IX : Prêcher la bonne parole

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2 mai 1998 : Bataille de Poudlard

31 décembre 2001 : Mariage de Ron et Hermione

26 décembre 2003 : Mariage de Harry et Ginny

20 juin 2004 : Election de Ron à la tête de la guilde de l'Artisanat magique

17 juillet 2005 : Naissance de James Sirius Potter

04 janvier 2006 : Naissance de Rose Weasley

25 juin 2006 : Naissance d'Albus Severus Potter

Période couverte par le chapitre : 13 mai au 17 juillet 2007

Au milieu du mois de mai, Harry alla voir Hermione :

— Je viens de lire l'article de La Gazette sur la nouvelle potion Tue-loup, indiqua-t-il en entrant dans son bureau.

— Bonjour Harry. Tu veux bien fermer la porte ?

— Je pensais qu'une telle nouvelle justifierait un titre en première page, s'étonna-t-il en s'exécutant. Et j'ai trouvé étrange leur insistance à préciser que c'était un simple traitement, pas une guérison. N'ont-ils pas compris ce que peut représenter pour les loups-garous la perspective de ne jamais plus se transformer de leur vie ?

— Ce n'est pas une question de compréhension, commenta Hermione d'un ton amer en se levant et entreprenant de marcher de long en large. Faire remarquer que les lycanthropes peuvent vivre désormais comme tout le monde obligerait à reconsidérer la façon dont ils sont traités. Visiblement, personne ne le souhaite dans les rédactions.

— Et le père de Luna, demanda Harry. Tu veux que Ginny lui en touche un mot ?

— Merci, mais je suis déjà allée le voir. Son papier sortira la semaine prochaine. Le problème est que sa publication n'est pas considérée comme source d'informations fiable, et ce n'est pas comme ça que nous aurons le débat de société dont nous avons besoin.

— Et pourquoi n'écris-tu pas toi-même un article que tu demanderais aux journaux de faire paraître ? proposa Harry.

— Je n'en ai pas le droit !

Hermione baissa le ton et précisa :

— C'est ma cheffe qui a décidé ce que nous devions transmettre à la presse.

— Hestia Jones ? Mais pourquoi n'en a-t-elle pas profité pour réhabiliter les loups-garous ? s'étonna Harry qui avait un bon souvenir de son garde du corps de ses quinze ans.

Hermione laissa passer plusieurs secondes avant de répondre enfin :

— Elle pense qu'il n'est pas souhaitable que nous communiquions en ce sens à ce stade de l'opération. Elle m'a opposé que, pour le moment, leur situation est toujours la même et que nous en reparlerons quand la potion sera distribuée à grande échelle.

— Ce n'est pas encore le cas ?

— Pour le moment, seul Drago est en capacité d'en créer. Même s'il a eu le droit de commercialiser sa potion tout de suite, seule une portion de ceux qui en ont besoin peut être traitée à ce jour. Il va falloir encore plusieurs semaines pour que les laboratoires de potions agréés par la guilde soient en mesure d'offrir suffisamment de doses pour traiter toute notre population.

— Tant que ça ? s'étonna Harry.

— C'est une préparation très délicate et il va falloir former des elfes pour l'exécuter. Personnellement, j'ajouterais qu'il faudra aussi former des sorciers pour accepter de travailler avec les elfes. C'est un point qui n'est pas simple à gérer non plus.

Hermione avait l'air un peu démoralisée par le chemin qui restait à accomplir.

— C'est déjà une grande avancée, lui dit gentiment Harry pour la réconforter. Même s'il te faut encore plusieurs mois pour arriver au bout, qu'est-ce que c'est en regard de toute la souffrance que tu vas éviter aux loups-garous les prochaines années ?

Hermione sourit bravement, et Harry repartit vers le QG des Aurors.

*

De son côté, il ne chômait pas. Avec l'aide de Primrose Dagworth et Michael Corner, il avait fait le tour de tous les dossiers en cours d'élaboration ou de jugement et avait proposé des améliorations. La plupart du temps, tout s'était bien passé. Ses collègues avaient continué à maugréer contre la nouvelle loi, mais avaient fait montre de bonne volonté pour s'y adapter. La plupart d'entre eux appréciaient Shacklebolt, et cela limitait les épanchements négatifs de leur part. Harry s'était d'ailleurs demandé dans quelle mesure une telle évolution aurait été acceptée si celui qui était à la tête du ministère n'avait pas été un ancien Auror.

Tout cependant ne s'était pas passé sans peine. Certains dossiers étaient irrécupérables. Les faits étaient trop anciens pour être étayés dans les formes, certains éléments ayant été irrémédiablement perdus ou oubliés, faute d'avoir été consignés avec soin. Heureusement, ils n'étaient pas les seuls à avoir besoin d'un temps d'adaptation pour être en résonnance avec les nouvelles procédures. Les juges-mages du Magenmagot devaient, eux aussi, faire évoluer leur manière de travailler. Ils n'exigeaient pas toujours des preuves dans les règles et restants très sensibles au prestige des Aurors.

D'après Susan, cette résistance à la loi récente était surtout due au fait que les avocats n'avaient pas encore pris la mesure des pouvoirs qui étaient les leurs. Quand ils comprendraient qu'une preuve mal étayée pouvait leur permettre de faire libérer leur client en appel, ils utiliseraient cette possibilité de façon plus systématique dans les cas douteux. Quant aux juges, ils rectifieraient le tir pour ne pas être désavoués, et les Aurors commenceraient à perdre les dossiers se basant uniquement sur leur parole.

Harry savait que cette prise de conscience était proche car plusieurs des dossiers les plus mal ficelés avaient été saisis d'appel et leur passage devant les formations judiciaires correspondantes était imminent. Il avait d'ailleurs fait de son mieux pour présenter les affaires bancales le plus vite possible, afin de profiter du délai d'application des textes. Il avait par ailleurs admis que certains dossiers étaient irrécupérables, et n'avait pu que préparer ses collègues à l'inéluctable.

D'autres lui avaient laissé un goût amer dans la bouche car ils auraient pu être mis aux normes si seulement les enquêteurs qui s'en étaient chargé avaient bien voulu faire un effort. La mauvaise volonté de Cyprien Muldoon n'avait pas été une surprise. Harry avait pensé lui envoyer Primrose, mais il savait que celle-ci avait un défaut majeur aux yeux de l'irascible Auror : elle était une femme. Michael était trop jeune pour être pris au sérieux et il avait donc décidé que c'était à lui de s'y coller. Il ne s'était pas fait trop d'illusions sur sa réussite, mais il se devait au moins essayer.

En fait, si cela avait été désagréable, cela n'avait pas duré très longtemps. Dès que Harry s'était approché de son bureau et avait proposé de jeter un regard sur ses dossiers en cours, Muldoon avait lancé sèchement :

— Va faire joujou ailleurs, gamin. Tu faisais encore dans ta couche quand j'ai commencé à bosser, alors je n'ai pas besoin de toi, surtout si c'est pour me dire comment laisser sortir les salauds de prison.

Harry n'avait pas tenté de le convaincre. Il s'était contenté de cocher les dossiers correspondants sur sa liste pour indiquer qu'il n'avait plus à s'en occuper. En l'état, ses enquêtes couraient sans doute à la catastrophe, mais manifestement certaines leçons devaient être apprises dans la douleur.

Avant de repartir, il avait jeté un regard vers Christopher Summers, le coéquipier de Muldoon, et avait constaté qu'il avait l'air sérieusement choqué par la façon dont le Survivant s'était fait rembarrer. Harry avait détourné les yeux pour ne pas l'obliger à faire un choix entre lui et son partenaire. Cela n'apporterait rien à personne. Il nota dans un coin de sa tête que Summers n'était pas nécessairement un ennemi.

D'autres réticences l'avaient pris davantage par surprise. Hilliard Hobday, entre autres, bien que l'esprit ouvert par ailleurs, n'avait pas réussi à accepter les nouvelles règles du jeu et avait montré une mauvaise volonté évidente à se plier à la méthode préconisée. Sa façon de regretter les moments où les Aurors s'étaient vus octroyer des pouvoirs exorbitants pour lutter plus efficacement contre les Mangemorts avait tendance à taper sur les nerfs de Harry, qui devait prendre sur lui pour ne pas lui demander d'arrêter d'idéaliser le bon vieux temps. Les séances de travail auraient pu mal tourner si leur pratique commune du Quidditch ne leur avait permis de nouer des liens de confiance et de respect mutuel.

Vince Oldrige, le partenaire de Vicky Frobisher – jeune femme qui était de la promotion de Harry –, avait fait preuve une animosité inattendue. Harry n'avait pu déterminer si c'était un sentiment latent depuis son arrivée dans la brigade, ou si c'était uniquement dû au rôle qu'il jouait dans l'évolution de leurs méthodes de travail.

Harry avait scrupuleusement noté le résultat de ses interventions à l'attention de son commandant. Il avait pris soin de rester le plus neutre et le plus professionnel possible et de ne pas reporter les remarques personnelles qu'il avait parfois dû essuyer. Il estimait qu'elles étaient de son ressort, et que son chef n'avait pas à les gérer. Il avait cependant indiqué avec précision les dossiers qui avaient été soustraits à son expertise et ceux où ses conseils n'avaient pas été suivis. Il avait également listé ceux pour lesquels il n'avait rien pu faire. Il ne voulait pas qu'on puisse lui reprocher des échecs qui n'étaient pas de son fait.

Faucett était, lui aussi, resté très sobre dans ses appréciations. Il avait suivi de près les décisions rendues sous l'empire de la nouvelle loi. Le Magenmagot n'avait pas encore établi ses quartiers dans les locaux prévus pour lui et les audiences se tenaient toujours au ministère de la Magie. Harry avait vu son commandant en pleine discussion avec son homologue de la police magique, Tiern Watchover, à la sortie des salles de jugements. Harry avait espéré que cela présageait une collaboration entre les deux services.

Harry avait en outre accueilli trois policiers lors de ses séances d'entraînement du samedi matin. La veille de la première leçon, ils étaient venus se présenter à leur formateur. Harry avait été un peu déçu de ne pas retrouver son brigadier préféré dans le groupe, mais il était conscient que c'était mieux ainsi : c'était avec toute la brigade de police qu'il tentait d'améliorer les relations, pas seulement avec celui qu'il appréciait déjà. Il avait donc fait la connaissance des agents Morris Lynch, Fingall Shively et Moira Dukelow. Quand ils s'étaient présentés, il avait été heureusement surpris de voir une femme parmi eux. En son for intérieur, il accorda un bon point à Watchover pour cette désignation non sexiste.

Ils s'étaient donné rendez-vous le samedi dans l'atrium du ministère, et Harry les avait fait transplaner sur leur terrain d'entraînement. Ils avaient été dévisagés avec suspicion par les autres participants, mais Harry les avait rapidement intégrés dans un groupe et, dans le feu de l'action, ils avaient su faire oublier leur appartenance à un corps concurrent. D'ailleurs en les gardant à l'œil pour voir s'ils suivaient bien, Harry nota que, si leurs sorts étaient bien moins puissants que ceux des Aurors, ils étaient meilleurs dans l'art d'utiliser le terrain à leur avantage. Cela n'échappa pas non plus à Janice qui le fit remarquer aux autres et tira parti de leur expérience.

Conformément aux consignes de son commandant, Harry ne les intégra pas dans les groupes qui apprenaient à repousser les sortilèges les plus offensifs. Les trois policiers d'ailleurs ne tentèrent pas d'espionner les sessions dont ils étaient exclus, se concentrant sur celles où ils pouvaient se perfectionner en défense.

Au bout des trois mois convenus, les trois élèves temporaires remercièrent Harry et Janice pour leurs conseils. Les deux Aurors leur donnèrent des consignes supplémentaires pour qu'ils puissent organiser leurs propres sessions, et tout le monde se quitta en excellents termes.

— Tu ne crois pas que si on s'entraînait tous ensemble de manière plus systématique, les relations entre nos deux services seraient meilleures ? demanda Harry à Janice quand les policiers furent repartis.

— Ça te tient à cœur, ça, remarqua sa collègue.

— Oui, reconnut Harry. Je trouve inacceptable la façon dont certains Aurors les considèrent. D'accord, nous on se bat contre la magie noire et on traite les crimes de sang, mais leur travail est aussi essentiel et comporte de gros risques. Il n'est pas normal que certains d'entre nous les prennent pour des larbins.

— Et tu penses que les intégrer dans nos séances d'entraînement améliorera ça ? Peut-être, reconnut Janice après un instant de réflexion. La question est de savoir si ce sera réellement un avantage pour nous.

— S'ils peuvent mieux se défendre contre ceux qu'ils tentent d'arrêter, notre petit avantage de service entre-t-il nécessairement en jeu ? interrogea Harry.

— Pour la plupart d'entre nous, oui, confirma Janice. Je sais, répondit-elle au mouvement d'humeur de Harry, tu es profondément égalitaire, mais la plupart d'entre nous ne le sont pas et sont prêts à se battre pour préserver leur échelle de valeurs. Donne-toi un peu plus de temps avant de faire la révolution, d'accord ?

Harry hocha la tête pour montrer qu'il se rangeait aux arguments de sa collègue. Après tout, même Hermione admettait qu'il faudrait une génération entière pour changer l'opinion des gens sur les créatures magiques.

*

Le dimanche 1er juillet, Hermione arriva au Terrier, l'air exténué.

— Encore des problèmes ? compatit Ginny quand elle se laissa tomber sur le banc du jardin où ils prenaient l'apéritif.

— Ne m'en parle pas. Je pensais qu'une fois que nous aurions obtenu une potion Tue-loup stable, réglé les problèmes de production et de droits, et que la nouvelle serait connue, nous serions au bout de nos peines, mais c'est de pire en pire.

— J'ai lu les réactions dans la presse, commenta Angelina. J'ai vu que, même les sachant sous traitement, beaucoup de sorciers répugnent à oublier que ces personnes sont potentiellement des loups-garous.

— On n'en est plus là, gémit Hermione. Le problème est de convaincre les loups-garous de se traiter !

— Ils ne veulent pas ? s'étonna George.

— Pas tous. J'ai l'impression que les clients de Drago sont les moins réfractaires. Ils lui font confiance, maintenant, parce que cela fait des mois qu'ils se fournissent chez lui et sont satisfaits du résultat. Par contre, beaucoup d'autres craignent que le ministère ne cherche à les tromper, voire à les éliminer, avec cette potion.

— C'est délirant ! s'exclama Bill.

— Compte tenu des lois qui ont été votées contre eux par nos prédécesseurs, dont certaines ne sont toujours pas abrogées, on peut comprendre leur défiance. Mais le pire est que la mort de Wulf Lukos, le prisonnier qui a été victime de la première version de la préparation, a filtré et cela alimente la rumeur selon laquelle cette potion est en réalité un poison destiné à mettre fin de façon définitive.

— Et qu'allez-vous faire ? demanda Harry atterré.

— C'est bien là que le bât blesse. Moi, j'ai recommandé qu'on laisse les loups-garous se charger eux-mêmes de la promotion du produit. Entre eux, ils se font davantage confiance, c'est d'ailleurs comme ça que Drago s'est constitué sa clientèle. Mais personne ne m'écoute, et on se dirige vers une loi qui les obligerait à en prendre, faute de quoi ils seront emprisonnés et traités de force.

— Leur administrer la potion au moins une fois serait une façon efficace de les convaincre, jugea Ginny, mais je doute qu'Azkaban soit le meilleur endroit pour ça.

— Cette manière de procéder ne ferait que conforter l'idée que les intentions du ministère sont douteuses et ils seront encore plus méfiants à son égard. Je ne serais pas surprise qu'une grande partie d'entre eux ne se présente plus pour se faire contrôler, de peur d'être arrêtés et empoisonnés.

Ils se regardèrent, bouleversés par la façon dont la situation était en train d'évoluer.

— Et si des loups-garous qui ont pris le produit témoignaient dans la presse ? proposa Ginny.

— Les réfractaires penseraient que l'article a été écrit sur commande à des fins de propagande, rétorqua Hermione. Ce ne serait pas la première fois. Non, la meilleure façon de procéder était de laisser faire le bouche-à-oreille, sans intervention brutale.

— Mais qui a pris la décision de faire autrement ? s'enquit Fleur.

— Mon service.

— C'est à dire ?

— Hestia Jones, ma supérieure.

— Et Kingsley est d'accord ? s'enquit Molly en fronçant les sourcils.

— Kingsley écoute ses chefs de service, expliqua Percy. C'est lui qui les a choisis et leur a demandé de se spécialiser parce qu'il ne peut pas tout savoir sur tout. Si Hestia lui affirme que c'est la meilleure solution, il ne peut que la suivre... ou la démettre. Par contre, si un texte en ce sens nous est présenté au Conseil des chefs de département, tu peux compter sur mon père et moi pour voter contre, lui assura-t-il avec force en regardant Bill qui écoutait la conversation sans paraître désirer intervenir.

— J'en toucherai également un mot à Sturgis Podmore de la Justice magique, compléta Arthur. Je pense qu'il sera sensible à nos arguments.

— Et puis, il n'y a pas que ça, continua Hermione. Maintenant que tous les sorciers savent que cette potion existe, ils risquent de ne pas comprendre qu'on ne protège pas la population en obligeant tous les loups-garous à la prendre. Kingsley ne peut pas dire qu'il refuse de les forcer à se traiter parce qu'il craint qu'ils ne lui obéissent pas. Se glorifier d'avoir mis au point cette potion était une erreur. Il aurait fallu la mettre en vente par les canaux habituels et la laisser se répandre chez les loups-garous pour qu'ils puissent, par eux-mêmes, démontrer quels bénéfices ils en auraient tirés. Ensuite, décréter que tous ceux qui se traitent ne sont plus soumis aux lois qui limitent leurs droits.

— Sauf qu'il y aura toujours des gens qui ne leur feront pas confiance et qui craindront qu'ils ne prennent pas la potion chaque mois, remarqua Harry avec réalisme.

— Tant qu'on n'aura pas trouvé une médication les guérissant définitivement, le problème se posera. Mais au moins, la majeure partie de nos loups-garous se traiterait, ce qui serait une libération pour eux et entraînerait mathématiquement la baisse des contaminations.

— Tu connais des loups-garous, Hermione ? demanda Ginny. Des personnes que tu pourrais convaincre et qui prêcheraient à leur tour la bonne parole ?

— J'ai bien l'intention de tenter de leur parler, mais avec le battage médiatique sur la volonté de contraindre du ministère, ce que je pourrais dire aura moins d'impact.

*

Deux semaines plus tard, Harry et Ginny avaient prévu d'aller dîner chez Ron et Hermione. Tandis que Ginny racontait une histoire à James et Albus pour les endormir, Harry alla prendre une douche. Alors qu'il était en train de s'habiller, Trotty vint frapper à la porte de la chambre.

— Monsieur Ron à la cheminée, annonça-t-il.

Harry descendit rapidement pour prendre la communication.

— Il s'est passé quelque chose cet après-midi, expliqua Ron sans préliminaires. Hermione est enfermée dans notre chambre et elle pleure. On laisse tomber pour ce soir.

Harry s'apprêta à dire que ce n'était pas grave, qu'ils se verraient le dimanche suivant, quand une lueur dans les yeux de son ami arrêta ses paroles convenues.

— Tu veux qu'on vienne ? demanda-t-il à la place.

Ron ne répondit pas, mais hocha frénétiquement la tête.

— On arrive, dit brièvement Harry.

Il se releva et monta expliquer la situation à Ginny. Elle confia James et Albus à Trotty, et ils cheminèrent jusqu'au centre commercial à proximité de la maison de Ron et Hermione. Ils sortirent de la voiture-cheminée et se pressèrent vers le lotissement où habitaient leurs amis.

Ron parut soulagé de les voir en leur ouvrant la porte, Rose dans les bras.

— Elle est toujours sur notre lit, leur exposa-t-il en chuchotant. Mais elle ne pleure plus.

— Mais qu'est-ce qui s'est passé ? demanda Ginny.

— C'est à propos du projet de loi sur la potion Tue-loup. Ça se présente très mal pour les loups-garous, et elle est dans un tel état que je ne sais plus quoi lui dire.

Harry fonça vers la chambre du couple. Il frappa et demanda :

— Je peux entrer ?

Il attendit quelques secondes puis entrouvrit la porte. Il découvrit Hermione allongée en chien de fusil sur son lit. Il en fit le tour pour se placer face à elle. Elle avait les cheveux emmêlés et le visage rougi par les larmes. Elle fit un effort pour parler normalement :

— J'avais demandé à Ron de décommander.

— Et tu crois qu'on allait te laisser comme ça ? répliqua Harry.

Ginny se glissa à son tour dans la pièce et s'assit près de son amie.

— Raconte, suggéra-t-elle. Si c'est encore mon crétin de frère qui a dit une bêtise, je saurai te venger.

Hermione eut un pauvre sourire tandis que son mari, resté à la porte, protestait pour la forme.

— Non, c'est au travail, soupira Hermione.

— Qu'est-ce qui s'est passé ? demanda Harry en s'asseyant lui aussi sur le lit.

— Je pensais qu'en étant au service de régulation des créatures magiques, je pourrais les aider ! explosa Hermione. Mais la situation des loups-garous va empirer, et je ne peux rien y faire.

Elle raconta dans le désordre mais ils finirent par reconstituer ce qui la mettait dans un état pareil. Ces derniers jours, tandis qu'Hermione cherchait à contacter les garous qu'elle connaissait pour leur faire entendre raison, son département préparait un projet de loi pour rendre obligatoire l'achat et l'ingestion de la nouvelle formule de la potion Tue-loup.

Elle-même avait été écartée de l'équipe qui le rédigeait, et le texte avait été envoyé au Magenmagot sans qu'on ne la consulte ni ne l'informe. C'est Susan Bones qui lui en avait fait parvenir une copie en fin d'après-midi. Hermione avait été horrifiée par ce qu'elle y avait découvert.

Il était prévu que tous les loups-garous devaient se procurer une dose de potion chaque lunaison et donner leur nom lors de l'achat, pour permettre au ministère de vérifier que tous les garous inscrits sur leur liste s'étaient bien pliés à leur obligation. Il était en outre prévu que tout garou qui serait surpris sous sa forme de loup pendant la peine lune – même barricadé dans un lieu sûr – était passible d'un emprisonnement à Azkaban pouvant aller jusqu'à un an.

— Vous vous rendez compte ? gémit Hermione. Le seul fait d'être loup-garou et de se transformer deviendrait un délit. Jamais le ministère n'était allé aussi loin !

Elle était immédiatement allée voir sa cheffe pour tenter de la convaincre de retirer cette disposition du texte, mais Hestia avait été intraitable :

— Elle m'a opposé que le rôle de notre département est avant tout de protéger les sorciers contre les créatures magiques et que ce texte sert précisément ce but, leur rapporta Hermione.

— Mais un loup-garou est un être humain, s'offusqua Harry.

— Par quand il est transformé, soupira Hermione. Pour finir, j'ai tenté d'invoquer Remus et j'ai rappelé à Hestia leur appartenance commune à l'Ordre du Phénix, mais elle m'a répliqué que Remus était quelqu'un de particulier et que la plupart des autres sont dangereux. Et, ça n'a pas manqué, elle a remis sur le tapis le procès Greyback. Je savais que ce fou furieux desservirait notre cause !

Harry se remémora les paroles haineuses que le loup-garou avait prononcées devant ses juges. Il avait appelé ses frères à obéir à leur instinct de prédateurs et avait menacé les sorciers de représailles sanglantes. Cela avait provoqué à l'époque un vif émoi dans la communauté.

— Quand je suis rentrée dans le service, j'espérais faire voter des règlements qui feraient avancer les choses, se désola Hermione, mais c'est tout le contraire qui arrive. On devrait profiter de cette potion pour alléger les règles qui pèsent sur les loups-garous, mais leur situation sera pire que jamais.

Hermione avait autrefois expliqué à Harry que la loi avait un rôle pédagogique car les obligations qu'elle faisait naître étaient représentatives des valeurs morales d'une société et permettaient aux mentalités d'évoluer plus vite. Ainsi, qu'un maître maltraitant son elfe risque la confiscation faisait avancer l'idée qu'il était immoral de battre ces créatures, alors même que cette règle était, dans les faits, peu appliquée. De même, la loi prévue par Hestia Jones ne ferait que renforcer la méfiance des sorciers envers les loups-garous.

— Je ne comprends pas, objecta Ginny. C'est bien avec l'approbation d'Hestia que tu as pu faire passer tous ces règlements en faveur des elfes de maison, non ? Elle n'est pas si méchante.

— Les elfes ne représentent aucune menace dans l'esprit des sorciers. Quand on parle des gobelins et des loups-garous, c'est toute autre chose. Entre l'histoire de la magie par Binns et les cours de défense contre les forces du Mal, tout le monde les craint. Hestia comme les autres.

— Hermione, ça va trop loin, dit Harry. Il faut que tu en appelles directement à Kingsley. Il ne peut pas laisser passer cette ignominie.

— Il ne peut pas se permettre de désavouer un de ses chefs de département pour me faire plaisir. D'ailleurs, Hestia ne me le pardonnerait jamais, et je n'aurais plus qu'à présenter ma démission.

— Sauf si c'est toi la nouvelle cheffe, suggéra Ron.

— Tu es fou !

— Pas du tout, je suis certain que tu en as l'étoffe.

Harry et Ginny hochèrent la tête pour signifier qu'ils en pensaient autant. Hermione secoua la sienne en signe de refus :

— Parce que vous imaginez qu'après m'avoir vue poignarder Hestia dans le dos pour prendre sa place, mes collègues m'obéiront ? Pourquoi croyez-vous que Kingsley la suit ? Tout le service pense comme elle ! Ils sont sincèrement persuadés d'agir pour le bien de la communauté et la sécurité de tous.

Cela rappela à Harry sa première rencontre avec Amos Diggory. Le mépris avec lequel il avait parlé à la petite elfe des Croupton l'avait beaucoup choqué ce jour-là.

— C'est tout le service qu'il aurait fallu changer dès le début, jugea Ginny.

— Il a dû garder un minimum de gens qui connaissaient les dossiers et les façons de procéder, sinon ça aurait été l'anarchie, expliqua Hermione. Dans les choix qu'il a faits, il a surtout tenté d'assainir les départements où la corruption s'était installée du temps de Fudge. Il a dû arbitrer entre plusieurs priorités, et je ne peux pas le lui reprocher.

— Bon, concentrons-nous sur cette nouvelle loi. Qu'est-ce qui pourrait faire changer d'avis Hestia Jones ? demanda Ginny après un moment de réflexion.

Hermione considéra la question et finit par répondre :

— Je ne vois pas.

— Et comment faire pour que cette loi ne soit pas adoptée ? continua Ginny.

— Je suppose que si tous les autres chefs de département votent contre pendant le Conseil, Kingsley ne la fera pas passer en force, émit Hermione. Mais je ne pense pas pouvoir en convaincre beaucoup en plus d'Arthur et Percy et peut-être Sturgis Podmore. En règle générale, les chefs de département se soutiennent entre eux.

— Le Conseil est un moment de discussion, rappela Ron. C'est justement l'occasion de faire valoir ton opinion. En tant que chef de guilde, j'envoie régulièrement des pétitions au ministre quand des lois concernant les artisans sont mises aux voix. Pourquoi n'en ferais-tu pas autant ?

— Moi, je ne représente personne, lui opposa sa femme.

— Y'a-t-il une règle limitant les pétitions qu'on peut adresser au ministre ? questionna Ron.

— Sans doute que non, puisque Bielinski l'a fait avec le succès que nous lui connaissons, remarqua Harry.

Hermione les regarda pensivement :

— Si je fais ça, Hestia va demander ma tête à Kingsley, et il sera bien obligé de la lui accorder.

— Mais enfin, tu es Hermione Granger, celle qui a combattu aux côtés du Survivant ! fit Ginny interloquée.

— Cela ne me donne pas le droit d'agir de façon déloyale envers mon service, répliqua Hermione.

— Faire en sorte que les loups-garous ne tombent pas sous le coup de la loi du fait de leur seule transformation te donne un certain nombre de droits, soutint Harry.

— Si je tiens à rester au département des Créatures magiques, c'est précisément pour être en position de me battre pour eux ! affirma Hermione. Ce n'est pas pour ma carrière que j'ai des craintes.

— Tu as manifestement atteint les limites de ce que tu peux accomplir sous les ordres d'Hestia, observa Ron.

Cela réduisit momentanément Hermione au silence.

— Tu as raison, admit-elle finalement. Je dois faire mon possible pour contrer cette loi.

— Pense à Malefoy, dit Ron pince-sans-rire. Tu ne peux pas le laisser tomber maintenant !

Ginny et Harry attendirent de voir la réaction d'Hermione, qui sourit enfin, avant d'éclater de rire, assurés que c'était bien de l'autodérision et non une attaque de la part de Ron.

— Tu as raison, Malefoy vaut bien que je mette mon poste en jeu, continua-t-elle la plaisanterie. Et advienne que pourra.

Les deux époux échangèrent un regard qui signifiait que le sujet Malefoy était parfaitement sans équivoque entre eux.

— Hestia te gardera peut-être, l'encouragea Ginny.

— J'en doute, dit sombrement Hermione. Même si je ne l'attaque pas perfidement mais à visage découvert, elle ne peut passer l'éponge sans se discréditer vis-à-vis du reste du service.

— Quand bien même ! dit Harry. Est-ce si grave que tu perdes ta place ? Tu trouveras un autre moyen d'atteindre tes buts, voilà tout. Pense à tout ce que tu as déjà accompli.

Le visage d'Hermione se détendit :

— Merci. Merci à tous.

Harry, Ginny et Ron sourirent et haussèrent les épaules pour montrer qu'ils n'avaient rien fait d'extraordinaire.

— Ce n'est pas tout ça, fit Ron, mais on n'a rien de prêt pour le dîner. On va acheter des pizzas ?


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