Putain de guerre

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J'ai mal partout. Vraiment. Putain de guerre.

Je suis couvert de boue, aussi. Putain de tranchées.

Je n'arrive pas à être de bonne humeur, pourtant je rentre chez moi aujourd'hui. Je quitte enfin ce trou à rats.
Je fixe mes bottes. Je n'ai que ça à faire, maintenant. J'ai oublié de quelle couleur elles sont, juste marron-boue. Mais je suis coupé dans ma réflexion : quelqu'un vient de s'arrêter devant moi. Et lui, on peut voir ses bottes. Je relève la tête comme je peux et je le regarde dans les yeux. Pas de cernes, rien. Pourquoi il me fixe comme si j'étais un vulgaire insecte écrasé ? Sûrement parce-que je suis aussi pitoyable qu'un vulgaire insecte écrasé. Lui, il est flambant neuf.

- Quoi ? lui dis-je sèchement.

- Tu n'as pas l'air bien. répondit-il.

- Et ça t'étonne ? je réplique.

Il ne répond pas. Je n'aurais peut-être pas du lui parler comme ça. Il n'est peut-être méchant, après tout. Il s'inquiète pour moi.

- Tu fais partie de la relève ? je demande.

- Oui... Tu t'es fait quoi au bras ?

J'avais presque oublié. J'ai le bras en écharpe et je ne peux pas le bouger.

- Un stupide obus. je marmonne.

- Pas de chance.

- Chance ? je m'étonne.

- Oui, chance. confirme-t-il.

- Mon vieux, ce n'est pas de la chance, tu sais ! je m'agace. Tu ne t'en sortira pas mieux que moi !

- Bof, si je me débrouille bien, ça devrait aller. Et puis depuis le temps que j'attend ça ! déclare-t-il avec un sourire.

Là, je vois rouge. Comment peut-on attendre la guerre ?

- Tu as perdu ton cerveau ou juste la raison ?

- Comment ? s'exclame-t-il.

- Tu viens de t'engager pour un aller sans retour dans le pire endroit que tu puisses trouver sur Terre ! je gronde.

- Tu exagères.

Cette enflure me met plus en colère que si un boche dansait sous mon nez. C'est pour dire.

- Ça fait des mois que je me prépare et que je suis volontaire ! Je vais enfin pouvoir me battre !

- L'erreur de ta vie. Ouais, finalement, tu as raison. J'ai de la chance. La chance de m'en sortir !

- Arrête, c'est super d'être ici ! J'ai toujours rêvé d'être utile à mon pays, de pouvoir le protéger ! Que cela te plaise ou non, je suis content.

Je ne comprend plus rien.

- Enfin ! Tu réalises ce que tu dis ? Si tu ne t'emmêles pas dans les barbelés, tu te feras fusiller, ou exploser par un obus ! Si tu ne meurs pas asphyxié, tu mourras de faim, de fatigue, ou même de maladie !

- Mais toi, tu es là, ça prouve bien quelque chose !

- J'ai eu de la chance ! je gronde. Beaucoup de chance ! Nous sommes très peu à nous en être sortis, mes camarades sont morts !

- Je ne suis pas un imbécile. Je suis fort, rapide, et très résistant ! ajouta-t-il dans un sourire.

Je ne sais plus quoi dire. Rien ne fonctionne. J'en ai marre de l'entendre déblatérer des sottises. Je renonce à le ramener à la raison et je me lève. Il se rendra compte bien assez vite de son erreur. J'aperçois mes camarades de front, du moins ce qu'il en reste, non loin de moi, sûrement à jouer aux cartes. Je quitte cette sombre andouille en boittant et rejoins le groupe clopin-clopant, la boue et la classe pesant lourd. Je vais attendre de partir avec eux, enfin, en jouant aux cartes.

Quoique, je ne sais pas comment jouer aux cartes avec une seule main.

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