Huitième lettre

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À la demoiselle partie en Australie,

Je n'ai pas réussi à finir la dernière lettre que je t'ai écrit. Désolée, c'était au-dessus de mes forces.

Je reste plantée toute la journée devant la télé, bloquée sur BFM, avec l'espoir d'obtenir des informations supplémentaires. Ils évoquent plusieurs pistes : erreur technique, terrorisme, etc. Qu'est ce que j'en ai à faire, moi ? Ça ne me dit pas ce que tu deviens, toi.

Ils n'ont toujours pas retrouvé l'avion. J'ai espoir qu'il ai réussi à atterrir, ou à amerrir près d'une petite île paumée, mais toujours aucune nouvelle.

Ça fait combien de jours que tu aurais dû arriver, hein ? Quatre jours, je crois. Quatre ou cinq jours, peut-être. Qu'est-ce que ça change ?

Je suis en colère, trop en colère.

"Pourquoi ?"

Ça résonne encore dans ma tête. Toujours et encore.

Au début, je le niais. Je me disais « Cet avion dont ils parlent, ce n'est pas le tien ». Pourtant ça fait quelques jours qu'ils radotent. J'ai bien dû finir par y croire.

Pour l'instant ça tourne, les gens en parlent... et dans deux mois, hein ? Personne ne s'en souviendra. Personne.

Sauf moi, tes amis, ta famille. Eux n'auront pas oublié. Parce qu'ils ne pourront pas. Au final, j'ai l'impression de revoir ce que tu disais : si tu n'étais pas dans cet avion, clairement, j'aurais été triste, puis j'aurais oublié. Parce que ça ne me concernait pas. Parce que j'en aurais rien eu à foutre. C'est triste, hein ? Je fais partie de ces gens égoïstes. Je le sais maintenant.

Tu me manques énormément. Plus le temps passe, plus j'ai l'impression que je ne te reverrais pas.

La Mort est sournoise, surprenante, cruelle. On était censées se voir après ton retour. Maintenant, j'ai juste l'impression que tout ce dont je devrais me contenter est un corps sans vie.

Mais j'ai quand même l'impression de te parler. À travers ce papier. Ce foutu papier à carreaux que j'ai utilisé pour écrire les cours, dessiner, faire des foutues batailles navales avec toi, colorier les carreaux une fois sur deux...

Alors je continue d'écrire. Comme si ce simple geste permettait de garder espoir, de te garder en vie ou que tu sois.

Je sais que c'est inutile.
Mais je n'ai pas envie de m'en convaincre. Pas tout de suite.

Je sais que je devrais accepter ta mort. Qu'il n'y a presque aucun espoir de te revoir revenir en vie. Mais que veux-tu ? Je n'arrive pas encore à m'en convaincre.

Je le sais, on me le répète. Et pourtant, quelque part, très loin au fond de moi demeure une lueur d'espoir. Cette saleté de petite lumière qui me tord le coeur et me fait ressembler à une coquille vide.
"L'espoir fait vivre", mon cul oui. Il te tue à petit feu en te faisant espérer un truc qui n'arrivera pas. Merci l'espoir.

Tu me dirais sûrement un truc genre "Vis", "Tourne la page". Le genre de trucs facile à dire quand ce n'est pas toi qui est mal.
Je me doute que c'est vrai. Que je devrais le faire. Mais j'y arrive pas.

J'aimerais juste avoir quelques mots de toi, te voir une dernière fois. Juste une fois.

Je ne sais même plus pourquoi j'écris encore cette lettre.
J'ai mal au poignet et le papier est sans cesse mouillé par de grosses larmes.

J'aimerais juste te voir une dernière fois...

Mes salutations qui n'ont plus rien de distinguées,
Moi-même.

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