le point de mire de la salle. Mais, s'ils s'attendaient à nous voir nous crêper le chignon, ils en ont été pour leurs frais. Elle a beaucoup d'humour et on a beaucoup ri.

— Autant pour Watermann, ricana Ginny. On devrait le remercier, non ? Grâce à lui, Hermione s'est fait une nouvelle amie.

— Sans aller jusque là, fit Hermione, je suis moins surprise de la façon respectueuse dont les elfes sont traités par Malefoy. Elle a une conception humaniste des rapports que nous devons avoir avec les êtres pensants.

— C'est sûr que pour épouser Malefoy, il faut avoir une vision très large de l'humanité, insista Ron.

— J'en ai profité pour lui demander comment son mari en était venu à fabriquer de la potion Tue-loup, continua Hermione sans faire mine d'entendre le sien. Elle m'a expliqué qu'à cause de son passé il avait eu du mal à trouver un travail en sortant de Poudlard et qu'il a finalement décidé de s'installer à son compte. À ce moment, il a été contacté par une personne qui a voulu garder l'anonymat, mais qui lui proposait de l'aider financièrement s'il le fournissait en potion Tue-Loup. Astoria pense que c'est quelqu'un en vue qui venait d'être mordu et désirait le cacher. Quoi qu'il en soit, cela a aidé Malefoy à se lancer, et la potion pour les loups-garous est devenue son produit phare.

— C'est dingue parfois la vie, commenta Ginny.

— Oui, certains s'en tirent mieux qu'ils ne le méritent, jugea Ron.

— Bref, je pense avoir fait ce qu'il faut pour couper court à la rumeur, conclut Hermione.

— Si cela suffisait pour faire taire tous ceux qui prennent plaisir à nous critiquer parce que nous sommes connus et avons des postes prestigieux, ce serait trop beau, fit Ron d'une voix sarcastique.

— Je ne vais pas arrêter de travailler et me terrer chez moi juste pour que les mauvaises langues n'inventent pas de saletés sur moi, lui rétorqua Hermione. Je ne vais pas laisser tomber les loups-garous et les elfes parce que ce que j'essaie d'obtenir pour eux ne plaît pas à certains sorciers, et qu'ils sont prêts à aller jusqu'à la calomnie pour me pourrir la vie. Pas plus que tu ne vas renoncer à ton statut de maître de guilde car cela t'oblige à prendre des décisions qui te génèrent des ennemis.

— Dans l'histoire, ce n'est pas toi qui es la plus touchée, riposta Ron les dents serrées.

— C'est vrai ! Je ne passe que pour une femme infidèle incapable de travailler avec un homme sans se laisser séduire, lui fit remarquer Hermione.

— Et moi, pour un imbécile incapable de...

Il s'interrompit, le visage rouge.

— De quoi ? De contrôler sa femme ? termina Hermione pour lui. J'espère bien !

— Ce n'est pas...

— Si, c'est ce que tu voulais dire. Je t'ai épousé parce que je pensais que tu étais un peu plus évolué que ça, mais je vois que je me suis trompée.

— Tu sais bien...

— Ce que je sais, c'est que depuis que cet article stupide est paru, tu te sens humilié pour une chose qui n'est pas arrivée et que tu te complais dans ton honneur de mâle blessé.

— Parce que, bien sûr, à toi, ça te serait égal si tout le monde racontait que j'ai une maîtresse !

— Je serais agacée par l'idiotie des gens, mais ce n'est sûrement pas à toi que j'en voudrais !

— Enfin, Hermione, intervint Harry, tu peux quand même admettre que la situation est difficile pour Ron. Ce n'est pas agréable pour lui de savoir qu'on rit dans son dos.

— Les gens rient aussi dans mon dos, mais c'est quand même à moi qu'on fait des reproches. C'est à moi d'arranger les choses parce que Ron considère que c'est ma faute si ce journaliste a voulu faire une bonne feuille à mes dépens.

— C'est quand même toi qui t'es affichée avec Malefoy ! rappela son mari.

— Je ne me suis pas affichée, on a travaillé au ministère ! cria Hermione. Il a aussi travaillé avec Hestia Jones, mais elle n'est pas l'épouse d'un maître de guilde, alors ce n'est pas drôle de tenter de ruiner sa réputation.

— C'est ma faute, maintenant ! s'offusqua Ron.

— Mais arrêtez, tous les deux, c'est la faute du journaliste et des imbéciles qui le lisent, c'est tout, coupa Ginny. C'est humiliant pour vous deux, d'accord, mais ce n'est pas la première fois qu'on nous fait le coup. Vous lui faites vraiment trop d'honneur en vous disputant pour ça.

Cela ne sembla pas suffisant pour calmer les deux époux.

— Ron, tu pourrais quand même remercier Hermione d'avoir été tout l'après-midi avec la femme de Malefoy pour arranger les choses, insista Ginny.

— Je n'ai pas l'impression qu'elle a passé un mauvais moment, opposa Ron, boudeur.

— C'est sûr, j'adore me montrer en spectacle, commenta Hermione d'une voix agacée. C'est exactement l'idée que je me fais d'une rencontre avec une amie !

— En tout cas, c'était gentil de la part de la femme de Malefoy de se plier à cette petite mise en scène alors qu'elle aurait pu prétendre que ce n'était pas sa faute et laisser son mari se dépatouiller tout seul, continua Ginny.

— Je suis certaine que, elle, on ne l'a pas accueillie en faisant la tête, ajouta perfidement Hermione.

— Harry, dis quelque chose, supplia Ron, qui sentait qu'il était mal parti avec sa femme et sa sœur se liguant contre lui.

— Elles sont persuadées que tu as tort, excuse-toi, qu'on en finisse, conseilla Harry avec pragmatisme.

En définitive, Hermione se contenta d'un soupir de Ron et, soulagés d'avoir vidé leur sac, ils se regardèrent en dessous, manifestement désireux de mettre fin à leur dispute. Harry et Ginny décidèrent que c'était le moment de partir.

*

— Que ferais-tu si on écrivait sur moi comme sur Hermione, demanda Ginny, plus tard, alors qu'ils se préparaient à dormir.

— Mhm, je ne sais pas, répondit Harry en retapant son oreiller. Je casserais la gueule au journaliste, j'exigerais que tu ne sortes plus de la maison et je provoquerais en duel tous ceux qui ont l'air de rigoler sur mon passage, pourquoi ?

— Je suis sérieuse, assura Ginny sans pouvoir s'empêcher de sourire.

— Qu'est-ce que tu voudrais que je fasse ? Je noterais qui sont mes véritables amis et j'attendrais qu'un autre scandale chasse celui-là, je suppose. Comme la dernière fois et la fois d'avant. Et toi ? retourna-t-il la question en se tournant vers elle et s'accoudant pour la regarder. Qu'est-ce que tu ferais si on me créditait d'une maîtresse ?

— Eh bien... je pense que j'irais la voir et je m'arrangerais pour que tout le monde m'entende la plaindre d'être malmenée par la presse, répondit-elle en lui caressant la joue. Et lorsqu'on serait vraiment entre nous, je lui rappellerais que j'ai fait partie de l'armée de Dumbledore, que j'ai survécu à des combats contre les Mangemorts et que je ne suis pas très partageuse quand il s'agit de mon mari.

— Ce ne serait pas très charitable pour ma supposée petite amie, remarqua Harry en tournant la tête pour embrasser sa main. Il me semblait que nous étions dans l'hypothèse d'une accusation sans fondement.

— Justement, le but de l'opération serait qu'elle reste sans fondement, expliqua-t-elle en agrippant la nuque de Harry pour l'attirer vers elle.

— Ouais, tu serais aussi jalouse et vexée que Ron, même en sachant que les accusations sont infondées, analysa Harry les lèvres tout contre celles de sa femme.

— Maintenant que tu l'as compris, tu n'as plus qu'à t'arranger pour que cette mésaventure ne t'arrive jamais, conclut Ginny en comblant ce qui restait d'espace entre eux.

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Owner : signifie propriétaire en anglais


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