61 - Déni

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Il fallut un moment à François pour assimiler ces nouvelles informations. Finalement, il demanda :

— Même si c'était une surprise, pourquoi as-tu attendu d'en être à quatre mois et demi de grossesse pour me mettre au courant ?

— Je te l'ai dit dès que je l'ai su.

— Arrête ! Tu devais bien avoir des symptômes !

— François, j'étais en plein chagrin d'amour, je me retrouvais en prison, mon monde s'était écroulé. Je ne me suis même pas rendu compte que je n'avais plus mes règles. Mes nausées et mes maux de ventre ne m'ont pas alertée, vu la nourriture qu'on nous servait. C'est seulement quand j'ai fait un malaise qu'on m'a examinée et que la docteure m'a expliqué que j'étais enceinte. Je lui ai dit que ce n'était pas possible puisque cela faisait quatre mois que j'étais là. Quand elle m'a appris que j'étais au moins à ma vingtième semaine de grossesse, je ne pouvais pas la croire. J'ai regardé mon ventre, il était tout plat. J'avais perdu dix kilos depuis mon arrestation. Il a fallu qu'elle me fasse écouter le cœur du bébé pour que je réalise.

— Tu avais un ventre de femme enceinte parfaitement normal, quand je suis venu, se souvint-il.

Il n'avait jamais oublié cette image et le dégoût qu'il avait ressenti en voyant la matérialisation du cauchemar qu'il vivait depuis qu'il avait reçu cette lettre.

— Mon corps est devenu conforme à mon état en quelques jours. Il parait que c'est courant en cas de déni de grossesse.

François ne savait pas s'il pouvait la croire. Comme elle l'avait elle-même rappelé, elle lui avait énormément menti auparavant. Mais très vite, il réalisa qu'il avait envie que ce soit vrai. Pour que Julien ne doive pas son existence à la volonté de sa mère de nuire à son père. Et aussi pour que l'amour qu'il avait autrefois éprouvé pour Tamara ait une issue moins sordide.

Pour aller au fond des choses, il demanda :

— Si tu l'avais su plus tôt, qu'est-ce que tu aurais fait ?

— Je t'aurais prévenu bien entendu. Mais je n'aurais pas avorté si c'est le sens de ta question. Je n'ai pas fait exprès de tomber enceinte, mais je t'aimais trop pour ne pas garder ton bébé. Je suis consciente que ça aurait été une décision égoïste, mais... nous savons que je le suis, n'est-ce pas ?

Quand il avait appris qu'il allait être père, il avait eu l'impression que sa vie était irrémédiablement gâchée. S'il avait eu connaissance de cette grossesse à temps, il aurait effectivement fait son possible pour la convaincre d'avorter. Mais aujourd'hui, il n'imaginait pas son existence sans cette paternité qu'il avait endossée à son corps défendant.

— Finalement, le résultat n'est pas si mal, concéda-t-il.

— Oui, Julien est un garçon fantastique, approuva-t-elle.

La tendresse que François lut dans son expression l'émut malgré lui. Il y avait eu un temps où elle l'avait regardé ainsi, douce et amoureuse.

Il détourna la tête, troublé par les souvenirs que cela évoquait.

François se sentit profondément ébranlé. Depuis quinze ans, il la tenait loin de ses pensées pour se préserver contre la peine et la colère qu'elle lui avait fait éprouver. Il ne s'était jamais demandé ce qu'elle ressentait, ni ce qu'elle était devenue. Il ne voulait pas rouvrir cette porte qu'il avait eu tant de mal à fermer.

Maintenant qu'elle était en face de lui, il ne pouvait plus se maintenir à distance. Elle était là, avec ses mensonges passés et ses affirmations dérangeantes. Qu'elle dise la vérité ou non, il sentait bien qu'elle aimait Julien et se préoccupait de lui.

Il l'avait trouvée changée quand il l'avait évaluée à son arrivée, mais en la voyant évoluer et parler avec Julien ces deux derniers jours, il avait retrouvé en elle des gestes et des expressions qui le ramenaient vers son passé. Il était bien obligé de reconnaitre que, malgré ses efforts, il n'avait pas tout oublié du profond amour qu'il avait ressenti pour elle et du désir qu'elle savait faire naître en lui.

Elle le tira de ses pensées :

— Je voulais te remercier aussi.

— De quoi ? demanda-t-il désorienté.

— De n'avoir pas dit de mal de moi à Julien. J'aurais compris que tu le mettes en garde, mais tu l'as laissé venir à moi sans préjugés. Cela a été... un immense cadeau. Je t'en suis profondément reconnaissante.

— Je...

Gêné, François ne sut que dire. S'il n'avait jamais répondu aux questions de Julien, c'était avant tout parce qu'il n'arrivait pas à aborder le sujet de manière cohérente et objective, et qu'il avait craint de faire porter un poids trop lourd à son enfant.

— Cela n'aurait pas été bien pour Julien, dit-il finalement.

Tamara lui adressa un sourire ému qui lui alla droit au cœur :

— J'ai toujours su que tu serais un excellent père.

François ne parvint jamais à reconstituer exactement ce qu'il se passa ensuite.

Il se souvint avoir été touché par la confiance qu'elle exprimait et l'éclat de son sourire. Il se rappela aussi avoir soudainement pris conscience qu'en discutant ils s'étaient insensiblement rapprochés l'un de l'autre, et qu'elle était maintenant assez près pour qu'il puisse respirer son parfum. Il s'était rendu compte que l'attrait puissant que son corps avait autrefois exercé sur lui n'avait pas complètement disparu. Peut-être ses pensées s'étaient-elles reflétées sur son visage. Quoi qu'il en soit, elle lui avait jeté un regard surpris puis ses joues s'étaient empourprées et ses yeux s'étaient mis à briller. Malgré lui, il avait fait un pas vers elle. Sans doute, en avait-elle fait autant.

Ce dont il était sûr, c'est qu'il n'avait eu qu'à baisser la tête pour l'embrasser.

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