4 - Rubans

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Une tasse de thé brûlante diffuse sa chaleur dans les paumes de mes mains, c'est délicieux, comme si je ramenais une partie de la maison au lycée. Je lève la tête avec un grand sourire vers Noa, qui vient de me l'apporter depuis le rez-de-chaussée.

-Merci, c'est vraiment gentil, soufflé-je pour mon ami.

Il s'assoit à côté de moi, avec un gobelet de café qui forme des volutes de fumée.

-De rien, j'avais besoin d'un café de toute façon, se justifie-t-il en haussant les épaules.

Roxanne est avec nous, et nous regarde avec un sourire attendri, comme s'il y avait quelque chose de mignon dans cette scène. Elle a un cahier de cours sur les genoux, mais depuis que nous nous sommes installés avec elle dans notre couloir, elle n'y a pas touché, son stylo est déposé sur le papier blanc, et son regard s'accroche sur tout, pourvu que ce ne soit pas son livre, posé à sa droite sur la moquette.

Noa boit doucement sa boisson chaude, et je goûte moi aussi l'eau aromatisée à la menthe. C'est vraiment agréable de pouvoir, avant notre dernière heure, prendre une boisson, je remercie une nouvelle fois Noa, qui soupire, souriant toujours, et dit que je devrais juste boire.

-Pourquoi tu n'aimes pas le café ? me demande-t-il.

-Parce que c'est vraiment pas bon pour mes papilles, que c'est trop amer, et que ça ne passe pas dans ma gorge, expliqué-je.

-C'est vraiment détaillé ce que tu dis, rit-il.

-C'est toujours comme ça avec Aline, tu pourrais lui demander de quelle couleur est la moquette, elle ne dira jamais simplement "vert", intervient ma meilleure amie, avec une petite risette illuminant ses traits.

-C'est beaucoup plus intéressant quand c'est long et compliqué, raisonné-je. Sinon, pourquoi on poserait la question de la couleur de la moquette ? Sauf si la personne est aveugle, mais même là, ça ne sert à rien si elle ne sait pas ce que sont les couleurs.

Roxanne pointe son stylo sur moi, comme un revolver chargé à blanc.

-Tu vois, tu dis encore des trucs super longs.

Je hausse les épaules, et aussitôt, Noa rebondit :

-C'est vrai que tu fais tout le temps ça ! Ce matin par exemple, quand la prof de français t'a demandé de commenter un procédé, tu as fait la plus longue interprétation que j'ai connue ! s'exclame-t-il.

Je ne peux m'empêcher de rougir. Je n'aime pas me faire remarquer, pas pour l'intelligence en tout cas. Être intelligente n'apporte rien de plus, et étaler ses connaissances est inutile. J'avais juste fait ce qui me semblait le plus pertinent ce matin, mais apparemment c'est déjà beaucoup pour les autres. Il faudrait que je me renseigne sur ce que font les autres. Je pourrais essayer d'espionner mon voisin.

Je n'aime pas attirer l'attention, pas en classe, et je n'aime pas être supérieure. Le supériorité c'est le pouvoir, le pouvoir c'est exigeant, il vaut mieux rester dans la normalité, c'est moins fatiguant et les gens n'utilisent pas la moindre excuse pour nous bombarder de reproches acérés comme les poignards d'un mercenaire.

-Ce n'était pas grand chose, tu exagères.

-Tu adores le français, ce n'est pas étonnant, commente Roxanne.

De nouveau, je hausse les épaules. J'aime le français, l'art des mots, de les assembler pour faire naître des émotions, mais les cours ne transmettent pas toujours cet aspect de la matière. Et ce n'est pas parce que l'on aime quelque chose que la chose en question nous aime, loin de là. J'aime le chocolat, mais le chocolat ne m'aime pas vu que quand j'en mange trop, je finis malade. Amour vache.

Je bois une gorgée de thé, chaud, brûlant même, un doux feu qui atteint mon œsophage. Il a le piquant de la menthe.

-J'ai besoin de votre avis, nous interpelle la brune qui aujourd'hui, a attaché ses cheveux en un volumineux chignon dont plusieurs mèches s'échappent vers la liberté. J'ai une idée pour un pantalon, mais je ne suis pas absolument sûre.

-Montre donc, fait Noa en se penchant vers notre amie.

Elle sort un dessin de son sac. C'est une feuille avec le pantalon de devant, de derrière, de droite et de gauche, avec des descriptions de tissus, de dimensions autour. Il est fait d'un tissu noir, avec un ruban noué tout du long des deux côtés des jambes, qui forme comme un lacet, ce qui donne un air un peu gothique ou rock au vêtement.

-J'hésite sur la couleur du ruban, nous explique-t-elle. Il peut être rouge, violet, noir ou vert militaire.

Je me frotte le menton, me représentant mentalement les possibilités.

-Tu comptes le porter après, n'est-ce pas ?

Elle confirme et je me tourne vers elle, et ancre mes yeux verts dans les siens, plus sombres.

-Alors choisis une couleur que tu pourras accorder avec tes vêtements. Peut-être pas le rouge et le violet dans ce cas, qui sont trop voyants. À moins que ce ne soit ça que tu recherches.

-Et si tu optais pour le vert alors ? me complète le garçon d'origine laotienne. Il ne faut pas non plus perdre l'originalité, et tu as des hauts simples que tu pourrais porter avec, non ?

Elle acquiesce, et toute souriante, saisit un feutre vert pour repasser les contours du ruban.

-Merci ! Une bonne chose de faite !

-Tu vas le faire en cours ? la questionné-je, car j'adore savoir ce sur quoi elle travaille.

Elle est en bac pro mode, alors les vêtements, c'est son truc, surtout s'ils sont nés sous ses doigts. Jupes, vestes, tee-shirts, elle aime tout dessiner et créer avec les tissus les plus beaux qu'elle peut trouver. Elle m'avait fait une veste en jean une fois, je l'ai toujours dans ma chambre, mais il fait trop froid ces temps-ci pour que je la porte, ce qui est bien dommage car elle est magnifique, avec ses fleurs dessinées sur le bout de la manche droite et en bas, vers les hanches. J'admire vraiment son travail, et je sais qu'elle passe beaucoup de temps à créer et imaginer. J'admire le fait qu'elle ait une passion et qu'elle se donne à fond pour. J'aimerais être aussi motivée pour quelque chose, mais je pense que je n'ai pas encore trouvé ce qui me correspond le plus. Ce n'est pas grave, je vis très bien sans pour l'instant.

Roxanne range la feuille dans une pochette couverte d'un dessin d'une main avec un tatouage imitant la dentelle. Noa et moi nous nous installons de nouveau contre le mur, en face d'elle, avec nos tasses de boisson chaude.

-J'ai entendu dire que tu vas partir au Laos, Noa, déclare-t-elle. C'est vrai ?

Il avale une nouvelle gorgée de café, et, les jambes remontées contre sa poitrine, sourit.

-Oui, je pars dans une semaine maintenant, annonce-t-il. J'ai hâte !

-Oui j'imagine, fait la brune en souriant. C'est un petit pays, n'est-ce pas ? J'espère que tu vas trouver la trace de tes parents.

-Je ne peux pas partir trop optimiste. Mes parents, adoptifs je veux dire, n'ont absolument aucune information sur eux, alors ça risque d'être compliqué, mais on verra bien une fois qu'on aura essayé.

Il a de nouveau l'air dans la lune, son monde à lui l'enveloppe et lui montre des images de gens heureux, à la peau de la même nuance brune que lui, aux cheveux tout aussi sombres, et au grand sourire contagieux comme un rhume en hiver. Je lui donne un coup de coude dans les côtes, et il se tourne vers moi, surpris et le visage faussement outré.

-Même si tu ne les retrouve pas, tu auras au moins vu ton pays d'origine, et tu te seras renseigné sur la vie là-bas.

-Tu as raison, approuve-t-il avec un regard doux dans ma direction.

-Toujours ! Et puis, c'est quand même incroyable d'aller dans un pays aussi éloigné du nôtre, au niveau culturel au moins, précisé-je. Tu vas apprendre beaucoup en trois semaines, ça va te faire grandir.

À mon tour, je me vois contaminée par son enthousiasme, et je ne peux m'empêcher de l'imaginer, là-bas, dans un petit village, découvrir de nouvelles choses, de nouvelles traditions, qui doivent être très différentes de celle, occidentales, que nous connaissons.

-Tu veux dire que je suis immature ? fit-il semblant d'être scandalisé.

-Mais non, idiot, je veux dire que tu vas devenir plus grand en terme de grandeur d'âme, rectifié-je, sans pouvoir m'empêcher de rire.

-Oui parce que sinon, c'est pas très gentil, et que si c'était au sens littéral, j'aurais dû t'emporter avec moi, me taquine-t-il en m'adressant un clin d'oeil exagéré.

En face de nous, Roxanne rit en remettant une mèche de ses cheveux derrière ses oreilles, même si elle retombe immédiatement sur son visage. Je me concentre sur Noa, et le toise d'un œil prétendument méchant. Je ne suis pas très douée pour avoir l'air en colère alors j'aime jouer le jeu, c'est très amusant de se moquer de nous comme ça, c'est exactement ce que nous faisons souvent tous les deux.

Le grand brun a un sourire provocateur, atrocement drôle.

-Tu insinue que je suis petite là, non ?

-Pas du tout, ma petite Aline, je suis sûr que dans ta tête tu es très grande !

Il va subir ma vengeance, le malotru ! Je prend sa tête, au-dessus de la mienne certes, et la penche vers moi pour lui frotter vigoureusement le cuir chevelu en l'enfonçant plus bas.

-Petit idiot va ! m'exclamé-je.

Il lève ses mains en signe de soumission.

-J'ai compris, j'ai compris, tout n'est qu'une question de perspective, tu es très grande, tu peux me lâcher maintenant ?

Je lui obéis et, comme pour pousser encore plus loin la bêtise, il se redresse aussi haut qu'il le peut. Il fait pratiquement dix centimètres de plus que moi comme ça, même si nous sommes tous les deux assis. C'est vraiment une sorte de girafe, Noa.

Je soupire, et me détourne pour finir ma tasse de thé, que j'avais posée sur la moquette, à côté du gobelet de celui qui se prend pour un malin. Nous finissons la pause bien plus tranquillement. Roxanne nous parle d'un de ses projets, pour Oriana, Noa évoque ses bagages, et moi, j'interviens, je commente, mais je ne parle pas de moi. Il n'y a rien d'intéressant à dire dessus, ma vie n'est pas palpitante, il ne s'y passe rien, et je n'aime pas particulièrement la décrire à ceux qui tiennent à moi.

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